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Tous les lundis soirs, le cercle des parents heureux se réunit.

Et, à chaque fois, ça donne lieu à des réflexions, des prises de conscience, des ré-alignements.

C’est tellement précieux pour moi que j’ai décidé de partager avec vous, chaque mardi, ma pépite du cercle !

Aujourd’hui, ma pépite porte sur la prise de recul du parent, qui cherche à ajuster sa posture de « fermeté bienveillante »…

Est-ce que ça vous parle ?

(et pour en savoir plus sur le cercle, cliquez sur le lien plus haut !)

La joie comme intention… ou comment l’ambiance familiale peut changer par un simple changement de priorité !

Il y a quelques semaines, je vous parlais de mon envie de mettre la joie en priorité dans ma famille.

Retour sur cette expérience, qui s’avère particulièrement efficace !

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Cependant, si vous préférez lire, en voici la retranscription.

Ma réflexion sur la joie

Ici Coralie, du blog 6 doigts de la main, pour avancer ensemble sur le chemin de la parentalité positive.

Lors de mon dernier podcast, je vous parlais de la joie. Et je partageais avec vous le fait que j’avais envie de la mettre plus dans mes priorités au quotidien dans nos relations familiales.

Je m’étais en effet fait la réflexion qu’en avançant sur le chemin de la parentalité positive, j’avais réussi à apprendre comment être beaucoup moins en conflit avec mes enfants, j’avais réussi à leur apprendre également à être moins en conflit entre eux, et que l’ambiance à la maison en avait été changée. Et que malgré tout ça, j’avais envie d’aller plus loin, pour non seulement avoir des relations plus calmes, mais également plus joyeuses.

Et je vous avais promis de faire un retour là-dessus, et de vous dire comment ça s’était passé.
Alors voilà, c’est mon objectif aujourd’hui : quel a été l’impact de cette réflexion ? Ai-je réussi à fixer la joie comme priorité ?

Tout a changé !

En fait, c’est vraiment intéressant de voir à quel point un simple changement d’état d’esprit peut changer les choses. Je ne vais pas vous dire que depuis que j’ai décidé de me focaliser sur la joie, tout a changé.
Je ne vais pas vous dire que, du jour au lendemain, la joie a été omniprésente dans mon foyer. Non, tout n’a pas changé, ceci d’autant moins que je n’ai pas réussi à garder cette joie en tête tous les jours.

Cependant, les jours où elle était effectivement présente dans mon esprit, la dynamique a été différente. Alors, j’y ai réfléchi et j’ai cherché à l’analyser un peu. Comprendre ce que ça avait vraiment changé.

Déjà, noter très clairement la responsabilité qu’on a, nous, en tant que parents, sur l’ambiance familiale.
Bien sûr, les enfants en ont une également ; bien sûr, leur comportement a une influence ; mais notre façon de réagir à ce comportement peut également tout changer. J’en étais déjà persuadée, cependant, je vois que ça peut aller encore un cran plus loin avec cette idée de joie.
Parce que c’est, comme je l’ai dit au début, certains jours mon seul état d’esprit qui décide de se focaliser sur la joie qui fait que mon attitude est différente, et que l’ambiance est différente.
Parce que, oui, j’ai vu des ambiances différentes les jours où j’étais vraiment focalisée dessus.

Comment ça s’est traduit concrètement ?

D’abord,

le premier point,

il est très clair, c’est que j’ai choisi de me remplir de la joie que j’observais. C’est à dire que, au lieu de considérer que lorsque mes plus jeunes enfants exprimaient leur joie, c’était.. on va dire normal, et me comporter moi « comme si de rien n’était », j’ai eu une démarche consciente de me remplir de leur joie, de rire avec eux, d’essayer de comprendre ce qui les enthousiasmait et de m’enthousiasmer avec eux.

Et ça, déjà, c’est fort, parce que ça m’a permis d’entretenir ma propre décision.

C’est à dire que, d’aborder les choses avec joie, et de trouver encore plus de joie en la puisant chez eux. Finalement, c’était eux qui remplissaient mon réservoir.

Ce premier point-là, je pense que tous les parents de jeunes enfants peuvent le vivre.

C’est moins évident chez les enfants plus grands, qui n’ont pas la même manière d’exprimer leur joie, cependant c’est quelque chose à chercher également, se réjouir de ce qu’ils partagent, au lieu de facilement considérer que ça a peu d’intérêt.

Le deuxième point

est plus personnel, et j’imagine qu’il se déclinera différemment, selon les parents et le caractère de chacun. Parce que nous sommes tous des adultes différents, face à des enfants différents. Mais surtout des adultes différents. Et chez moi, il y a un grand besoin de contrôle. C’est d’ailleurs un thème que nous avons déjà abordé, lorsque nous avons parlé de comment notre personnalité influence celle de nos enfants, et que nous avions fait l’analyse de la carte dominante.

Alors, pour choisir la joie au dessus de ce besoin de contrôle, ça m’a demandé du lâcher-prise.
Le lâcher-prise, c’est sûrement plus facile pour certains parents que pour d’autres ! Et, dans la théorie, je sais que le lâcher-prise est important, je l’ai déjà mis en place à de multiples reprise, et j’y repense régulièrement. Mais cette fois, au lieu de choisir le lâcher-prise, j’ai choisi la joie, et le lâcher-prise est venu naturellement.

Etrangement, ça a été, du coup, beaucoup plus facile. Parce que, du coup, ce n’était plus un choix « négatif », c’est à dire un choix de ne pas voir quelque chose, de ne pas prêter attention à un comportement qui m’aurait déplu, de ne pas me battre pour, comme lorsqu’on choisit ses batailles, ce qui est très important ; ca a été au contraire un choix positif.

Je choisis la joie.

Et évidemment, naturellement, ça veut dire que, lorsque mes enfants se sont levés de table pour montrer le dernier enchaînement de danse, avec la chanson qui va avec, qu’ils ont apprise pendant leur cours de sport, je n’ai pas eu besoin de m’imposer de ne pas réagir au lever de table pour ne pas me battre, j’ai savouré le partage de la chanson, le rire des autres, et effectivement, le fait de se lever de table à ce moment-là n’avait aucune importance !

