Je ne vous apprends rien : dans une maison, les tâches sont nombreuses. On aimerait que nos enfants y participent, mais en même temps, on voudrait ne pas les “forcer”. On se sent tiraillé… en fait, il faudrait qu’ils aident spontanément, ce serait l’idéal !

Oui, mais arrêtons de fantasmer… Qu’ils participent spontanément ne se fera pas !
En revanche, on peut probablement les y amener, peu à peu.

Pour moi, il y a ici plusieurs questions dans cette question :

1- Est-il important qu’ils participent ?

Ce n’est pas important, c’est fondamental ! Eh oui, on touche ici aux besoins fondamentaux de l’être humain (du moins selon Adler, et franchement, plus j’apprends, et plus je suis en ligne) : Appartenir et Avoir de l’importance.
Avoir de l’importance, c’est, entre autres, se sentir capable et utile. On a tous besoin de ça ! Quand quelqu’un fait quelque chose pour moi, je suis sensible à l’attention, mais s’il ne me laisse rien faire, je reçois le message qu’il pense que je ne suis pas capable ! Alors, comme je ne supporte pas cette idée, je vais interpréter autrement le comportement des autres, je vais progressivement intégrer l’idée que je n’ai de l’importance que lorsqu’on s’occupe de moi, et je vais de moins en moins en faire…

Si, au contraire, on me laisse en charge de certaines tâches de la maison, c’est qu’on me fait confiance, c’est qu’on sait que j’en suis capable. J’ai une responsabilité et je m’en acquitte. Au début, peut-être pas avec succès, mais chaque erreur est une opportunité d’apprentissage… Peu à peu, nourri par un environnement bienveillant, je vais m’améliorer, je vais mettre en place une routine, je vais montrer à mon entourage qu’on peut compter sur moi ! Et ça, ça me rend plus fort !
D’ailleurs, en laissant l’enfant contribuer, on fait d’une pierre deux coups, parce que ça répond aussi en partie à son besoin d’appartenance : il trouve ainsi aussi sa place dans la famille. Celle-ci fonctionne, entre autres, grâce à lui !

Premières étapes à franchir donc : premièrement, être convaincu qu’il est bon pour eux de participer ; deuxièmement, changer son vocabulaire pour transmettre cette nouvelle conviction : ils ne participent pas aux tâches de la maison, ils contribuent au fonctionnement de la famille !

2- Quel modèle leur donne-t-on en faisant pour eux ?

Quand on fait pour les enfants, on peut ressentir plusieurs choses.
Le plaisir de donner de notre temps, oui, mais aussi du ressentiment pour ce qu’ils nous “obligent” à faire, et puis de la frustration de ne pas être considéré(e) (notre temps n’est visiblement pas valorisé…). Ainsi, je vois beaucoup de mamans qui ne se sentent pas bien dans le rôle de celle qui fait tout, qui aimeraient bien que les enfants les aident, et qui accumulent du ressentiment pour tout ce que ces derniers ne font pas… Mais l’ont-elles vraiment communiqué avant ?
En fait, ces mamans n’ont pas vraiment su poser leurs limites. Ont-elles seulement compris qu’elles ne respectaient pas leurs limites d’ailleurs ? On l’a déjà vu : on n’a pas appris à écouter nos sentiments, à identifier nos besoins… Comment pourrait-on les communiquer si on n’en a même pas conscience ?

Seulement voilà : en donnant ce modèle-là à nos enfants, on ne leur enseigne pas non plus à poser leurs propres limites !
Parce que les enfants copient ce qu’ils voient, évidemment. Alors, si on leur montre qu’on trouve normal de se laisser dévorer par leurs besoins, au détriment des nôtres, ils recevront qu’il est normal de se laisser dévorer, et risquent fort de reproduire le modèle. Il leur sera probablement plus difficile de faire face à un ami envahissant, de faire respecter leur espace ; en un mot, ils ne sauront pas non plus faire respecter leurs limites.
A l’inverse, si nous leur donnons l’occasion de prendre en compte nos limites pour adapter leur propre comportement, nous leur enseignons le respect de l’autre (en l’occurence, de nous !) et ça aussi, c’est fondamental !
D’ailleurs, si les enfants se mettent à contribuer, notre reconnaissance nous encouragera à les respecter plus à notre tour, et nous entrerons dans un cercle vertueux, où le respect de l’autre pourra enfin remplacer le ressentiment ; avec les conséquences que l’on peut imaginer sur l’ambiance à la maison !

