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“Tout travail mérite salaire”, c’est bien connu. Partant de ce principe, nous devrions sûrement rémunérer nos enfants pour leur participation aux tâches de la maison. Pourtant, nous ne sommes pas payés nous-mêmes pour l’accomplissement de ces tâches, ce qui contredit déjà le principe de départ… Y a-t-il deux poids, deux mesures sur cette question ? 

Les avis divergent… Entre les parents qui considèrent qu’il est normal que les enfants participent, et ceux qui cherchent à les motiver à faire plus, comment se situer ? 

— Note :  cet article a d’abord été publié dans Grandir Autrement, numéro 80 de janvier-février 2020, dans le dossier “Les enfants et l’argent” —

La participation à la vie de famille

Avant même de parler de rémunération, je voudrais vous encourager à considérer la participation à la vie de famille, pas seulement sous l’angle de l’obligation, mais plutôt sous celui du plaisir. Il me semble en effet que la confusion vient de ce que l’on imagine souvent que l’enfant n’a pas envie de participer. Qu’il va falloir l’y obliger, ou trouver une autre manière de l’y inciter. 

Pourtant, participer est également une joie. Et ce, pour plusieurs raisons ! 

L’appartenance

L’enfant, comme tout être humain, a un fort besoin d’appartenance. Participer à la vie de famille, c’est faire partie de la famille. Tout passe dans ce cas par notre communication sur le sujet. Si nous partons de l’hypothèse que les adultes organisent la maison, alors cela se traduira dans notre manière d’aborder la question avec l’enfant. Nous lui demanderons de nous aider, comme un service qu’il nous rend. Si, au contraire, nous considérons la contribution de chacun comme une participation à la vie en communauté, personne ne rend de service à personne. Chacun fait plutôt sa part, parce qu’il appartient au groupe, au même titre que les autres…

L’importance

Un autre besoin fondamental de l’être humain est celui d’importance. Chacun a besoin de sentir qu’il est utile, qu’il a un rôle, qu’il est capable. Et ce besoin d’importance recoupe justement celui de l’appartenance dans l’action de contribuer. Ainsi, laisser nos enfants contribuer dans la maison permet de nourrir leurs besoins fondamentaux, et les aidera à se sentir bien dans leur peau. La contribution est ainsi vue, non pas comme une contrainte, mais bien comme une manière d’être, soi-même, et avec les autres. 

Le sens

Participer aux tâches de la maison est peut-être l’activité qui a le plus de sens pour le jeune enfant. Combien d’enfants veulent à tout prix passer l’aspirateur, vider le lave-vaisselle, nettoyer la table ? Maria Montessori l’avait bien compris, qui a développé toute une gamme d’activités autour de la “vie quotidienne” : le jeune enfant a l’élan de copier ce qu’il voit. De faire siens les gestes dont il est témoin. De développer ses compétences pour participer à son tour. Il développe ainsi ses capacités dans un contexte qui a un sens, source d’un apprentissage qui rime avec plaisir. Ce n’est que plus tard, souvent parce que, malheureusement on l’a plutôt démotivé en le refrénant petit (parce qu’il ne faisait pas bien, parce que c’était plus rapide de faire sans lui) que l’enfant perd cet élan pour les tâches de la maison. Dommage. 

La récompense démotive

Venons-en maintenant au coeur de la question du jour : rémunérer ou pas. On peut bien sûr voir l’aspect positif de la chose. L’enfant a accompli quelque chose, et mérite bien de pouvoir se faire plaisir en retour. Voyez cependant comme la simple présentation ainsi rejoint l’exposé précédent, celui qui pré-suppose que participer n’est pas un plaisir. Malheureusement, plus l’enfant sera récompensé pour les tâches accomplies, plus cette vision des choses se développera. Car nous sommes ainsi faits que plus la récompense croit, plus notre motivation décroit. La récompense prend en réalité le pas sur la motivation intrinsèque. Et donc, au bout du compte, la récompense démotive. 

Un sacré piège1 ! Ainsi, en croyant motiver nos enfants, nous leur enseignons au contraire que la seule motivation à trouver à leur contribution est la récompense. 

A court terme, il y a fort à parier que la promesse d’une rémunération encourage nos enfants à accomplir les tâches demandées avec allégresse. Cependant, la question de la rémunération sera alors toujours présente. Si celle-ci disparait, la motivation disparaitra également… Or, quelle motivation aimerions-nous que nos enfants aient pour contribuer ? La rémunération qu’il vont toucher, ou plutôt le plaisir de contribuer ? Et si nous entretenions plutôt leur envie de satisfaire leurs besoins d’appartenance et d’importance en remplissant leur rôle dans la famille ?

D’après Alfie Kohn2, la coopération sans recherche de récompenses non seulement rend les tâches plus plaisantes, mais elle en améliore également le résultat. 

Cas particulier

Vous l’aurez compris : argent de poche et accomplissement des tâches se portent mieux quand ils sont décorrélés. Lorsque l’on choisit de donner de l’argent de poche à nos enfants, c’est que nous voulons les aider à développer leur sens de la gestion, nous désirons leur offrir un choix dans leurs achats. Ce ne devrait en aucune façon être une manière de prendre le pouvoir sur eux, par notre choix de le leur accorder ou retirer en fonction de leur comportement ! Ou alors on retombe dans une relation verticale dans laquelle nous leur enseignons que le plus fort gagne…

Est-ce à dire que nous ne pourrons pas aider nos enfants à gagner un peu d’argent lorsqu’ils en auront besoin ? 

Je crois qu’un cas particulier existe : c’est celui de la situation où tout le monde est gagnant-gagnant. Car il existe bien des tâches pour lesquelles nous sommes prêts à payer quelqu’un d’extérieur. Si tel est le cas, cette personne peut être notre enfant. Ainsi, je peux envisager de rémunérer mes enfants pour des tâches que je ne ferais pas moi-même. Dans certaines familles, cela peut être l’entretien du jardin, le lavage de la voiture, vider le caniveau, que sais-je encore ? Alors là oui, je ne cherche plus la participation à la famille, mais je donne l’opportunité du “petit job”.