Ca a été un lâcher-prise naturel. Ca ne veut pas dire que les règles ne doivent pas exister, ça ne veut pas dire qu’on ne va pas revenir dessus, mais ça veut dire que l’on choisit ses priorités. Je peux vous dire que chez nous, les diners où je suis arrivée avec une posture d joie ont été réellement différents !

Enfin,

le troisième point,

c’est que j’ai cherché à mon tour à créer de la joie. Et ça, oui, ça me demande encore un effort, parce que ce n’est pas mon caractère naturel forcément, mais il y a eu plusieurs moments où j’ai plus facilement basculé dans une parentalité que l’on qualifie de ludique, pour ceux qui connaissent, dans laquelle on prône le jeu avec l’enfant, non seulement pour se défaire de situations de conflit, ce que je faisais déjà, mais également en dehors de tout contexte, simplement comme moyen de connexion.

Alors, le jeu comme moyen de connexion, c’est quelque chose que, chez nous, on utilise beaucoup, de façon tranquille, encore une fois. C’est à dire que nous faisons beaucoup de jeux de société. Mais, cette fois, j’ai mis en place également du jeu plus vivant. Des jeux de chatouilles, des jeux de semi-bagarre, des moments où l’on danse, des choses qui ne me viennent pas forcément naturellement, mais qui permettent également de changer l’ambiance.

Et c’est drôle de voir à quel point c’est facilement suivi ! On commence avec un enfant, et puis ils s’y mettent tous. Et alors moi qui ai des enfants d’âges différents, puisque l’aîné a 15 ans, et le dernier 4, je peux vous dire que dans ces moments-là, les écarts d’âge s’effacent ! C’est assez magique.

Quelle est la leçon à retenir de tout ça ?

C’est le fait qu’on peut effectivement avoir une influence sur la façon dont les choses se passent par la simple posture dans laquelle on se met.

De nouveau, ce n’est pas une baguette magique, parce qu’il y a des jours où je suis plus stressée que d’autres, où je suis plus fatiguée que d’autres, et où la joie me viendra moins naturellement, mais le fait de l’avoir à l’esprit peut réellement changer les choses.

Et dans cette démarche, une astuce toute simple :

Avant de rentrer chez moi, j’y réfléchis. Je pose mon intention, dans les 2 minutes qui précèdent le moment ù je passe la porte. Je ne cherche pas à enchainer les choses, à être encore sur mon téléphone,etc. Non, pendant ces 2 minutes, je respire,  je souris, et je pose mon intention de joie. La suite en découle naturellement. Même si j’ai encore parfois besoin de m’y reconnecter.

Je ne peux donc que vous conseiller de faire la même chose. De réfléchir à la priorité pour vous, et, si c’est la joie, comme ça l’était pour moi ces dernières semaines, et, j’espère les prochaines semaines également, connectez-vous à cette intention avant de rentrer chez vous, et essayez de la garder présente. Et voyez la différence.

Si vous pensez que dans cette démarche, ce podcast peut aider d’autres parents, n’hésitez pas à le partager.
Et n’hésitez pas à me laisser un commentaire pour me dire comment la joie a pu être mise en place chez vous.

A bientôt !

Note : cette notion d’intention m’a paru tellement efficace que c’est devenu la première astuce de mes « 39 astuces d’éducation positive« . A vous de découvrir les 38 autres !

Ce titre n’est pas de moi, mais d’Isabelle Filliozat, dans Il n’y a pas de parent parfait.
Et elle enchaine en écrivant : « En fait, elles seraient de meilleures mères si elles ne cherchaient tant à être bonnes. »
Ah, la pression que nous nous mettons pour être des parents parfaits !

Seulement voilà, il semble que nous ne le répéterons jamais assez : la perfection n’existe pas.

Un jour, une prof de yoga, nous encourageant à nous détacher de la recherche de la perfection, nous faisait remarquer que nous ne cherchions la perfection que chez les humains, pas dans la nature.
Voyant un arbre qui était tout penché, elle notait que cet arbre, loin d’être parfait, était unique, et intéressant.
En ce sens, nous sommes tous uniques et intéressants !

Alors, qu’advient-il à la mère qui cherche à être parfaite ?

Toujours d’après Isabelle Filliozat : « La peur de passer pour une mauvaise mère, un mauvais père, mène à nombre de sacrifices qui ne font qu’engendrer une rancoeur pus ou moins inconsciente envers les enfants. »

En effet, notre image de ce que nous voulons être est assez claire. Dans notre esprit, nous sommes clames et patients, et nos enfants sont heureux d’être avec nous. Nous nous imaginons… une activité tranquille, avec un verre d’orangeade, puis un rangement de l’activité dans l’allégresse ! Seulement, dans la vraie vie, ça ne se passe pas comme ça.

Entre cette image idyllique de nous-mêmes en tant que parents, et ce que nous arrivons effectivement à faire, la différence est telle qu’il n’existe que deux possibilités :

Donc, si nous cherchons trop la perfection, nous n’aurons d’autre choix que le second, et penser que nos enfants nous empêchent de l’atteindre, cette perfection. Ce qui signifie que, consciemment ou non, nous développerons une rancoeur à leur égard !

Notre expression de cette rancoeur risque alors de passer par la culpabilisation de l’enfant : « Je t’avais bien dit que… Tu vois bien… », culpabilisation qui a pour but inavoué d’éviter de nous culpabiliser nous-mêmes.

Finalement, la mère qui ne peut s’ouvrir à l’imperfection peut tomber dans le piège de justifier ces écarts de conduite en les qualifiant d’éducatifs, afin d’éviter de faire face à ses propres failles.

Avouer notre incompétence

Si l’on veut progresser, nous en avions déjà parlé la première fois que nous avions évoqué la notion de culpabilité, il faut d’abord être conscient de ce que l’on ne sait pas.

Ainsi, avouer notre incompétence est le premier pas. Celui qui peut nous permettre de faire les autres.

C’est lorsque nous accepterons notre imperfection que nous pourrons nous mettre en position d’apprentissage. Que nous pourrons développer des compétences parentales autres que celles que nous avons héritées.

Après tout, pourquoi tant de mères se préparent-elles à l’accouchement, et non à l’éducation ?

