Exagérer les fautes de nos enfants : une manière de se justifier…

« Il se passe quelque chose en nous qui nous dépasse, et dépasse la réalité des faits reprochés à l’enfant. Avons-nous des réactions intenses parce que nos enfants exagèrent ou exagérons-nous leur faute pour justifier l’intensité de notre réponse émotionnelle ? »

Cette phrase, issue du livre d’Isabelle Filliozat : Il n’y a pas de parent parfait m’a vraiment laissée songeuse…

Car, c’est certain, face à nos enfants, nous avons une forte tendance à la dramatisation.

L’un de nos amis renverse son verre de vin pendant le dîner, et nous le rassurons : « Ce n’est pas grave ! ». Si nous-mêmes renversons quelque chose, ma foi, ça arrive… Lorsque c’est le fils de notre copine, bon, il est petit, on est encore maladroit à cet âge… Mais si c’est notre enfant, alors on réagira, parce que franchement, il pourrait faire attention !!

Pourquoi est-ce le seul à ne pas avoir le bénéfice de notre tolérance ?

Son verre renversé sera la déclencheur de notre colère, et nous aurons face à lui un comportement probablement démesuré !

Cet été, alors que nous devions préparer les valises en prévision d’un changement d’endroit, j’avais du mal à mobiliser tous les enfants. Etrangement, ils étaient plus intéressés par l’idée de jouer aux legos que de mettre leurs vêtements dans la valise, et de vérifier que rien ne trainait sur les lits….

Ma frustration montait donc, jusqu’au moment où je me suis disputée avec mon grand. Et, avant de prendre le recul nécessaire pour l’analyser, j’étais persuadée qu’il avait exagéré ! Que, certes, je ne devrais pas m’énerver, mais qu’en même temps, il avait vraiment laissé traîner ses chaussures !!

Un moment plus tard, j’ai bien compris que laisser traîner ses chaussures n’était probablement pas si répréhensible… Que dans le fond, j’étais moi-même stressée par une situation qui n’avait rien à voir avec les enfants, et que je sortais mon stress en m’en prenant à lui !

Je tombais donc complètement dans ce qu’écrivait Isabelle Filliozat : « Exagérons-nous leurs fautes pour justifier l’intensité de notre réponse émotionnelle ? ». Oui ! Complètement !

Alors, la question se pose : pourquoi se l’autorise-t-on ?

En fait, je pense que c’est lié à cette notion de figure d’attachement. Vous savez : l’enfant est en sécurité avec sa figure d’attachement, qui ne le rejettera pas. Il peut donc exprimer son stress en toute liberté. Et cela explique pourquoi les petits pleurent lorsqu’on les retrouve, alors qu’ils se comportaient « si bien » avec la personne qui les gardait !

Eh bien, je pense que c’est également valable dans l’autre sens ! Nous sommes en sécurité face à nos enfants.. ainsi, nous pouvons exprimer notre stress, nous en prendre à eux, et ils ne nous rejetteront pas.

Oui, nos enfants sont ce que nous avons de plus cher au monde, mais ils sont également ceux qui subissent nos plus grosses colères !! Paradoxal ? Un peu…

Je reprends encore, parce que je crois que ces phrases valent la peine d’être réfléchies : « Il se passe quelque chose en nous qui nous dépasse. » 

C’est bien cela. On ne choisit en général pas consciemment de se mettre à crier. Cela nous dépasse. Et en général, cela « dépasse la réalité des faits reprochés à l’enfant. »

Alors, ai-je la solution ? Non. Au fur et à mesure du chemin, de l’analyse, de la maîtrise d’outils de parentalité positive, les colères diminuent, les cris décroissent, et l’harmonie se développe. Mais je sais qu’il y aura encore et toujours des moments ainsi. Ou cela nous dépasse.

En revanche, je m’engage à me poser explicitement cette question, lorsque cela m’arrive : « Avons-nous des réactions intenses parce que nos enfants exagèrent ou exagérons-nous leur faute pour justifier l’intensité de notre réponse émotionnelle ? » et être honnête avec moi-même.

Au besoin, savoir revenir vers l’enfant, comme je l’ai fait cet été, pour partager cette réponse avec lui : « Je suis désolée de l’intensité de ma réaction. En fait, c’est difficile pour moi en ce moment parce que… (on explique ou pas, en fonction des faits, et de l’âge, moi, à ce moment-là, j’avais choisi de l’expliquer à mon fils de presque 15 ans), et ça n’avait rien à voir avec toi. »

Parce que nos enfants apprennent par l’exemple. C’est le mieux qu’on puisse leur offrir.

Note : cet article existe également en version podcast, si vous voulez l’écouter en déplacement….

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2 réponses
  1. Capu Cine
    Capu Cine dit :

    Cet article m’amène à réflechir ! Et je vais essayer aussi de me poser la question. L’autre jour j’écrivais à ma soeur combien mes enfants exagéraient en lui détaillant une journée type (celle de la veille au hasard). Au fur et à mesure que j’écrivais je me rendais compte que les situations qui me mettaient en colère n’étaient pas liées directement à leur comportement et si c’était le cas, leur comportement n’était pas pire que celui du petit voisin du même âge. Je me suis rendue compte également à quel point je tamponnais ma carte de fidélité de petits riens dans la journée (pas étonnant alors que les soirées soient tendues avec une maman au comble du stress !). J’ai donc stoppé mon roman pour écrire tous les petits bonheurs !
    Je me rappelle aussi d’une fois, au parc, où je me suis énervée sur mon fils que je trouvais peu aidant alors que j’enfilais ses chaussures. Ce qui m’avait en fait énervée c’est le bruit agressif d’une moto passant dans le parc. J’étais agressée et stressée pour les enfants : j’avais donc hâte de partir. Je lui ai dit (il a 4 ans) : « excuse-moi de t’avoir parlé sèchement, ça n’était pas contre toi, j’ai juste hâte de partir car cette moto me fait mal aux oreilles et j’ai peur pour vous ». Il s’est empressé de me faire un bisou ! Comme quoi quand on est juste, les enfants savent nous le faire comprendre très tôt ! J’essaie donc régulièrement (mais c’est dur) de m’arrêter un instant pour comprendre ce qui se passe en moi (comment je me sens, pourquoi ?).
    Merci pour ton blog.

    Capucine.

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  2. Leo
    Leo dit :

    Je ne suis pas certaine que cela soit la clé, ou la seule. Il me semble que c’est aussi parce que nous ne les considérons pas comme nos égaux. Non seulement nous les considérons comme inférieurs à nous , adultes, mais en ce qui concerne nos enfants, nous les considérons comme des extensions de nous-mêmes : c’est ce qui fait que nous ressentons de la honte quand notre enfant se conduit ou s’habille « mal » (ce que nous considérons comme tel), comme si c’était nous-même que l’on allait juger.
    Les considérer non seulement comme des êtres intelligents mais également indépendants et autonomes, non notre propriété mais nous la leur, et enfin leur retirer la responsabilité de nous « représenter » devrait changer pas mal notre regard et notre attitude…

    Répondre

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