Veiller aux relations familiales

Enfin, si la question de la motivation n’était pas suffisante, je terminerai en parlant des relations familiales. Car la question de la rémunération risque de soulever une autre difficulté : celle de la “justice”. Qui et que devrait-on rémunérer ? A quelle fréquence ? On peut facilement se retrouver face à un jeu de rivalités pour savoir qui va faire quoi, et pour combien…

Sans compter le ressentiment qui monte inconsciemment chez l’adulte qui, lui, n’est pas rémunéré, et trouvera rapidement usantes les réclamations que cette méthode aura incitées.

Si nous cherchons la paix de la famille, et l’élan à participer ensemble, abandonnons plutôt cette idée de rémunération, et cherchons un moyen pour que chacun trouve sa place. Organisons au besoin des réunions de répartition des tâches3, qui permettront de trouver le meilleur des fonctionnements ensemble, donnant au passage le modèle d’une vraie vie en communauté. 

Ce sera l’occasion de développer le soutien, l’esprit de groupe, le partage, l’empathie. 

A long terme, c’est quand même plus enrichissant, non ? 

Notes : 

1- Voir article Le piège des récompenses – Grandir Autrement N67 – nov/dec 2017

2- Punished by Rewards, Alfie Kohn, Mariner Books (1999)

3- Voir article Encourager les enfants à contribuer à la maison – Grandir Autrement N69 – mars/aril 2018

Avril 2018 – San Juan, Puerto Rico

Pour mieux répondre à l’intérêt qu’a suscité la conférence sur les luttes de pouvoir, nous décidons d’organiser une deuxième conférence dans la foulée.

Encore une fois, mon thème préféré. Celui qui chamboule.

Dans cette conférence, j’explique aux parents la différence entre le contrôle externe et la motivation interne.

Nous discutons les effets que peuvent avoir les punitions et les récompenses sur les enfants. Pour certains parents, c’est la première fois qu’ils prennent de la distance par rapport à ces méthodes. La première fois qu’ils s’interrogent sur leur effet à long terme.

Je ne suis pas surprise. Nous ne sommes pas nombreux à remettre en cause ce qui nous semble évident. Il faut un déclic, un jour, pour nous ouvrir les yeux. Ce déclic peut avoir plusieurs formes. Ce peut être une conférence, oui, ou bien un livre, un(e) ami(e), une discussion…

Quoi que ce soit, je suis ravie de jouer ce rôle pour certains.

Le matin même de cette conférence, j’ai croisé une maman qui est venue me voir pour me dire que j’avais ouvert pour elle un monde nouveau.

Et j’ai bien l’intention de continuer à faire exactement cela !

Avril 2018 – San Juan, Puerto Rico

Troisième session de mes ateliers auprès des profs de langue de l’alliance française, et toujours autant de joie à les animer !

Nous touchons cette fois à un sujet délicat : celui de la motivation.

Nous sommes au coeur même des principes de l’éducation positive : notre désir de développer la motivation intrinsèque plutôt que le contrôle externe….

C’est difficile à entendre, à appréhender, c’est sûr ! Cela va à l’encontre de tellement de principes qu’on a déjà implicitement intégrés…

Mais mon groupe me fait à présent confiance. Ils me suivent dans ma réflexion.

Nous parlons donc de récompenses, et de leurs effets.

Nous parlons de compliments, d’encouragement.
De la différence entre la remarque qui évalue et celle qui développe la confiance en soi.

Tous viennent de positions différentes, et les échanges sont particulièrement riches !

J’ai l’impression que eux et moi avons déjà parcouru un sacré chemin…

 

 

Avril 2018 – San Juan, Puerto Rico

Voilà un thème que j’adore !

Pour cette 3ème conférence à l’alliance française de Puerto Rico, j’ai choisi d’entrer dans le vif du sujet. Je sais que cette conférence chamboule toujours un peu ceux qui l’écoutent, parce que ma présentation bouscule certains principes qu’ils ne remettaient pas en cause.

C’est une des raisons pour lesquelles j’adore cette présentation.

Pour moi, la parentalité positive commence par une prise de conscience. Cette prise de conscience ne va pas sans un certain inconfort à un moment donné. C’est cependant cette inconscience qui permet de s’ouvrir à autre chose.

Dans cette conférence, nous creusons donc les raisons derrière l’usage des punitions et des récompenses, ainsi que les raisons de s’en éloigner.

Puis, nous envisageons des alternatives.

Lorsque la conférence se termine, et que certains s’approchent de moi pour me remercier, je vois que les choses ont déjà commencé à changer en eux !

J’ai déjà partagé avec vous auparavant l’opinion de Thomas Gordon sur la méthode traditionnelle de récompenses et punitions, telle qu’il l’a exposée dans Eduquer sans punir. Ce chapitre se focalise sur les récompenses, et creuse la question de leur efficacité ou plutôt de leur inefficacité. Gordon parle ici de récompenses en général, et de compliments en particulier.

– Moi qui ai justement un article sur les compliments en gestation depuis plusieurs mois, peut-être aurai-je enfin l’inspiration qu’il me faut pour le ressortir lorsque j’aurai terminé le résumé de ce chapitre ? –

Les récompenses, une banalité

Pour commencer, il est intéressant de noter à quel point l’utilisation de récompenses est répandu. Que ce soit en classe pour contrôler le comportement des plus jeunes, ou à la maison.

Dans la classe, tableau de récompenses, voire coffre au trésor sont là pour encourager les enfants à bien se comporter. Et j’en ai déjà observé le résultat néfaste chez mon fils de 6 ans

A la maison, il n’est pas rare que le dessert vienne récompenser les légumes avalés. Je sais ce que vous pensez en lisant cette dernière phrase. (« Mais je ne vais quand même pas le laisser manger le dessert alors qu’il n’a pas mangé les légumes ?! » ) Et cela vaudra la peine de revenir dessus, pour parler de la posture à adopter dans un tel cas, pour réussir à encourager notre enfant à manger lesdits légumes, sans pour autant passer par une négociation à la récompense type « Si tu manges bien tes légumes, tu pourras avoir un bon dessert. » Cela dépasserait cependant ce dont Thomas Gordon parle ici, et je vais essayer de rester centrée, si vous le voulez bien.

Pour que les récompenses soient efficaces – aspects techniques

Ici, Gordon entre dans les détails techniques, expliquant que l’éducation par la récompense doit suivre un mode opératoire particulier. 

Ainsi, il est important, lorsque l’on veut, par ce moyen, encourager un comportement, de réagir de manière immédiate lorsque ce comportement est adopté. 