3- Comment faire pour les y inciter ?

Les deux premières questions traitaient des raisons que nous pouvons avoir d’encourager nos enfants à contribuer.
“J’ai deux raisons, dont chaque est suffisante seule.” aurions-nous pu dire, à la manière de Cyrano de Bergerac…
Maintenant, comment ??
Je crois qu’arrivé à ce stade, parfois, sans même qu’on s’en rende compte, la moitié du chemin est faite. Pourquoi ? Parce que si nos enfants participent peu, c’est probablement parce qu’on leur a demandé sans y mettre le coeur, justement parce qu’on ne voulait pas les “forcer”. Maintenant qu’on est convaincu du bien-fondé de la démarche, nos demandes vont avoir plus de poids, ne serait-ce que par leur sincérité.

Je vois 2 manières de commencer réellement :
Celle qui est la plus coopérative, qui cherche à les inclure et à leur donner l’opportunité de constater nos besoins pour leur donner l’envie de contribuer sans qu’on ait à les forcer du tout, c’est la réunion de travail. (suivre le lien pour savoir comment la mettre en place). C’est vraiment la solution à privilégier !
Une réunion familiale au cours de laquelle on leur présente la liste des choses qui doivent être faite dans la maison, et on leur demande en quoi ils veulent contribuer.
Quand chacun choisit, c’est souvent très efficace ! Ca a très bien marché chez nous.

Il y a cependant des familles dans lesquelles les enfants ont tellement l’habitude qu’on ne leur demande pas de participer qu’ils ont du mal à voir le besoin de l’autre. Ils ne reçoivent pas la pose de la limite, parce qu’ils ne savent pas ce que c’est ; et ils sont peut-être déjà dans le cas où ils croient qu’il faut qu’on s’occupe d’eux pour qu’ils aient de l’importance.
Avec ces enfants-là, il faudra y aller peu à peu, et effectivement les « forcer » au début, pour pouvoir rétablir la trajectoire, et le message !
Pour cela, on peut commencer par les tâches qui « leur appartiennent ». Ce que je veux dire par là, c’est : si cette tâche n’était pas faite, à qui cela poserait-il problème ?
Si le problème est vôtre (ex : rangement du salon), ils n’auront pas d’autre motivation que la prise en compte de votre besoin, ce qui est justement ce qui leur pose problème pour l’instant.
Si le problème est leur (ex : linge sale dans le panier), alors on peut s’en servir pour les sensibiliser à la question de la prise en compte du besoin de chacun, en installant des conséquences naturelles !
La conséquence naturelle, c’est ce qui advient lorsque nous ne faisons rien.
Ainsi, s’ils ne mettent pas leur linge au panier à linge, et que nous n’intervenons pas sur ce point, le linge ne sera pas propre. Et ça, ce sera bien leur problème.

Attention : il n’est pas question de se mettre à faire ça du jour au lendemain, sans les avoir prévenus ! Nous allons communiquer avec nos enfants.
Nous leur dirons : « Tu sais, j’ai réalisé que je devais souvent ramasser les vêtements sales par terre dans ta chambre, et je trouve que ce n’est pas mon rôle. Je voulais donc t’informer du fait que dorénavant, je ne laverai que les vêtements qui seront dans le panier. Il sera de ta responsabilité de les y mettre si tu veux des vêtements propres. » On peut même ajouter (surtout si les enfants sont jeunes) : « Penses-tu que tu t’en souviendras, ou as-tu besoin d’aide pour réfléchir à un système qui te permettra de ne pas oublier ? »
Et ensuite, il faut s’y tenir !! C’est à dire :
– ne pas ramasser le linge qui est par terre, bien sûr.
– ne pas remplacer ça par un rappel constant du fait qu’il y ait du linge par terre. On rappelle le principe : c’est devenu LEUR responsabilité. On peut respecter la courbe d’apprentissage en le leur rappelant une fois les premiers jours, et ensuite, on laisse arriver la conséquence. C’est important qu’ils s’en rendent compte, ça les aidera à grandir !
– s’il arrive un jour où ils n’ont plus de caleçon, ou de short de sport, ne pas résoudre pour eux. L’attitude à adopter sera : « Je suis désolée pour toi que tu n’aies plus de caleçon, j’espère que tu vas trouver une solution. » et s’en aller…
– résister à l’envie d’enfoncer le clou : « Je t’avais bien dit que tu devais mettre ton linge au panier !! », ils s’en sont déjà rendu compte. On peut recevoir la difficulté, simplement, et se focaliser sur le futur : « Mince, tu n’as plus de short…  Non, je ne peux pas le laver vite, tu connais la règle que nous avons mise en place. Je comprends que tu sois déçu ! Je suppose que la prochaine fois, tu ne l’oublieras pas. »

Une fois que l’équilibre dans la maison évolue, que les enfants participent plus aux tâches qui les concernent, et qu’ils comprennent ainsi mieux le concept de responsabilité, nul doute qu’ils seront plus ouverts et plus réceptifs à la réunion de travail que nous évoquions plus haut !