Etre parent est difficile. Ce n’est pas honteux de l’admettre, de se faire aider.

Ecouter notre fatigue, qui nous empêche physiquement de faire au mieux.

Prendre soin de nos besoins, pour mieux prendre soin de nos enfants.

Notre société n’encourage pas aux aveux de faiblesse, aux échanges. Si vous le pouvez, le mieux serait de vous trouver un compagnon d’empathie, un avec lequel vous pouvez partager vos difficultés, réfléchir à des solutions, à des méthodes éducatives plus conscientes. En regardant vers le futur, sans s’appesantir sur les ratés, sans culpabilité.

Se montrer plus tolérant envers soi-même ?

Le coeur de la difficulté est là : la culpabilité ! 

Nous culpabilisons lorsque nous dérapons. Beaucoup. Et cela ne nous aide pas, au contraire.
Faudrait-il donc être plus tolérants envers nos écarts de conduite ?

Isabelle Filliozat écrit : « Je préfère militer pour remplacer la tolérance par un vrai respect de soi. C’est-à-dire, sans tolérance aucune, regarder ses comportements excessifs comme tels, mais sans jugement sur sa personne. »
Sommes-nous capables de cela ? Sans jugement.

La CNV nous enseigne que nous avons tous des raisons d’agir de telle ou telle manière. Ce que nous ressentons est un indice d’un besoin. Ce que nous acceptons également.

Et si nous sortions du jugement pour essayer de mieux nous écouter. Nous observer et chercher à avancer, en pleine conscience de nos choix, sans ni tolérer ou excuser nos comportements excessifs, mais sans rester bloqués par notre sentiment de culpabilité pour autant. C’est à ce prix que nous parviendrons peut-être à identifier les raisons de nos comportements, et que nous pourrons alors nous en libérer pour mieux choisir nos comportements futurs.

Et vous, tombez-vous facilement dans la culpabilité ?

Il y a peu, je vous partageais une occasion où j’ai réussi à garder la tête froide face à mon fils de 6 ans.

Mais, bien sûr, comme je ne suis pas un super-héros, il y a aussi tous les moments où je n’arrive pas à garder la tête froide ! Et, comme chez vous, parfois ça finit en crise, et parfois non.

Et c’est là que je vois le bénéfice de notre mode éducatif : à force d’expliquer l’importance du temps de pause, de parler de ce que je ressens, de chercher à développer un certain respect dans la conversation, je constate que mes enfants sont à leur tour capables de le faire.

Ainsi, je voulais vous raconter cet épisode, qui date un peu, mais que j’avais noté dans un coin.

Il s’agit cette fois d’un échange avec mon grand Oscar, de 15 ans.

Puisque nous vivons à l’étranger, cela fait quelques années déjà que je fais le français avec le CNED avec mes 2 grands (et depuis cette année, avec le 3ème, heureusement qu’Anatole est trop petit, je ne m’en sortirais plus !!). Oscar est à présent en 1ère, et travaille de manière quasi-autonome depuis l’année dernière, mais nous continuons à avoir une session ensemble chaque semaine.

Cela lui permet d’avoir un rythme stable, une session dédiée, et puis je l’aide pour la planification, l’avancement, les corrections orthographiques… Autant je ne regarde absolument pas ce qu’il fait à l’école, autant je sais que travailler complètement seul, même s’il en comprend l’intérêt théorique, est sacrément difficile à cet âge. Donc je l’encadre. Et en même temps, je ne peux l’obliger à travailler vraiment ! Il faut bien que ça vienne de lui… et c’est pourquoi ça dégénère parfois en conflits.

L’année dernière, nous en étions arrivés à un point difficile, et nous nous étions assis avec lui, ayant préparé notre discours de sorte à le présenter comme il le fallait. Nous avions discuté de nos observations :
d’un côté, il était assez mûr pour comprendre qu’il lui était nécessaire de travailler son français, d’un autre côté, il avait beaucoup de difficultés pour s’y mettre sérieusement.
nous ne pouvions certainement pas le forcer à bien travailler, mais notre rôle de parent était quand même de l’aider à passer au dessus de ses difficultés et rester en ligne avec ce qu’il devrait faire.
Nous lui avions donc demandé de décider lui-même d’un rythme de travail, et des conséquences que nous devrions l’aider à appliquer s’il ne le suivait pas. Cela avait plutôt bien marché, mais plusieurs discussions avaient été nécessaires, évidemment…

Donc, à force de discussions, de rappels, de remises en cause, je suis devenue sensible sur ce sujet.

Cette année, en août, lorsque nous avons repris nos sessions, j’étais déjà sur la défensive avant de commencer.

La première session s’est moyennement déroulée. Je lui ai partagé le fait que je ne pourrais pas passer l’année à le tirer, que c’était à lui d’être acteur. Il était en théorie d’accord, mais rien que le fait de devoir encore avoir cette discussion m’épuise !

Et nous arrivons à la 2ème session, celle que je voulais raconter dans cet article !

Nous sommes donc mardi après-midi, et c’est le moment de la séance de français d’oscar.
Je suis attablée dans le café où il est prévu que nous nous retrouvions, et lui n’y est pas.
Il arrive enfin, en retard, sans un mot à ce sujet.

Je demande :
« Que s’est-il passé ?
– Comment ça ? Rien…
– Ben.. tu es en retard, là. Tu avais oublié ?
– ah ! Oui.
-…. Que pourrais-tu faire pour ne pas oublier ?
– Je sais pas !  »

J’essaye de respirer. Cette désinvolture me pèse. Je décide de lâcher-prise pour l’instant, très concentrée sur le fait de ne pas gâcher la séance. Il s’installe.
« Ok. Où est ton livre ?
– Je devais apporter quelque chose ? »