De plus, il faudrait pouvoir garder une forte cohérence : récompenser systématiquement le comportement en question, et s’assurer qu’aucune récompense n’est obtenue lorsque le comportement est inadéquat. C’est ce que font les dresseurs d’animaux, et c’est à ce prix que l’éducation par récompense peut fonctionner. 

Dans la vie réelle, c’est bien plus difficile. Prenons l’exemple d’un enfant en classe, dont la maitresse veut récompenser le bon comportement.
Sera-t-elle toujours bien là pour le voir et réagir ? Ne va-t-il pas également recevoir la récompense du rire des copains lorsqu’il adopte certaines attitudes qui dérangent la maitresse ?
L’obtention de la récompense en fonction du comportement n’est donc pas constante et cohérente… et cela nuit à son efficacité !

Difficultés rencontrées

Comme, selon ce que nous venons de dire, la mise en place de ce système de manière systématique est quasi-impossible, les adultes qui y ont recours se retrouvent rapidement face à des difficultés… qui les amènent souvent à évoluer de la récompense à la punition !

Et lorsque ce n’est pas le cas, ils se heurteront alors au fait que pour que la récompense continue de séduire, il faudra qu’elle ait de plus en plus de valeur. Eh oui, sinon, l’effet s’affaiblit avec le temps. D’ailleurs, même quand la valeur de la récompense augmente en fait, l’effet s’affaiblit avec le temps.

On peut alors arriver à cette situation absurde dans laquelle l’absence de récompense est interprétée comme une punition. Et on ne s’en sort plus !

Quand le seul but de l’enfant est la récompense

Voilà le coeur de l’affaire. La récompense est un mode d’encouragement via évaluation externe plutôt que motivation interne. 

Or, comme le soulignait Celine Alvarez lors de sa conférence, comme nous l’avions également évoqué avec le piège des récompenses, le plaisir de l’acte pour l’acte disparait lorsque la motivation est purement externe.

Pire encore, non seulement l’enfant perd son enthousiasme et sa motivation, mais il risque d’avoir sans cesse besoin, pour avancer, d’une évaluation externe dont il s’est mis à dépendre.

En fait, l’enfant perd le plaisir de l’acte que l’on récompense, mais pas du jugement de l’autre, qui devient indispensable.

NOTE : Ici, comprenons bien que les compliments sont directement considérés comme des récompenses. 
(Pour ceux d’entre vous pour lesquels cette idée est nouvelle, je vous encourage, en attendant que j’en sorte un nouveau, à lire mes premiers articles à ce sujet, même s’ils datent un peu : d’autres manières d’encourager dans Parler pour que les enfants écoutent, écouter pour que les enfants parlent, et une illustration du fait que « bien », ce n’est pas assez bien dans Parents épanouis, enfant épanouis.)
Ce chapitre traite d’ailleurs également des compliments en tant que tels, et j’en reprendrai les grandes lignes dans un autre article, parce que cela vaut la peine de s’y attarder.

Un mot sur la compétition

Quand on creuse cette question de récompenses, de motivation externe, on dérive assez naturellement vers une vraie réflexion autour du système scolaire tel que nous le connaissons, et en particulier de l’usage des notes.

Car faire étudier l’enfant avec pour but central d’obtenir de « bonnes » notes, ou en tout cas, des notes qui seront qualifiées de bonnes lorsque nous les comparerons à la moyenne, c’est créer justement une motivation externe.

J’ai soulevé cette question hier au diner familial. Mon fils Oscar (15 ans) opine que la compétition permet de donner le meilleur de soi-même. C’est possible. Cependant, certains opinent, comme André Stern, que le meilleur engrais du cerveau, c’est l’enthousiasme. Or, si la motivation externe tue le plaisir de la tâche elle-même, alors comment cultiver l’enthousiasme de l’apprentissage ??
J’ai hâte, pour creuser cette question, de lire le nouvel ouvrage de Catherine Gueguen : Heureux d’apprendre à l’école, dont je ferai un commentaire sur le blog, évidemment(Si vous avez trop hâte de voir les commentaires des autres, en voici déjà le lien)

En tout cas, la position de Thomas Gordon sur ce point est très claire, puisqu’il choisit d’inclure dans ce chapitre la citation suivante :
« Nous détruisons la passion désintéressée d’apprendre qui est innée chez les enfants et se montre si forte quand ils sont petits, en les encourageant au travail avec des récompenses mesquines et méprisables, telles que médailles d’or, bons points, tableaux d’honneur, mentions diverses, listes de mérites, etc. Bref, pour avoir l’ignoble satisfaction de se sentir meilleur que les autres. » (Holt, 1968)

Je vous laisserai sur cette citation, pour la digérer, et me dire ce que vous en pensez en commentaire si le coeur vous en dit, parce que je pense qu’à elle-seule, elle mérite un débat !

Dans la classe de mon fils, en grande section de maternelle, la maîtresse a mis en place un système de récompenses. Ainsi, si le comportement est bon pendant la journée, l’enfant gagne une « glace » en papier sur son cône de la semaine, et si sa glace comporte bien 5 boules en fin de semaine, alors il gagne un droit exceptionnel. (Par exemple celui d’apporter un jouet à l’école, ce qui a été l’occasion pour nous de cette réflexion sur le message de confiance que j’ai déjà partagée avec vous).

Malheureusement, je sais que ce système de récompenses est un piège. Un piège qui donne des résultats à court terme, mais qui ne développe absolument pas la motivation interne de l’enfant, au contraire !!

Pourquoi utiliser les récompenses ?

D’un côté, je comprends cette maîtresse. Son objectif est d’avoir une classe relativement « tranquille » pour transmettre son apprentissage. Il n’est aisé, je m’en doute, de motiver le groupe entier à participer à cette ambiance de classe. Elle ne veut pas avoir à faire la police en posant des punitions. Elle choisit donc une « méthode douce » en mettant en place ces récompenses.

Cela lui demande d’ailleurs une certaine organisation. Il lui faut d’abord bien insister dès le début de l’année sur le fonctionnement. (Je peux vous dire que nous en avons entendu parler à la maison dès les premiers jours).