Et petit à petit, ce foyer verra se développer plus de respect pour le rôle de chacun.

Aujourd’hui, je voudrais explorer une des multiples manières de baisser le niveau d’affrontement dans la maison.
Celle de prendre le concept d’éducation positive à la lettre : en évitant de dire non !
Ah, je sais que je fais peur… vous croyez que je vais vous dire de dire oui à tout !

Mais non, mais non (sans référence à Henri Salvador, souvenir perso très fort), je vous suggère seulement d’arrondir les angles…

Je vous donne des exemples :
« Je peux avoir des céréales ?
– oui, tu en auras demain au petit-déjeuner. »
« Je voudrais aller au parc !
– hum.. on pourrait y aller samedi ! »
« Je veux jouer avec les légos
– Bien sûr, tu pourras y jouer après le bain »

Ca peut aussi être un « non » implicite en évoquant simplement la règle.

Par exemple, chez nous, le jour du film est le mardi.  Alors, si en rentrant de l’école, mon fils me dit « Je peux voir un film ? », il me suffit de répondre : « On est jeudi aujourd’hui. », ou encore mieux : « Quel jour on est ? », ce qui lui permet de conclure tout seul…

Si vous devenez sensible à ces manières de répondre, vous verrez vite que les cas d’application sont nombreux.

C’est moins frontal, moins brutal, et croyez-moi, ça aide à l’ambiance générale !

Et si vous voulez d’autres manières d’arrondir les angles, je vous suggère de lire mon article sur comment éviter les luttes de pouvoir. Il vous inspirera probablement !

En général, les parents veulent des enfants obéissants. Depuis que je me suis mise à étudier la parentalité positive, et à réfléchir plus profondément, ce n’est plus mon cas.

Et j’ai de bonnes raisons pour ça.

La raison la plus simple, et peut-être celle qui vient le plus facilement à l’esprit, c’est que ça tue la créativité, la spontanéité…

Mais non, ce n’est pas ça. C’est encore plus profond.

En fait, ça tue le sens de la responsabilité.
(Pour cet éclairage, merci Thomas Gordon – était-ce dans Parents efficaces, ou dans Eduquer sans punir ? J’ai eu cette idée maladroite de commencer les 2 à la fois, ne sachant lequel choisir, et je me mélange… Mais je vais les reprendre au calme, en faire des résumés, et tout se remettra en place !)

Eh oui, pensez-y : si on ne fait qu’obéir, alors on ne décide pas, n’est-ce pas ? Donc, ce n’est plus vraiment de notre responsabilité… C’est l’argument avancé par la grande majorité des nazis lors des procès de Nuremberg : ils ne faisaient qu’obéir aux ordres.

Et cela fait partie de la nature humaine : si on obéit à la figure d’autorité, alors cela ne relève plus de notre responsabilité…

Vous connaissez l’expérience de Milgram ?

Cette expérience, menée aux US dans les années 60 pour mesurer la faculté de soumission à l’autorité, consistait à mettre les participants face à un choix entre la morale et l’obéissance…

En effet, on les met devant une table de commande qui envoie des décharges à une autre personne attachée sur une chaise électrique. Le voltage est à augmenter à chaque fois, et les participants prennent note de la réaction. Au début, pas grand chose. Au fur et à mesure, la personne attachée – un acteur (!) mais la personne aux manettes ne le sait pas – réagit de plus en plus fortement, jusqu’à des hurlements suppliant d’arrêter, et même l’évanouissement… Seulement, quand celui qui a envoie les décharges veut arrêter (ce qui arrive dans tous les cas), l’expérimentateur présent, vêtu d’une blouse blanche, lui demande de continuer. Alors… il continue ! Près des 2/3 des participants vont ainsi jusqu’à infliger à plusieurs reprises le voltage indiqué « attention, choc dangereux » !! (Si vous voulez voir l’expérience, vous la trouverez ici)
Et quand on leur demande ensuite ce qui les a retenus de s’interrompre, ils répondent… « j’obéissais ».  L’obéissance les a privé de leur responsabilité…

Ces exemples peuvent sembler poussés, mais pensons-y bien… Ne l’avons nous pas déjà vécu avec nos enfants ? Ne vous êtes-vous jamais trouvés dans une position où, après une bêtise, vous leur avez demandé :
“Mais enfin… pourquoi avez-vous fait ça ?
– c’était SON idée !”