Alors là, ça y est, je ne peux plus… et je l’exprime !
« Je ne peux pas faire ça chaque semaine. Je te l’ai déjà expliqué, je suis fatiguée de ces conversations. Je trouve que ce n’est pas juste. Je fais des efforts pour rester sereine face à tes réactions. Tu arrives en retard, je pourrais dire « Tu as oublié ?? Tu  rigoles ?? C’est pas possible ! » et, à la place, je dis « qu’est-ce que tu pourrais faire pour ne pas oublier ?  » Mais tu ne t’arrêtes pas une seconde pour y réfléchir. « Je ne sais pas. », c’est tout. Tu n’y attaches pas d’intérêt. Je dois continuer à t’amener à travailler, et toi, tu ne fais pas. On en a parlé la semaine dernière, tu étais d’accord, on a parlé de ce sur quoi on allait travailler cette semaine, tu ne le notes pas, tu te pointes sans ton matériel, et je dois encore rester calme ! C’est pas juste. »

Et au fur et à mesure de mon discours, je monte dans les tours. Je m’énerve toute seule de tout ce que je prends sur moi… Je suis loin de ces conseils d’économiser ses paroles

Oscar est un peu dérouté.
« Ohh.. qu’est ce qu’il s’est passé ? Tu étais calme, et tout d’un coup, tu t’énerves…
– Je ne comprends pas que tu sois surpris ! On tourne en rond avec ces conversations !! Je m’épuise, je t’assure, j’ai envie de te laisser seul avec ton CNED, de me désintéresser de cette question, de te laisser faire face, bien ou mal. Je n’ai pas envie de cette relation avec toi. Je ne sais pas comment faire pour que tu le comprennes !!
– Tu as raison, je ne m’investis pas assez. »

Raison, ou pas, je ne me sens plus du tout détendue, et plus en état de travailler sereinement.
« Bon. J’avais prévu de quoi travailler ensemble, mais là, ce n’est pas possible, je ne suis pas en état. »

Heureusement, mon fils comprend ça. Il cherche une solution.
Il me dit :
« ok, si tu veux, on peut travailler demain, ou après-demain.
– Non, demain j’ai prévu quelque chose avec les petits, et jeudi, je fais le français avec Alice. Moi, j’ai le mardi pour toi. Pas un autre jour. Le mardi. Après, j’ai d’autres choses dans mon planning.
– alors, qu’est ce qu’on fait ?
– Je ne sais pas.
– Ecoute, dit-il. Je te propose la chose suivante : on travaille chacun de son cote, et on travaillera ensemble ensuite.
– On verra. »

Nous nous mettons à travailler, chacun sur son sujet. Je me calme peu à peu. Au bout d’un moment, un peu plus posée, je lui dis :
« Je te remercie d’avoir gardé ton calme. Je pense que je pourrai travailler avec toi dans un moment. »
Puis, un peu plus tard.
« Bon, j’ai presque fini, et toi ? On se donne encore 10 minutes ? »

10 minutes plus tard, je sors ce que j’avais préparé, et nous pouvons enfin commencer à travailler ensemble.
Finalement, ce sera même une bonne séance.

Heureusement qu’il a réussi à garder la tête froide.
Je suis contente d’avoir pu lui enseigner ça, et à laisser son espace à l’autre.

Pour la petite histoire, depuis ce jour-là, nos séances se passent bien mieux. Il semble qu’un déclic ait eu lieu, et Oscar fait preuve de beaucoup plus de sérieux. On a établi un planning ensemble, pour l’année entière, et il suit bien son avancée. L’autre jour, il me disait même : « Je comprends maintenant ce que j’aurais dû faire l’année dernière, et que je ne faisais absolument pas. »

Ouf. Décidément, pas toujours facile d’être parent…

Il y a quelques semaines, j’ai expliqué à mon fils que je n’étais pas un super-héros, et reviens dessus de temps en temps. Explication.

Je prends la douche avec Léon (presque 6 ans), et Anatole (3 ans).
Léon est de très mauvaise humeur.
Une partie de moi le comprend très bien.
La journée a été longue, et chaude.

Nous sommes 3 semaines après le passage de l’ouragan María sur Puerto Rico. La situation reste compliquée. Notre électricité est toujours coupée, et le générateur de l’immeuble ne s’allume qu’à 18h.  Nous avons passé une mauvaise nuit (nous dormons les 6 dans la même chambre depuis l’ouragan, pour n’utiliser qu’une seule clim), Léon s’est réveillé très tôt, et je cherche à le presser pour prendre la douche au moment où l’eau peut enfin couler (sans électricité, pas de pompe pour la faire marcher), sans que cela ne dure trop car je dois encore finir de préparer le diner, et, tel que je le vois, je sais qu’à 19h30, il voudra dormir…

Je le comprends d’autant mieux que je suis également de mauvaise humeur, à peu près pour les mêmes raisons, et, évidemment, cela n’aide pas…

Dans nos vies à tous, il y a des jours qui sont plus faciles que d’autres.

Pour un enfant qui n’a pas encore 6 ans, et qui n’a pas encore la capacité de réguler ses émotions, les jours difficiles se sentent encore plus.

Ainsi, Léon me parle mal, Léon pleure, Léon crie. Il ne fait plus face à rien.

Malgré ma mauvaise humeur, j’essaye de l’écouter, j’essaye de lui parler doucement. Ca n’a pas d’effet sur lui, mais c’est important pour moi : je me concentre sur mon ton, pas sur le sien. Et en même temps, je le préviens : « Je ne suis pas un super-héros. »

Cela le déstabilise…
« Pourquoi tu me dis ça ?? Je le sais bien que tu n’es pas un super-héros !
– Ce que je veux dire, c’est qu’il faudrait être un super héros pour continuer à entendre crier dans ses oreilles et ne pas s’énerver. Et là, ça fait un moment que tu cries, et que je reste calme. Je vois bien que ce n’est pas facile pour toi. Seulement, le problème, c’est que  je ne suis pas un super héros, et qu’à un moment, je ne vais plus pouvoir t’entendre me parler comme ça. »

Je ne me souviens même plus comment ça s’est terminé ce jour-là. Pas de façon aussi catastrophique que le jour, à peu près dans les mêmes circonstances, où mes grands sont venus me soutenir, sinon je m’en souviendrais, mais pas de façon très harmonieuse non plus, probablement.

N’empêche, ce moment m’a marquée, parce que nous avons pu en reparler depuis. Nous avons discuté des super pouvoirs des super-héros, et du fait que je n’en étais pas un ! Comme il ne se faisait déjà aucune illusion sur ce point, il le comprend mieux, c’est déjà ça.
Lui-même a observé que quand son petit frère lui criait dessus, il ne se comportait pas non plus en super-héros. Alors, de temps en temps, quand ça dérape, je lui redis : « Tu te rappelles que je ne suis pas un super-héros ? », parfois, ça l’aide à faire un effort pour parler plus posément !