Ensuite, il lui faudra juger chaque jour du comportement de l’enfant sur la journée. Ce qui, d’ailleurs, me parait bien difficile… Comment résumer le comportement de toute une journée ? Il me semble à moi que dans une même journée, un enfant, comme tout autre être humain, va passer par des moment où il va se sentir bien et se comporter bien, et d’autres ou ce sera le contraire. Un « trop mauvais » comportement effacerait alors tous les autres bons moments de la journée ? Ou bien est-ce une moyenne ?? Je ne sais…

La motivation de l’enfant

En général, ça marche ! Les enfants ont effectivement tendance à faire plus attention à leur comportement, parce qu’ils veulent gagner la récompense. De nouveau, à court terme.

Parce que leur motivation est alors claire : si j’obtiens les 5 glaces, j’aurai le droit d’apporter mon jouet à l’école ! C’est vrai que c’est motivant…

Cependant, interrogeons-nous un peu sur cette motivation. Il est évident qu’il s’agit d’une motivation purement externe, et absolument pas interne.

Parfois, face aux difficultés que nous posent certains comportements inappropriés, nous cherchons la méthode qui marche pour faire changer ce comportement. Cependant, la parentalité positive encourage à réfléchir un peu plus, pour prendre conscience de l’impact de nos méthodes sur le plus long terme.

Ici, il est utile de suivre la suggestion de  Marshall Rosenberg. Ne pas se demander seulement quel est le comportement que l’on voudrait modifier, mais également quelle motivation nous voudrions que l’enfant ait pour changer de comportement…

Discussion avec Léon de sa motivation

Un matin, j’ai donc voulu vérifier cela avec mon fils. Je l’ai un peu interrogé. Je vous retranscrits approximativement notre conversation.

« Léon, explique-moi. Que faut-il faire pour gagner les glaces ?
– Il faut se comporter bien.
– Et qu’est-ce que ça veut dire bien se comporter ?
– Ben… il faut pas faire des choses mal.
– Comme quoi, par exemple ?
– Par exemple, si tu tapes un copain, tu peux pas gagner la glace.
– Ok. Et pourquoi les maitresses ne veulent pas que tu tapes un copain ?
– Parce que sinon je gagne pas la glace !! »

C’est limpide, non ??

Et que se passera-t-il quand mon enfant grandira ? Quand la glace et sa suite (de pouvoir apporter un jouet à l’école) n’aura plus l’attractivité qu’elle a aujourd’hui ? Mon fils aura-t-il bien eu le temps d’apprendre l’empathie qu’on ne lui enseigne pas pour l’instant ?

Le message derrière la récompense

Je sais que mon récit ici, et la réflexion qui est derrière, peut déranger.
Parce qu’il n’est pas facile de remettre en question des systèmes qu’on pensait être bons, et qui, de surcroit, fonctionnaient. Je le sais, je ne cesse de passer par les memes étapes depuis quelques années ! Mais cela ne m’arrête plus. Je suis contente de pousser la réflexion, et de constater qu’on peut réellement évoluer dans notre manière de penser.

Je vais donc vous relater également un autre échange avec mon fils, toujours autour de ce système.
C’était peu après notre échange de ce jour où il aurait voulu apporter son camion à l’école.

Léon me dit que s’il gagne ses 5 glaces, il pourra apporter son camion.
« Je ne sais pas Léon, je ne connais pas bien les règles de ta maitresse. Pour tout te dire, je m’y intéresse peu, parce que je n’aime pas ce système de glace.
– Mais maman ! C’est la seule manière pour que je puisse apprendre à bien me comporter ! »

Je marque un blanc. Que mon fils se sente persuadé que « l’acheter » est la seule manière possible pour qu’il apprenne m’attriste tellement.

« Eh bien justement non. Moi, j’ai plus confiance en toi que ça. J’ai confiance que tu es capable de bien te comporter, même s’il n’y a pas de glaces à gagner ! »

Bon sang… quand mettrons-nous la priorité sur le fait de développer les compétences à long terme de nos enfants ??

J’ai confiance… j’avance.

POUR ALLER PLUS LOIN

Si ce thème vous intéresse, vous aurez peut-etre envie de lire mon livret « Tout ce qu’il faut savoir sur les punitions et les récompenses pour s’en débarrasser. »

Les adeptes de la parentalité positive, dont je fais partie, sont persuadés que la méthode traditionnelle d’éducation ne fonctionne pas. La « méthode traditionnelle », cela veut dire le système de récompenses et punitions. Nous en avons déjà parlé ici, et cette idée n’est pas nouvelle pour vous.L’objectif de cet article est de vous transmettre le point de vue de Thomas Gordon sur la question. Et pour cela, je m’inspirerai du deuxième chapitre de Eduquer sans punir. Une lecture qui vous encouragera à réfléchir de nouveau à cette méthode traditionnelle, pour vous aider à vous faire votre propre opinion.

Sur quels principes repose cette méthode traditionnelle d’éducation ?

Tous les parents qui appliquent cette méthode traditionnelle n’ont pas forcément réfléchi aux principes qu’elle véhicule. (C’est bien toute l’idée de l’avancée sur ce chemin, d’ailleurs ! Prendre conscience de tout ce qui se joue de manière inconsciente chez nous, ne serait-ce que parce que c’est le modèle que nous avons reçu !)  Deux d’entre eux sont cependant fondamentaux pour croire à cette méthode.

L’obéissance

Bien sûr, ce que cherche le parent qui use de la récompense et de la punition, c’est l’obéissance de son enfant ! Le parent maintient dans ce cas une relation purement verticale avec son enfant : lui est au dessus, et l’enfant, en dessous, doit obéir.Il est difficile de penser autrement la relation adulte-enfant, puisqu’elle nous a été enseignée ainsi. De mon côté, je vous en ai déjà parlé, je ne cherche pas à avoir des enfants obéissants. Je préfère que mes enfants gardent un sens critique, qu’ils puissent décider d’obéir ou non en fonction d’une certaine fidélité à leurs valeurs. Ce qui ne m’empêche pas de leur demander de la coopération ! Mais j’essaye de faire en sorte que ce soit bien des demandes, et non  des exigences (merci M Rosenberg), même si j’admets volontiers que c’est parfois frustrant !!Ce principe d’obéissance est pourtant souvent pensé pour le bien de l’enfant. Car, après tout, c’est un modèle auquel il faudra bien qu’il se plie dans le monde extérieur ! La relation parent-enfant n’est pas la seule relation d’obéissance à laquelle nous sommes exposés dans notre vie. On peut encore évoquer la relation au professeur ou autre personnel de l’école (qui peut parfois être effrayante), l’obéissance à son supérieur dans l’entreprise, au dirigeant d’un pays, à son mari lorsqu’on est une femme…. Ah.. Certains de ces modèles évoluent quand même !J’ai donc confiance en l’évolution de la société, vers des relations plus respectueuses, pas seulement entre femme et époux, mais également entre adultes et enfants ! Mais je m’égare et dépasse ici les propos de Thomas Gordon. Revenons à nos moutons.