Alors on s’entête dans ces moments-là à leur dire que ça a beau être l’idée de l’autre, ils avaient bien le choix de ne pas s’exécuter : “S’il te demandait de sauter d’un pont, tu le ferais ??”

Ah oui, là, on peut le leur dire, mais qu’est-ce qu’on leur a demandé jusqu’ici : d’obéir à la figure d’autorité que nous sommes !! De ne pas se poser de question, mais de suivre les ordres donnés. Il est probable que le copain qui les a entraîné ait, par force de caractère, une certaine autorité lui aussi… Alors, ils obéissent, et, du même coup, ils perdent le sens de la responsabilité !!

Pensons-y la prochaine fois qu’on leur demande d’obéir…

“L’obéissance, c’est faire ce qu’on nous demande, peu importe ce qui est bien ; la morale, c’est faire ce qui est bien, peu importe ce qu’on nous demande…”

J’ai l’impression que certains parents ont parfois du mal à faire la différence entre la bienveillance et la permissivité. Ce n’est probablement pas parce qu’ils pensent qu’il faut être permissifs, mais plutôt parce qu’ils commencent à mieux comprendre leur enfant. Ils ne veulent plus les “brimer” comme ils avaient tendance à le faire avant. Ainsi, ils sortent du mode autoritaire, mais ne connaissent pas encore d’autre alternative.

En fait, cela dépend de la façon dont on est « tombé » dans la parentalité positive…

En France en particulier, les parents qui s’y intéressent commencent souvent par lire Isabelle Filliozat (“J’ai tout essayé !”, “Il me cherche !”, Au coeur des émotions de l’enfant).

Ses livres sont en effet sources d’éclairages sur le fonctionnement de l’enfant. En lisant les livres d’Isabelle Filliozat, on comprend que l’enfant ne fait pas de caprices, qu’il y a de vraies raisons derrière son comportement.

On l’apprend également quand on lit Catherine Gueguen, de manière plus scientifique. Oui, les neurosciences ont prouvé que les punitions et humiliations n’aidaient pas le développement du cerveau. On ne peut plus en faire fi.

Ainsi, on apprend à considérer les moments difficiles avec plus de bienveillance, et c’est un premier pas fondamental, parce que nous adaptons nos attentes. Comme on peut le lire dans Parents respectueux, enfants respectueux : “Quand ce que vous voyez et entendez n’est pas conforme à l’image que vous vous faites de ce qui devrait être, la différence entre votre idéal et la réalité stimule des émotions en vous.”
Et voilà pourquoi on se met en colère !! Parce que ce que nous voyons n’est pas conforme à l’image que nous nous faisons de ce qui devrait être.

Un regard plus bienveillant nous permet de changer notre idée de ce qui devrait être, et l’on se met naturellement moins en colère.

Et c’est déjà une vraie réussite. Non seulement pour le moment où on comprend mieux et qu’on ne s’énerve pas, mais aussi parce qu’on entre dans un cercle vertueux : le niveau de stress baisse, l’ambiance est plus détendue, les situations de conflits se présentent moins.

Cependant, ce n’est pas suffisant.

Parce que c’est une chose de mieux comprendre l’enfant, d’être plus tolérant envers lui, de le considérer avec bienveillance, mais il s’agit ensuite de savoir comment lui parler de nos propres besoins, de savoir poser nos limites, également avec bienveillance.

Si on reste à la première étape, on n’entre plus dans le jeu des punitions, mais on ne sait pas non plus comment faire autrement, alors on tombe dans la permissivité, et à terme, ce n’est pas beaucoup mieux, parce qu’on devient malheureux quand nos besoins s’effacent trop, et l’enfant, qui ne trouve pas sa place sociale dans la famille, celle qui prend en compte les besoins de chacun et pas seulement les siens, n’est pas beaucoup plus heureux…

Comment éviter le piège de la permissivité ?