Et vous, essayez-vous d’être des super héros ?

(Note : au moment où je tape ces lignes, cela fait 7 semaines que l’ouragan est passé, et nous n’avons toujours pas l’électricité, mais le générateur s’allume à 17h30, ce qui change tout au rythme du soir !)

Il y a des jours avec et des jours sans… Les jours où l’on est le parent que l’on a envie d’être, et les jours où l’on se transforme en maman qui craque…

Je crois vraiment que l’on progresse en se construisant sur nos succès, et en s’inspirant des succès des autres également. C’est pourquoi je lis tant, et pourquoi je partage tant avec vous.

Il y a peu, je vous racontais comment j’avais réussi à garder la tête froide devant la colère de mon fils.

Mon histoire aujourd’hui est contraire : il n’a pas gardé la tête froide devant ma colère !
Laissez-moi vous raconter…

En ce moment, notre rythme est en phase avec celui du générateur, puisque, depuis le passage de l’ouragan María, c’est lui qui nous donne l’électricité et l’eau (qui ne monte pas dans l’appartement si la pompe ne peut fonctionner).

Ainsi, tous les soirs, à 18h, c’est la course : c’est à la fois l’heure de la douche et de la préparation du repas, puisque j’essaye de faire dîner les petits avant 19h.

Hier, je m’y suis prise tôt, à 17h30, je prévenais déjà Léon et Anatole (6 et 3 ans) que la douche interviendrait une demi-heure plus tard, et qu’il faudrait que le salon soit rangé avant, ce qui ne semblait pas difficile, puisqu’il y avait peu de choses qui trainaient… en théorie, ils étaient bien d’accord. En attendant, ils continuaient à jouer.

A 18h, alors que je pouvais lancer ma cuisson, ils jouaient toujours. Je les avertis que je serai prête pour la douche 10 minutes plus tard. Mais 15 minutes plus tard, rien n’a changé, et je suis usée…. Fatiguée de me battre, je me sens impuissante.

Je décide d’y être indifférente, de ne plus me battre, et annonce simplement que je vais me doucher, et qu’ils pourront se doucher seuls lorsqu’ils auront rangé le salon.

Seulement, mon indifférence ne tient pas devant leurs cris :
« Je voulais me doucher avec toooooooi !!!
– Alors pourquoi n’as-tu pas rangé ? Ca fait presqu’une heure que je vous le dis ! Je suis venue le répéter, une fois, deux fois, trois fois, et vous n’avez rien fait !! (oui, je sais, tout ce qu’il ne faut pas dire !! Je ne me sens pas très fière…) »
La conversation tourne en boucle, et mes velléités de rester calme s’estompent peu à peu…

Oui, je deviens la maman qui craque.

Je finis par comprendre que je fais plus de mal que de bien en restant, et je pars enfin prendre ma douche, seule, les laissant pleurer seuls dans le salon.

Lorsqu’ils me rejoignent, ma douche est terminée, personne n’est encore calmé, et je me réfugie dans ma chambre.

Je suis là, en serviette, en train de pleurer, repensant à la manière dont j’ai (mal) géré la situation, m’interrogeant sur ce qu’il aurait fallu faire, triste de ne pas avoir pu partager ce moment avec eux, ne sachant pas non plus comment j’allais faire pour que mon plus petit soit lavé (Léon peut le faire seul, mais va-t-il prendre l’initiative d’aider son frère ?)…

C’est alors qu’Oscar (15 ans) entre, pour me demander je ne sais quoi.
Il me voit abattue et me dit :

« Tu sais maman, t’es une super maman. C’est pour ça que tu te sens mal comme ça.
Il y a beaucoup de familles dans lesquelles des scènes comme ça, il y en a tout le temps, et c’est justement parce que ça arrive peu chez nous que tu te sens si mal. Et si ça arrive peu, c’est grâce à toi. »

Merci, mon grand !!

De l’autre côté de la porte, j’entends mon Alice (10 ans) qui amène Anatole à la douche. Elle aussi a compris que je n’étais plus capable, et que j’avais besoin de soutien à ce moment-là.

Merci ma grande !

Bon sang, ce n’est pas facile tous les jours, mais nous restons une famille unie, et c’est ça qui compte !!

Un peu plus tard, une fois calmée, je me suis assise avec mes deux plus jeunes, et nous avons essayé de chercher comment nous pourrions éviter qu’une telle scène se répète. Nous n’avons pas trouvé, mais j’ai confiance, cela viendra.

Ce matin, je me sens contente en amenant les petits à l’école. Nous nous sommes bien organisés, nous sommes en avance, ce qui est loin d’être toujours le cas.

Il ne fait pas trop chaud, Anatole (3 ans), de bonne humeur, sautille devant Léon (6 ans) et moi, avec des chaussures qui appartenaient auparavant à Léon.

Léon commente :
“Ces chaussures, elles sont rarement à Anatole.
– Qu’est-ce que ça veut dire qu’elles sont “rarement” à Anatole ?
– Tu ne connais pas le mot “rarement” ? C’est rare que tu ne connaisses pas un mot.
– Je connais le mot “rarement” mais je ne comprends pas la manière dont tu l’utilises ici.
– Et bien, je dis que ces chaussures sont rarement à Anatole ! (avec un ton un peu plus ferme)
– Oui, mais…
– Mais tu comprends rien !! (Cette fois, il s’énerve carrément…)  Elles sont rarement à Anatole !!! se met-il à crier. (On nous regarde même depuis le trottoir d’en face)
– J’aimerais bien que tu ne me cries pas dessus.  – dis-je très calmement, je m’admire moi-même !
– Mais c’est parce que..; oh !!! Tu comprends rien ! crie-t-il encore
– J’essaye de comprendre, et j’aimerais que tu ne me cries pas dessus.”
Cette fois, il ne peut plus se contenir, il lâche son sac, crie, et s’éloigne.