Le jugement

Dans la mesure où l’adulte va agir pour modifier le comportement de l’enfant, c’est qu’il considère que son jugement sur le comportement de l’enfant est le bon. Nous sommes toujours dans un modèle de relation verticale, dans laquelle l’adulte est considéré supérieur à l’enfant, et en particulier plus compétent, et meilleur juge.Quoi qu’il en soit, il faut donc que l’adulte, que l’on peut également qualifier ici de « contrôleur » juge le comportement de l’enfant afin de décider comment le corriger.On peut s’interroger -je prends de nouveau des licences- sur l’objectivité de ce jugement. Puisqu’un jugement sur l’autre dépend de notre propre jeu de valeurs. Est-on en droit de l’imposer à l’autre ? Ce qui est sûr, c’est qu’on touche de nouveau bien à la différence entre l’obéissance et la morale, la première correspondant au fait de faire ce que l’on nous demande, que cela soit bon ou non, la deuxième à faire ce qui est bon, que cela soit ce que l’on nous demande ou non…Gordon soulève en tout cas l’idée que ce jugement est fréquemment fait par rapport à nos propres intérêts. Il cite l’exemple parlant d’un professeur qui exclue un élève de la classe parce qu’il perturbe celle-ci. Et en effet, cela gène en particulier le professeur qui aimerait ne pas être interrompu.Cet exemple fait d’ailleurs écho chez moi à une anecdote vécue, lorsque j’ai commencé à appliquer chez moi les principes de ma formation de  discipline positive en classe. Lorsque nous cherchions avec ma fille et son camarade des méthodes pour faire en sorte que nos cours de français soient moins interrompus par leurs histoires, le camarade propose de donner une récompense à celui qui interrompra le moins. Ainsi, quand un professeur (en l’occurence moi) lui demande quelques chose, il ne s’y trompe pas : il considère que c’est dans le seul interêt du professeur qui est donc responsable de trouver une autre motivation pour ses élèves. Ma réponse l’a pris par surprise. Je lui ai en effet expliqué ma perspective. Que j’aimerais que sa raison pour ne pas interrompre ne soit pas une récompense, mais bien de participer à un cours plus agréable pour tous. Et c’est effectivement ce qui s’est finalement passé ! Comme quoi, cela vaut la peine d’avoir confiance

Est-ce plus facile ?

Avertissement : ce paragraphe est une réflexion toute personnelle, et non une retranscription de ce que dit Gordon.D’une certaine manière, je comprends bien que tout est plus facile lorsque l’enfant obéit ! Ou, du moins, que cela serait plus facile si l’enfant obéissait tout le temps. Parce qu’alors, il nous suffirait de lui indiquer ce qu’il a à faire, et nous n’aurions pas à nous battre pour que cela se fasse ! Etre parent est un travail épuisant, et nous aimerions bien que nos enfants nous le simplifient parfois… Finalement, notre jugement sur cette nécessité d’obéissance correspond bien à un jugement par rapport à nos propres intérêts. Bien vu.Seulement, j’y vois deux problèmes majeurs.
  1. De toute façon, nos enfants n’obéissent pas systématiquement. Jamais. Ce n’est donc pas plus facile. Et je crois même plus difficile de se raccrocher à ce modèle qui voudrait qu’ils obéissent. Car nous ne cessons alors de nous heurter à des situations ressenties comme des échecs, et pour nous, et pour eux.
  2. Au passage, nous ne développons absolument pas les qualités que nous aimerions voir plus tard chez nos enfants. Ni l’autonomie, ni la prise de décision, ni le sens critique, ni la confiance en eux… Si tout ceci ne vous apparait pas clairement, je vous encourage à passer un moment à concevoir votre plan de route parental !

Que faut-il pour que cette méthode fonctionne ?

Le pouvoir du contrôleur

La base de tout ce système, c’est le pouvoir du contrôleur. Dans ce chapitre, le pouvoir est au coeur du discours. En effet, pour que le contrôleur puisse mettre en place la carotte et le bâton, ces motivations externes à adopter un certain comportement, encore faut-il qu’il ait un pouvoir sur l’enfant.Et ce pouvoir découle du fait qu’il ait les moyens de satisfaire ou d’empêcher les besoin s de l’enfant.Nous sommes dans une logique de contrôle externe pur, ne laissant pas de place au contrôle interne. Et ce contrôle externe n’est rendu possible que par la position de l’adulte. C’est lui qui a effectivement à sa disposition les moyens physiques de satisfaire l’enfant, ou non.

L’impact sur la relation

Ainsi, l’interêt du contrôleur est de garder l’enfant dans une position qui permet à l’adulte de garder les rênes. (Tiens, nous filons la métaphore de la carotte et du bâton !) Ce qui aura pour résultat « une relation de dépendance et de crainte ». L’enfant attend en effet au quotidien le jugement et le bon vouloir de l’adulte…Je pense que l’on peut rapprocher ce commentaire de ce que dit Jane Nelsen de la punition. Dans La discipline positive en effet, Jane Nelsen présente ce qu’elle nomme les « 4 R de la punition » : Rancoeur, Revanche, Rébellion, Retrait.Dans tous les cas, on se retrouve dans une relation qui est loin de répondre à ce besoin de connexion que nous avons déjà évoqué. Fondamentale dans une relation harmonieuse, la connexion est ce qui nous permettra d’espérer la coopération de notre enfant.Les méthodes traditionnelles de récompenses et punitions sont donc de nouveau un frein à cette coopération

Grosse surprise quand l’enfant grandit…

Autre problème de ces méthodes : l’écart entre les moyens de l’adulte et ceux de l’enfant se résorbe au fur et à mesure que celui-ci grandit. Ainsi, l’adulte perd peu à peu son pouvoir sur les besoins de son enfant, et, par effet immédiat, il perd le contrôle !Et nous voilà avec des parents qui ne comprennent plus leur adolescent… Quand il était petit, il était si mignon… et maintenant, il n’écoute plus rien !!!Je reprendrai ici simplement les mots de Gordon : « Comme ils ne peuvent plus contrôler leur enfant, comme ils n’ont jamais appris à l’influencer, ils se sentent impuissants. »