Il est donc nécessaire, à mon sens, de développer également des compétences pour savoir comment susciter la coopération ; savoir, comme le dit Jane Nelsen dans la discipline positive, se connecter avec son enfant pour être en position d’enseigner ; savoir résoudre les problèmes avec lui, en prenant en compte les besoins de chacun…

C’est pourquoi j’encourage de tout coeur les parents qui prennent ce chemin à ne pas se limiter à Isabelle Filliozat, mais à lire également

… pour ne pas adopter une éducation permissive, mais bien une éducation positive, ce qui est loin d’être la même chose…

“Le besoin essentiel de tout être humain est d’appartenir et d’avoir de l’importance.”

Ceci est un des principes exposés par Adler, un psychologue autrichien du 20è siècle, et je suis impressionnée par la manière dont ses principes résonnent dans l’éducation positive. (Si vous voulez en savoir plus, vous pouvez aussi consulter cet article sur les principes adlériens – fondateurs de la discipline positive)

Appartenir ?

Appartenir, ça se rapporte à la place de l’enfant dans la famille et à sa connexion émotionnelle avec les autres. En bref, l’enfant a besoin d’attention !
On en parle souvent, et c’est fondamental, parce que si l’enfant n’obtient pas d’attention positive, il va quand même l’obtenir, de manière négative, par son comportement.
(Développer son sentiment d’appartenance, c’est d’ailleurs une des compétences relationnelles clefs présentées par Elizabeth Crary dans Arrête d’embêter ton frère, laisse ta soeur tranquille.)

Bien, comment peut-on aider l’enfant à développer son sentiment d’appartenance ?
En lui donnant de l’attention bien sûr. Ce qui peut se décliner de manières différentes :

  • l’écouter quand il nous parle (et poser son téléphone portable…)
  • valider ses sentiments, ce dont nous avons déjà beaucoup parlé…
  • lui consacrer des moments particuliers (si possible en tête à tête pour qu’il n’ait pas à entrer en compétition pour obtenir notre attention : voir à ce sujet le moment particulier)

Avoir de l’importance ?

Avoir de l’importance, c’est se sentir capable et utile. Contribuer à la société. Ca passe par l’autonomie de l’enfant, par sa contribution à la famille.

Oui, il est important que les enfants se sentent capables : il est nécessaire pour cela de les laisser exercer leur part d’autonomie. De les laisser faire seuls ce qu’ils peuvent faire seuls. Aider quelqu’un, c’est parfois gentil, c’est parfois débilitant. Il risque de recevoir le message qu’il n’en est pas capable…

Alors que l’enfant est en pleine construction de son caractère, il risque de recevoir le message erroné qu’il n’a de l’importance que lorsqu’on s’occupe de lui… Est-ce ce qu’on veut pour lui ?

Laissons-le agir, laissons-le se prendre en charge, et encourageons-le à contribuer.

« On aide mieux en aidant moins » « écrivait Haïm Ginott.

Et puis, avoir de l’importance, c’est aussi exercer son pouvoir personnel.
Eh oui, on en parle moins, mais c’est également fondamental : un enfant a un vrai besoin de pouvoir !
C’est ce qui lui permet de se construire comme une personne à part entière, autonome et sachant exercer son libre arbitre.
Quand on passe notre journée à lui donner des ordres qu’il est censé exécuter sans discuter, on ne lui offre aucun pouvoir, et il y fort à parier qu’il entrera alors dans ce qu’on appelle à juste titre des luttes de pouvoir !!
A l’inverse, plus nous donnerons l’occasion à l’enfant d’exercer son pouvoir de décision, plus nous lui permettrons d’être utile, plus il se sentira avoir de l’importance, et cela se ressentira sur son comportement.

Comment l’aider sur ce point-là ?
Ce pouvoir personnel peut être transmis sur plusieurs fronts :

  • par l’autonomie (plus il fait seul, et plus il se sent capable)
  • par la contribution dans la famille : ne pas hésiter à lui confier une tâche, ou à lui demander de l’aide
  • par les décisions qu’on le laisse prendre (à longueur de journée)

Et c’est là que nos compétences interviennent : c’est une chose de comprendre qu’il est bénéfique de laisser l’enfant prendre des décisions, mais encore faut-il savoir comment on peut faire ça ! Heureusement, il existe des techniques.
On peut en trouver un bon résumé dans le chapitre “Communiquer sans imposer” de Poser des limites à son enfant (Catherine Dumontheil Kremer)

Un nouveau regard sur l’enfant

Comprendre ces nécessités de bases, c’est poser un nouveau regard sur l’enfant.
Car les comportements ont un objectif.
Ainsi, voici un autre énoncé d’Adler  “Un enfant qui se comporte mal est un enfant découragé.”
(Lien vers l’article sur l’enfant découragé ici)

Le message inconscient de cet enfant est donc : “Je n’ai pas l’impression d’appartenir ni d’avoir de l’importance, et je ne sais pas toujours comment faire pour changer les choses.”