Bon, je respire, et ça me donne le temps de me dire que peu importe l’utilisation du mot “rarement”, le fait qu’il se mette dans cet état-là prouve probablement qu’il y a autre chose, un autre problème que je n’ai pas perçu, et que cette frustration sur notre incompréhension n’est qu’un prétexte.

Inutile de me focaliser sur la pointe de l’iceberg et d’adresser son comportement à ce moment-là, il sera plus utile d’en identifier la cause.

Je décide donc – ouf, je n’y arrive pas toujours !! – de lâcher prise sur le fait de me parler mal, et d’essayer d’écouter ce qu’il peut se passer.

Je m’arrête, et ne dis plus rien, en attendant qu’il récupère son sac.
C’est encore une petite difficulté, car le sac est resté quelques mètres derrière, et je n’ai aucune envie d’aller le chercher.
“Mon sac est trop lourd !!
– Je veux bien le porter si tu veux, dis-je sans bouger.
– Il est trop lourd, je ne peux pas aller le chercher !
– Tu as su le porter jusqu’ici, et tu l’as lâché parce que tu étais énervé. Je ne retournerai pas le chercher, mais je pourrai le porter à partir d’ici si tu veux.
– Il est trop lourd !! Et en plus, je ne veux pas aller à l’école !”

Nous y voilà…. Problème d’école…
Je ne réagis pas encore. Une chose après l’autre. 

Nous en sommes encore à la question du sac. J’attends sans rien dire, calmement.
Heureusement que nous sommes partis tôt ce matin… La parentalité positive est également une question de rythme !
Je me rappelle la crise d’Anatole de la semaine dernière, alors que nous étions déjà en retard : j’étais tellement stressée que je n’arrivais plus du tout à gérer et nous sommes tous arrivés énervés à l’école !
Mais ce matin, ça se passera mieux, j’ai confiance.

Et en effet, en peu de temps, Léon se calme un peu. Il récupère son sac et me rejoint.
Je prends le sac et nous marchons encore un peu sans rien dire.
Lorsque je le sens un peu plus posé, je commence à lui caresser la nuque.
Immédiatement, il s’arrête et me fait un câlin !
Il a suffi d’un simple geste d’affection pour me reconnecter…

Je peux maintenant creuser le sujet :
“Tu dis que tu ne veux pas aller à l’école ?
– Non !
– Que se passe-t-il ?
– Je ne peux pas apporter mon Mack à l’école !!”
Il s’agit du nouveau camion qu’il a eu pour son anniversaire, quelques jours auparavant.

“Ah… Toi, tu aurais aimé pouvoir apporter ton Mack..
– Oui ! J’ai envie de jouer avec !
– Tu voudrais l’apporter pour pouvoir jouer avec, ou pour le montrer aux copains ?
– Pour jouer avec !
– C’est une bonne nouvelle que ce soit pour jouer avec : parce que tu pourras jouer avec à la maison, alors que tu ne peux pas le montrer aux copains à la maison.
– Oui, mais je veux l’apporter à l’école !!”
Cette fois, nous ne sommes plus dans la colère, mais dans la tristesse.

Alors, je décide, pour mieux le recevoir, de basculer dans la technique magique de l’imaginaire !
“Si tu pouvais apporter ton Mack, tu l’apporterais vide, ou avec des voitures dedans ?
– Avec 16 voitures dedans ! “
On change d’humeur : voilà mon Léon qui se met doucement à sourire…

Je pousse la projection :
“A l’école, il y a des voitures aussi, non ?
– Oui… J’ai une idée ! Je l’apporterais avec 16 voitures, et les copains pourraient jouer avec mes voitures pendant que je mettrais des voitures de l’école dans mon Mack.
– Ah, ce serait chouette, ça ! Et comment ferais-tu pour ne pas mélanger tes voitures et celles de l’école ?
– Ben, je connais mes voitures ! Je les retrouverais !”

A ce moment-là, nous arrivons devant la porte de l’école. Mon Léon n’est pas complètement au top, mais il a pu s’exprimer, il s’est projeté, il a mieux accepté les contraintes, et il n’est plus ni en colère ni triste au moment où il entre dans sa classe.

Je me félicite d’avoir pu l’accompagner, nous pouvons à présent passer chacun à l’étape suivante de notre journée, sereinement.

POUR ALLER PLUS LOIN

Si ce sujet vous intéresse, allez donc voir la solution très simple que je vous propose pour apprendre à accompagner les émotions de vos enfants.

Quand nous devenons parents, nous sommes à l’écoute de nos enfants. C’est bien naturel : ceux-ci ont des besoins, et nous sommes là pour y répondre. Ils sont petits et dépendant de nous.
Puis les enfants grandissent, et ont toujours des besoins, auxquels, en général, nous continuons à répondre. C’est notre responsabilité de parents, et c’est également un plaisir ; parce que nous sommes heureux de remplir notre rôle, de leur apporter du bien-être.

Seulement voilà, à force de vouloir être à l’écoute de nos enfants, nous oublions parfois d’être à l’écoute de nous même. Et c’est là qu’intervient le problème.

Pourquoi est-il important d’écouter nos besoins ?

Pour pouvoir prendre soin de quelqu’un, il faut d’abord être en état de le faire.
L’image la plus claire pour illustrer ce point est celle du masque à oxygène en avion. L’image est classique, mais très parlante. Il s’agit d’enfiler son propre masque à oxygène d’abord, avant d’être capable d’enfiler le sien à l’enfant.

En CNV, le principe est le même : nous ne pouvons offrir d’empathie à personne si nous n’avons pas d’abord pris soin de nous-mêmes, via l’auto-empathie. Ainsi, pour être de meilleurs parents, et dans l’intérêt de nos enfants, prenons d’abord soin de nous-mêmes.

Comment savoir ce dont nous avons besoin ?

L’une des difficultés de cette démarche cependant, est qu’il nous est parfois difficile de savoir quels sont nos besoins. En effet, savoir s’écouter est une compétence que nous n’avons pas apprise. Nous avons majoritairement été élevés hors des principes d’éducation positive que nous apprenons ici, et n’avons pas appris à écouter ce que nous ressentions. Ainsi, si nous essayons aujourd’hui d’apprendre à nous comporter différemment face à nos enfants, il faudrait également apprendre à nous comporter différemment face à nous-mêmes. Peu à peu, cherchons en nous ce que nous ressentons, écoutons notre agacement comme un indice sur nos besoins, et apprenons à les identifier pour y répondre.