Un mot sur les conséquences

Je noterai sobrement le fait que Gordon écarte ici également toute forme de conséquence, qu’il considère être souvent assimilable à une punition. J’ai besoin de réfléchir et formuler encore les arguments qu’il formule ici. Car je suis convaincue qu’il y a une vraie différence entre la punition et la conséquence.Mais je sais aussi que c’est une compétence qu’il est difficile de maîtriser. Nous avons d’ailleurs déjà soulevé la nécessité de chercher à avancer vers la recherche de solutions plutôt que vers les conséquences.Je crois qu’une grande part de la différence tient également à notre posture, notre communication, notre intention en fait. Et cette intention n’est pas toujours évidente à identifier. Je trouve ainsi régulièrement des exemples de situations identiques qui pourraient tout aussi bien être interprétées comme une punition, ou comme une conséquence, selon la manière dont la communication est menée.Je reviendrai donc sur ce thème.

Comment changer notre posture ?

Rome ne s’est pas faite en un jour, et nous aurons besoin d’abord de faire preuve de bienveillance envers nous-mêmes tandis que nous cherchons à avancer sur ce chemin de parentalité positive.Pour commencer cependant, je vous propose les étapes suivantes, au rythme de questions à vous poser à vous-mêmes.
Vous voulez, vous aussi, apprendre ces alternatives ?👉🏻 Inscrivez-vous à la formation « Sortir des punitions »

Pour prendre de la distance par rapport au jugement du contrôleur

  • Suis-je en train de juger l’autre ?
  • Quelqu’un d’autre que moi poserait-il le même regard ?
  • Puis-je trouver la raison positive qu’a la personne que je juge pour agir ainsi ?

Par rapport à notre schéma de pensée

  • Quelles sont, selon-vous, les raisons qui poussent les parents à rester dans ce schéma traditionnel ?
  • Quels en sont les avantages et les inconvénients  ?
Enfin, pour conclure, et malgré la longueur de cet article que je pensais au départ plus court, il me reste à vous indiquer que les chapitres suivants du livre reviendront en détail sur chacune de ces méthodes. Gordon y expliquera pourquoi, selon lui, les récompenses sont inefficaces, puis pourquoi les punitions sont inefficaces.N’oubliez pas, avant de partir, de laisser en commentaire vos réponses aux questions ci-dessus !

– Note : cet article « Le piège des récompenses » est d’abord paru dans Grandir Autrement, numéro 67 de novembre/décembre 2017 –

Lorsque l’on cherche à faire avancer un âne, on utilise la méthode de la carotte et du bâton. C’est une manière d’exercer un contrôle sur lui, de l’amener à faire ce que l’on désire. On ne se demande pas si c’est ce dont il a envie, on exerce simplement un contrôle extérieur.
Bien des méthodes éducatives reprennent ce principe, celui de la carotte et du bâton, remplacés face à nos enfants par des récompenses et des punitions.
Cela peut éventuellement fonctionner à court terme, mais il est intéressant de s’interroger également sur les effets à long terme d’une telle méthode.

Marshall Rosenberg, quand il parle de punition1, écrit que, d’après son expérience, ce qui convainc les parents de l’inutilité de cette méthode est de se poser les deux questions suivantes : “En quoi voudrais-je que mon enfant change de comportement ?” et “Quelle motivation voudrais-je qu’il ait pour faire ce que je lui demande ?”.
C’est en général la réponse à cette deuxième question qui encourage le parent à trouver une autre méthode.

On pourrait appliquer ces mêmes questions au cas de la récompense.
En effet, lorsque nous offrons une pièce à notre enfant pour vider le lave-vaisselle, désirons-nous vraiment qu’il vide le lave-vaisselle pour gagner cette pièce, ou voudrions-nous en fait qu’il vide le lave-vaisselle parce qu’il trouve normal de contribuer à la vie familiale ?

Le message derrière la récompense

En réalité, si nous parlons de récompense à l’enfant, c’est que nous pensons qu’il a besoin d’une motivation extérieure pour avoir envie d’agir. C’est évident. Seulement voilà : c’est évident pour lui aussi.

Donc, en lui faisant miroiter la future récompense, nous lui passons implicitement mais clairement le message suivant : “Je ne crois pas une minute que tu feras ce que je te demande si je ne te soudoie pas…” Voilà un message fort, qui ne contribuera probablement pas à son estime de lui-même…

Un enfant grandit et progresse quand on croit en lui, notre récompense est donc en fait contre-productive…Nous ne cherchons en aucun cas à développer chez l’enfant une motivation intrinsèque, mais bien à rétribuer le résultat de ce que nous lui imposons. Que se passera-t-il lorsque la récompense aura perdu son attrait ? Faudra-t-il la faire grandir ? Probablement… Et si nous ne sommes plus là pour la donner, notre enfant aura-t-il envie de continuer ? Certainement pas ! D’abord parce qu’il “sait”, grâce à nous, qu’il n’en est pas capable, ensuite parce qu’il n’y verrait plus d’interêt : qu’y gagnerait-il ?

Quand la récompense prend le pas sur l’envie

Plus nous offrons de motivation extérieure à l’enfant, plus sa motivation intérieure baisse. Ou, pour reprendre les mots de Céline Alvarez2 : “La motivation exogène va venir court-circuiter la motivation endogène.

C’est l’effet de sur-justication (overjustification) mis en évidence par Mark Lepper, psychologue à Stanford. L’une de ses premières études3 consistait en effet à demander à deux groupes d’enfants de maternelle de dessiner. A l’un des groupes, il était promis des médailles pour leurs dessins, à l’autre non. Lorsque l’équipe revient observer les enfants, quelques semaines plus tard, les enfants du groupe qui s’était vu offrir les médailles dessinent beaucoup moins : ils n’en voient plus l’intérêt lorsqu’ils ne sont plus récompensés… De plus, la qualité de leurs dessins décroît également. En substance, le raisonnement inconscient de l’enfant (ou de l’adulte) est : “Si l’on me récompense pour cet acte, c’est que je n’ai pas de raison d’aimer le faire si je ne suis pas récompensé, donc je ne l’aime pas.”

L’enfant perd alors son plaisir. On pourrait penser, dans ces conditions, que le système de récompense marche mieux pour une activité qui ne plait initialement pas à l’enfant. Nul risque alors de déplacer sa motivation, inexistante dès le départ. Et pourtant… Les expériences menées en ce sens prouvent que cela n’est pas non plus une solution. En réalité, l’absence de motivation externe encourage toujours à mieux rechercher une motivation interne, même lorsque celle-ci n’est pas évidente de premier abord.

Si nous comprenons ce principe, nous comprenons que nous ne devons pas payer nos enfants pour leurs notes (que ce soit en argent ou en cadeau) ! Non seulement parce que nous ne pourrons vraisemblablement pas tenir la longueur – car la récompense doit augmenter pour garder son attrait ; mais surtout parce que nous leur enseignerions que la seule raison pour eux d’obtenir de bonnes notes est de gagner la récompense. L’apprentissage en lui-même perd son sens, et surtout son interêt…

Quelles alternatives ?

Encore une fois, la clef réside dans la motivation intrinsèque. C’est celle-ci qu’il s’agit d’encourager. Et pour cela, essayons de mieux comprendre ce qui peut motiver nos enfants.

Selon Adler, psychologue autrichien dont les principes sont à la base de la discipline positive4, Le besoin essentiel de tout être humain est d’appartenir et d’avoir de l’importance.

Reprenons alors le cas du lave-vaisselle. Il est important, tout d’abord, que l’enfant se sente appartenir : il fait partie de la famille, son point de vue est respecté. L’idéal est que la répartition des contributions de chacun à la vie de famille (et non des tâches, notez bien le changement de vocabulaire) soit faite au préalable, ensemble. Alors, chaque fois que l’enfant contribuera, par exemple en vidant le lave-vaisselle, il saura qu’il remplit une partie de son rôle dans la famille, famille dans laquelle il a sa place, et son importance.

Parlons à présent des notes en classe. Au départ, l’enfant a envie d’apprendre. Celle-ci se perd lorsque le travail scolaire ne lui appartient plus : il n’étudie pas pour lui, mais pour ses parents, ou pour ses professeurs. Rendons-lui sa responsabilité, faisons-lui confiance. Offrons à nos enfants le temps de l’apprentissage en l’encourageant de manière positive, en l’accompagnant jusqu’à la réussite, pour lui. En nous focalisant sur elle, et pas sur les échecs. Puis, lorsqu’il réussit, résistons à l’envie de lui dire que nous sommes fiers de lui – après tout, ce n’est pas notre réussite ! – , demandons-lui plutôt s’il est fier de lui-même, et réjouissons-nous avec lui. Il se sentira capable, et écouté, donc important. Il s’appropriera alors son succès,  et aura probablement à coeur de continuer sur sa lancée. Nous l’aurons alors aidé à développer sa motivation intrinsèque, bien plus que s’il avait réussi pour nous complaire…

Le problème vient probablement du fait que nos enfants n’ont pas l’habitude qu’on leur fasse confiance.

Lors d’une réflexion, dans un cours que je ne donne qu’à 2 élèves, sur la méthode à mettre en place pour éviter qu’ils n’interrompent le cours pour dériver sur du hors-sujet, l’un d’eux me propose de faire comme sa maîtresse principale : noter sur un papier la source de chaque interruption, et donner à la fin du cours un bonbon à celui qui s’est le mieux comporté… Je lui explique : “En fait, je voudrais que tu n’interrompes pas le cours, pas parce que tu veux gagner un bonbon, mais bien parce que tu es convaincu que c’est mieux pour nous tous, toi y compris, qu’il y ait moins d’interruptions…” Surprise chez le garçon. Il est rare qu’on en appelle à son sens d’appartenance au groupe, à un fonctionnement plus horizontal que vertical. Cela donne donc lieu à une petite conversation, suite à laquelle nous décidons que chacun aura un papier à son côté pour noter les thèmes hors-sujet qui lui viennent, et que le cours durera cinq minutes de moins, pour que chacun puisse partager ce qu’il a noté. Depuis, les cours sont bien plus faciles, et le garçon y voit bien son propre interêt !

Changement de méthode

Que faire si l’on était adepte des récompenses jusqu’ici ? Ne pas s’inquiéter, il n’est jamais trop tard. Etre honnête avec ses enfants. Leur expliquer que l’on s’est rendu compte qu’on aimerait les voir développer d’autres raisons de faire ce qu’ils font, que l’on peut d’ailleurs y réfléchir avec eux s’ils le veulent, et que l’on a toute confiance qu’ils en seront capables !

De mon côté, j’ai toute confiance que vous en serez capables…

POUR ALLER PLUS LOIN

Si ce thème vous intéresse, vous aurez peut-etre envie de lire mon livret « Tout ce qu’il faut savoir sur les punitions et les récompenses pour s’en débarrasser. »

Nous aspirons à créer un foyer dans lequel le mot-clef serait la coopération.
Il semble pourtant que nos enfants ne soient pas toujours dans cette dynamique !
Le sommes-nous nous-mêmes toujours ? L’exemple donné à nos enfants est fondamental, et, si nous cherchons à inclure cette idée de coopération dans notre plan de route parental, il est important de se demander d’abord si nos comportements sont bien en accord.

Car, nous en avons parlé précédemment, nous avons notre responsabilité dans le comportement de nos enfants !

Cet article reprend donc un chapitre du livre Parents respectueux, enfants respectueux, présentant ce qui, dans notre maison, peut alimenter les conflits et nuire à la coopération.

Le manque de temps pour entrer en lien avec les autres

La société va de plus en plus vite, et notre rythme familial s’en ressent également.
Ce n’est pas la première fois que je me le dis : la parentalité positive est également une question de rythme. Je n’affirmerai pas que lenteur rime toujours avec bonheur, mais calmer un peu le jeu pour passer du temps ensemble, en famille, est clairement une pratique qui aidera à développer la coopération au sein de celle-ci.

Car, pour une relation harmonieuse, nous avons besoin d’être en lien. Souvent, nous passons du temps avec nos enfants, mais du temps que nous pourrions qualifier de “gestion” : préparation pour l’école, les bains, les repas. Prenons-nous le temps également de nous asseoir, de jouer, de discuter ?