Le coût de l’insatisfaction de nos besoins

Si nous persistons dans l’idée que les besoins de nos enfants doivent systématiquement passer d’abord, avant les nôtres, nous risquons d’en payer ensuite les conséquences. Mettre un voile sur nos propres envies, sur nos propres besoins ne va pas les faire disparaître.

Notre patience va s’user, et nous réagirons de moins en moins bien face aux enfants. Impossible de montrer de l’enthousiasme lorsque nous sommes sous le coup de la fatigue, et la tension va monter.

Ensuite, et c’est probablement le plus grave, si nous continuons à négliger nos besoins, nous finirons par nourrir du ressentiment à l’égard de nos enfants. Nous leur en voudrons de notre sacrifice, même s’ils ne le demandaient pas vraiment, et nous nous montrerons d’autant plus désagréables avec eux, malgré toutes nos bonnes intentions.

« Si je veux juste entendre ce qui est vivant chez l’autre, sans prendre en compte ce qui est vivant chez moi, je me fais violence et donc il va y avoir de la violence, il va y avoir cette colère. » Isabelle Padovani

Prendre soin de nous

Ainsi, il est important de prendre soin de nous. Mais voilà… comment faire ?
Comment sortir de cette habitude de déni de soi, pour apprendre à écouter les signes qui nous montrent que nous avons besoin d’une pause ? Comment s’arrêter pour analyser quels sont nos besoins non nourris ?

Dans Parents respectueux, enfants respectueux, les auteurs suggèrent aux parents qui n’en ont pas l’habitude de commencer par s’accorder 10 minutes par jour.
Juste 10 minutes. 10 minutes pour soi qui peuvent être consacrées à ce que nous voulons.
L’annoncer aux enfants. Leur expliquer que c’est un besoin pour mieux s’occuper d’eux ensuite.
Ils sont capables de le comprendre. Probablement pas dès le premier jour, mais petit à petit.

Essayons ensuite d’identifier quels sont nos besoins non nourris. Nous n’avons pas tous les mêmes. Pour certains, il s’agira plus de repos, pour d’autres d’amitié, ou de soutien, de créativité, d’exercice…

Quels que soient les besoins identifiés, n’hésitons pas, à prendre du temps pour nous, ou, comme cela avait été discuté dans “Grandir Autrement”, à écouter  la nécessité de s’accorder des pauses.

Ainsi, nos enfants apprendront à respecter cet espace qui sera le nôtre, qui nous permettra de respirer.
Et cet espace aura d’autant plus de portée qu’il sera aussi un modèle pour eux. Nous leur enseignons comment il est possible de prendre soin de soi-même. Nous leur montrons qu’il est possible de ne pas oublier de se respecter soi-même quand on prend soin des autres.

Et nous leur offrirons des parents plus ouverts, loin du ressentiment de celui qui a besoin de temps seul comme d’un masque à oxygène !!

Si cela vous semble toujours difficile, écoutez au moins cette idée des auteurs de Parents respectueux, enfants respectueux : « Nous espérons aussi que vous prendrez l’habitude de vous accorder chaque jour quelques instants de réflexion pour vous rappeler avec quelles intentions vous voulez élever vos enfants. »

Car c’est sûr, souvent, on se perd en route, mieux avoir un plan

Pour acheter Parents respectueux, enfants respectueux en format poche (il existe également au format broché, mais j’aime mieux les formats faciles à emporter !) :

« A la différence de beaucoup d’autres sentiments, la colère est presque toujours dirigée contre une autre personne. « Je suis fâché » signifie ordinairement « Je suis fâché contre toi. » »
écrit Thomas Gordon dans Parents efficaces.

Il est important de le comprendre, parce que cela modifie grandement le « message Je » !

En effet, Thomas Gordon conseille de s’exprimer auprès des enfants en « message Je », c’est à dire en parlant de nous, plutôt que d’accuser l’autre en utilisant un « message Tu » (ce qui n’est pas sans rappeler les conseils de Faber et Mazlish dans Parler pour que les enfants écoutent, écouter pour que les enfants parlent, qui suggéraient, dans le chapitre sur la coopération de décrire ce que l’on ressent.).

C’est logique, et cela rejoint également les mots de Marshall Rosenberg : en accusant et reprochant, « nous limitons sérieusement nos chances d’obtenir ce que nous voulons. »

Le problème ici, selon Thomas Gordon, c’est que, même en message Je, le message de colère prend rapidement un ton d’accusation…

Ce qu’il préconise est donc de réfléchir au sentiment premier. Oui, au sentiment premier.

« Je suis maintenant convaincu, écrit-il, que le parent produit lui-même la colère après avoir éprouvé un premier sentiment. »

A la lecture de cette phrase, je m’interroge.
Je vois bien des situations dans lesquelles il est clair que notre colère cache un autre sentiment.
L’exemple typique, et le premier qui vient en tête, est le moment où l’on perd temporairement un enfant.
Quand on le retrouve, il arrive souvent, au lieu qu’on le prenne dans nos bras pour lui dire à quel point on est content de le revoir, qu’on commence par lui reprocher de s’être égaré !! On est colère parce qu’on a eu peur, c’est clair.

D’autres exemples peuvent venir : ici, Gordon parle du parent en colère parce qu’il est en fait déçu que son fils ait oublié son anniversaire…

Cependant, est-ce vraiment toujours le cas ?
La colère est également un sentiment en soi, non ? On peut aussi être en colère, avec pour sentiment premier… la colère, pas vrai ?

Je ne suis pas sûre d’avoir trouvé la réponse à cette question, mais ce que je peux raconter, c’est ce qui m’est arrivé le jour où je me suis vraiment posé cette question.

J’étais seule, et j’ai réfléchi à la dernière occasion où je m’étais sentie en colère.
Le matin même, en fait. Pourquoi ? Parce qu’Oscar (14 ans) n’avait pas pris le temps de vider le lave-vaisselle avant de partir à l’école. Bon. Analysons. J’étais donc en colère. Un autre sentiment ? Un sentiment « premier » ?

Oui, en fait.
J’étais blessée. Aïe, Rosenberg parlerait là de « sentiment mêlé ». Je devrais probablement chercher un autre terme. Mais ça me permet déjà de mieux creuser le besoin derrière ce sentiment : je m’écoute, ce qui ne m’arrive pas si souvent, et je réalise que ma colère face au fait qu’il n’ait pas vidé le lave-vaisselle découle d’un besoin de considération.

Si le lave-vaisselle n’est pas vidé, c’est parce que tout le monde sait que je suis à la maison, et peux donc le vider moi-même, une fois qu’ils sont partis. Seulement voilà, cela sous-entend que mon temps a moins de valeur que celui des autres. Que ce que j’ai d’autre à faire est moins important.

C’est étrange, parce que ça semble évident a posteriori, mais avoir pu faire ce raisonnement m’aide beaucoup. C’est tellement plus clair quand on met les bons mots sur le besoin !

Le soir même, je partage ce raisonnement avec ma famille, et avec Oscar en particulier. Je ne suis plus énervée, j’explique simplement ce que ça suscite chez moi. Mon message centré sur ce besoin de considération est beaucoup mieux reçu que celui du matin  qui tournait plus ou moins autour de « Je veux pas le savoir, c’est ton job », soit dans la gamme du reproche… Et le lendemain, le lave-vaisselle est vidé !

Merci Thomas Gordon pour cet encouragement à l’introspection. J’aimerais garder cela à l’esprit pour m’interroger ainsi régulièrement sur mon sentiment premier derrière la colère…

Et vous ? Etes-vous prêt à faire cette analyse ?

« Il se passe quelque chose en nous qui nous dépasse, et dépasse la réalité des faits reprochés à l’enfant. Avons-nous des réactions intenses parce que nos enfants exagèrent ou exagérons-nous leur faute pour justifier l’intensité de notre réponse émotionnelle ? »

Cette phrase, issue du livre d’Isabelle Filliozat : Il n’y a pas de parent parfait m’a vraiment laissée songeuse…

Car, c’est certain, face à nos enfants, nous avons une forte tendance à la dramatisation.

L’un de nos amis renverse son verre de vin pendant le dîner, et nous le rassurons : « Ce n’est pas grave ! ». Si nous-mêmes renversons quelque chose, ma foi, ça arrive… Lorsque c’est le fils de notre copine, bon, il est petit, on est encore maladroit à cet âge… Mais si c’est notre enfant, alors on réagira, parce que franchement, il pourrait faire attention !!

Pourquoi est-ce le seul à ne pas avoir le bénéfice de notre tolérance ?

Son verre renversé sera la déclencheur de notre colère, et nous aurons face à lui un comportement probablement démesuré !

Cet été, alors que nous devions préparer les valises en prévision d’un changement d’endroit, j’avais du mal à mobiliser tous les enfants. Etrangement, ils étaient plus intéressés par l’idée de jouer aux legos que de mettre leurs vêtements dans la valise, et de vérifier que rien ne trainait sur les lits….

Ma frustration montait donc, jusqu’au moment où je me suis disputée avec mon grand. Et, avant de prendre le recul nécessaire pour l’analyser, j’étais persuadée qu’il avait exagéré ! Que, certes, je ne devrais pas m’énerver, mais qu’en même temps, il avait vraiment laissé traîner ses chaussures !!

Un moment plus tard, j’ai bien compris que laisser traîner ses chaussures n’était probablement pas si répréhensible… Que dans le fond, j’étais moi-même stressée par une situation qui n’avait rien à voir avec les enfants, et que je sortais mon stress en m’en prenant à lui !

Je tombais donc complètement dans ce qu’écrivait Isabelle Filliozat : « Exagérons-nous leurs fautes pour justifier l’intensité de notre réponse émotionnelle ? ». Oui ! Complètement !

Alors, la question se pose : pourquoi se l’autorise-t-on ?

En fait, je pense que c’est lié à cette notion de figure d’attachement. Vous savez : l’enfant est en sécurité avec sa figure d’attachement, qui ne le rejettera pas. Il peut donc exprimer son stress en toute liberté. Et cela explique pourquoi les petits pleurent lorsqu’on les retrouve, alors qu’ils se comportaient « si bien » avec la personne qui les gardait !

Eh bien, je pense que c’est également valable dans l’autre sens ! Nous sommes en sécurité face à nos enfants.. ainsi, nous pouvons exprimer notre stress, nous en prendre à eux, et ils ne nous rejetteront pas.

Oui, nos enfants sont ce que nous avons de plus cher au monde, mais ils sont également ceux qui subissent nos plus grosses colères !! Paradoxal ? Un peu…

Je reprends encore, parce que je crois que ces phrases valent la peine d’être réfléchies : « Il se passe quelque chose en nous qui nous dépasse. » 

C’est bien cela. On ne choisit en général pas consciemment de se mettre à crier. Cela nous dépasse. Et en général, cela « dépasse la réalité des faits reprochés à l’enfant. »

Alors, ai-je la solution ? Non. Au fur et à mesure du chemin, de l’analyse, de la maîtrise d’outils de parentalité positive, les colères diminuent, les cris décroissent, et l’harmonie se développe. Mais je sais qu’il y aura encore et toujours des moments ainsi. Ou cela nous dépasse.

En revanche, je m’engage à me poser explicitement cette question, lorsque cela m’arrive : « Avons-nous des réactions intenses parce que nos enfants exagèrent ou exagérons-nous leur faute pour justifier l’intensité de notre réponse émotionnelle ? » et être honnête avec moi-même.

Au besoin, savoir revenir vers l’enfant, comme je l’ai fait cet été, pour partager cette réponse avec lui : « Je suis désolée de l’intensité de ma réaction. En fait, c’est difficile pour moi en ce moment parce que… (on explique ou pas, en fonction des faits, et de l’âge, moi, à ce moment-là, j’avais choisi de l’expliquer à mon fils de presque 15 ans), et ça n’avait rien à voir avec toi. »

Parce que nos enfants apprennent par l’exemple. C’est le mieux qu’on puisse leur offrir.

Note : cet article existe également en version podcast, si vous voulez l’écouter en déplacement….