Sans même parler des moments particuliers, qui sont la meilleure manière de nourrir le besoin d’attention d’un enfant, des moments de partage en famille seront déjà un sacré bon début !!
(Note : au moment où j’écris cet article, nous sommes fin novembre, et ces phrases me font penser aux idées lancées par Gwen de Petit bout par petit bout pour construire en calendrier de l’avent en mode “reconnexion” !)

Les auteurs évoquent ici également les réunions familiales, qui sont toujours des moments privilégiés d’échange et de coopération. Chez nous en effet, cela marche vraiment bien (et il faut vraiment que je prenne le temps de faire un article à ce sujet…). C’est non seulement une occasion de discuter des problèmes qui se posent pour y trouver des solutions qui conviennent à tous, mais également de prévoir d’autres moments partagés.
C’est d’ailleurs suite à une réunion familiale que nous avons enfin planifié, pour le surlendemain une sortie au restaurant à 4 avec nos plus grands, qu’ils nous réclamaient pourtant depuis un moment déjà !

Et à l’adolescence ?

Cette notion de manque de temps pour créer le lien fait également écho chez moi à une conférence de Catherine Dumontheil-Kremer (auteur de Poser des limites à son enfant) écoutée il y a peu, dans laquelle elle parlait spécifiquement de l’adolescence.

Tout comme moi, elle ne pense pas forcément nécessaire la “crise d’ado” tant crainte par les parents, la reliant plutôt à un mode d’éducation. Dans le contexte de son éducation bienveillante, tout comme chez nous avec notre grand de 15 ans, elle fait bien sûr face à des conflits, comme avec les plus jeunes, mais pas à des crises !

Elle soulignait en revanche, et j’ai trouvé cela très juste, que la difficulté de cette période de l’adolescence résidait probablement dans l’entretien du lien, justement. En effet, si le jeune enfant nous sollicite beaucoup, l’ado ne le fait plus, et nous avons de ce fait moins d’opportunités de nourrir le lien ! Elle conseille donc fortement d’accepter de faire le taxi, pour le seul bénéfice de passer du temps en tête à tête avec son ado. Et je confirme que ces trajets sont toujours l’occasion de bonnes discussions !
(Chez nous, une chose persiste également : les jeux de société ! Qui fonctionnent mieux encore que ces trajets !)

Etiquettes, comparaisons, et critiques

Nous avons déjà évoqué le piège des étiquettes, une des premières notions que j’ai découvertes lorsque j’ai commencé à cheminer, en lisant Parler pour que les enfants écoutent, écouter pour que les enfants parlent, de Faber et Mazlish.

L’étiquette posée sur l’autre (“Il est paresseux !”, “Elle est têtue”) ne peut décrire la nature changeante de l’enfant !
Les étiquettes présentent également un risque majeur : “En plus d’être inexactes et blessantes, ces étiquettes peuvent influencer ceux qui les reçoivent à un point tel qu’ils finissent par y correspondre.”
Il serait plus juste de s’attacher à des observations précises, sans étiquette ni jugement, qui laisseraient la place à l’enfant d’évoluer, de corriger, de progresser…

Pour ce qui est des comparaisons, on peut dire qu’elles vont complètement à l’encontre de la coopération puisqu’elles nourrissent plutôt un sentiment de rivalité, de jalousie.
(Pour savoir comment éviter cette rivalité, n’hésitez pas à télécharger gratuitement mon bonus sur les habitudes à modifier pour atténuer les disputes dans la fratrie, en fin d’article)

Ainsi, lorsque nous voulons encourager un enfant à changer de comportement, nous aurons toujours plus de chances d’obtenir sa coopération en l’accompagnant, en l’aidant à réfléchir à des solutions, plutôt qu’en basculant dans les étiquettes et les critiques.

Les récompenses et les punitions

Les récompenses et les punitions sont indispensables “lorsque les parents veulent amener les enfants à faire quelque chose contre leur gré”.
La méthode de la carotte et du bâton : un contrôle purement extérieur, là où nous voudrions plutôt développer la motivation intrinsèque de l’enfant.

En fait, user de punitions et de récompenses signifie rester dans un schéma (par ailleurs classique) de relation purement verticale entre l’adulte et l’enfant. Nous exerçons alors un pouvoir sur eux, pas avec eux. (Et si cette notion de pouvoir positionnel vous intéresse, je vous encourage à lire cet article spécifique sur le thème du pouvoir).

Lorsque nous commençons à nous interroger, non seulement sur ce que nous voudrions que notre enfant fasse, mais également sur les raisons que nous voudrions qu’il ait pour faire cela (la peur d’être puni, ou l’envie de contribuer ?), nous nous éloignons plus facilement de cette méthode…
Car il est certain qui ni la punition (qui créera plutôt un désir de vengeance), ni la récompense (qui entrainera une accoutumance, et du marchandage) ne l’amèneront à la coopération spontanée !

Chez nous, non seulement ces méthodes n’existent plus, mais nous saisissons régulièrement l’opportunité d’en discuter lorsque nous en sommes témoins à l’extérieur.
C’est probablement la meilleure méthode pour amener nos enfants à appréhender la bienveillance dans la maison, et son bénéfice.

Nos habitudes de pensée et de communication

Malgré toutes nos bonnes intentions, malgré tout ce que nous avons déjà appris en avançant sur le chemin de la parentalité positive, il n’est pas rare que nos habitudes de pensées et de communication ressurgissent, et que celles-ci constituent un frein à notre relation.

Ici, les auteurs parlent particulièrement des mots “mais”, et “devoir”, qui ont, selon elles, une grande influence sur la réaction de l’enfant.
Lorsque nous validons le sentiment de l’enfant, et que nous enchainons avec un “mais”, c’est comme si nous annulions ce que nous venons de dire…
Lorsque nous indiquons à l’enfant qu’il “doit”, ou “devrait”, nous lui communiquons que nous savons mieux que lui ce qui lui convient.”

A la relecture de ce chapitre, je me promets d’y faire plus attention. Je ne crois pas utiliser le verbe “devoir”, ai-je raison ? Je sais en revanche que ce “mais” fait encore régulièrement son apparition, même s’il est moins fréquent qu’avant !

Ce ne sont cependant pas les seuls pièges, apprendre ce nouveau mode de communication, c’est apprendre une nouvelle langue, et je me rends compte régulièrement comme certaines habitudes peuvent être tenaces ! Cela nécessitera, en fait, un article à part entière !

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