Ca change la perspective, pas vrai ?

Lors de mon atelier de la semaine dernière, une maman a dit qu’elle voyait ses enfants comme des toiles vierges, sur lesquelles nous étions en charge de peindre nos valeurs et le reste…

L’image m’est restée un moment en tête.. J’adore les métaphores, mais quelque chose me gênait dans celle-ci… Et puis j’ai compris. Je préfèrerais le tourner ainsi :

Les enfants sont peut-être des toiles vierges, mais je pense que notre rôle se limite à leur offrir des couleurs. A eux de choisir lesquelles ils veulent utiliser !

Lisez-vous les contes de fées classiques à vos enfants ?

Je me rends compte que les miens manquent de références dans ce domaine…
Parfois, certaines histoires font une allusion au Petit Poucet, au Petit Chaperon Rouge, et mes enfants ratent complètement l’allusion !
Pourquoi ? Parce que je déteste ces contes de fées !!

Voyons… Quel modèle donnons-nous à nos enfants en leur lisant le Petit Poucet ? On lui enseigne que des parents qui n’ont plus le sou vont abandonner leurs enfants dans la forêt… Que les ogres aiment manger les enfants… et qu’ils n’hésitent à leur couper la gorge pendant la nuit (si, si, rappelez-vous, le Petit Poucet s’est montré malin, il a encouragé ses frères à mettre les bonnets de nuit des filles de l’ogre, de sorte que celui-ci a en fait tranché la gorge de ses filles…), mais tout est bien qui finit bien, puisque les enfants finissent par voler l’argent de l’ogre (parce que les gentils ont le droit de voler les méchants), et qu’alors, avec de l’argent, les parents sont contents de les revoir !
Non merci, j’aime mieux qu’ils ratent les références…

Alors, quand je lis dans Au coeur des émotions de l’enfant, qu’Isabelle Filliozat s’en écarte également, je me sens plus sûre de moi. Ces contes créent de la peur chez les enfants encore en construction…

Aujourd’hui, l’image du loup dans les histoires est bien changée, alors penchons-nous sur ces histoires nouvelles, et oublions pour le moment les contes traditionnels !

Et si vous faites face à des peurs, liées ou non aux contes de fées, je vous encourage à lire les conseils donnés par Isabelle Filliozat pour aider l’enfant à traverser ses peurs

« Pourquoi on tombe ? Pour apprendre à se relever ! »
En voilà une phrase inspirante !

Seulement voilà, je commence à me demander si nous sommes en danger de ne plus apprendre… Parce qu’on ne laisse plus les enfants tomber…

Il y a une dizaine de jours, j’ai voulu organiser un dimanche matin sympa pour les enfants, parce que leur papa était en déplacement. J’ai donc pris mes 4 petits (et grands) sous le bras (enfin… puis-je encore dire ça, même de façon imagée, quand le grand est plus en position de me prendre sous le bras que le contraire ? Bref), et les ai amenés au nouveau parc super chouette qui s’est ouvert il y a quelques mois pas très loin de chez nous !

J’y étais déjà allée avec les petits, mais on était resté avec quelques amis dans une certaine zone du parc. Cette fois, je pensais que tous allaient y trouvaient leur compte.

Dès le départ, c’est surprenant : il y a du personnel pour surveiller la façon dont ça se déroule à chaque installation… L’installation phare, c’est la grosse « toile d’araignée », à laquelle les enfants grimpent. Je me souviens avoir amené Oscar à une installation similaire il y a des années à Paris (peut-être au jardin d’acclimatation ?). Enfin, les enfants sont bien sûr attirés par les cordages !

Autour de cette toile, il n’y a pas moins de 3 personnes qui surveillent ! (qui ne surveillent pour l’instant personne, parce que comme nous sommes venus à l’ouverture, le parc est encore vide, elles sont donc très disponibles pour se focaliser sur mes enfants.)

Léon s’attaque aux cordages du bas.
Le personnel l’arrête : interdit ! Il faut avoir 8 ans pour grimper !
8 ans ??? Mais il y a des cordes super basses ?? C’est parfait justement pour que les plus jeunes essayent !! (Surtout que le sol est de ces nouveaux sols un peu mous qu’ils mettent dans les parcs, alors ils ne risquent pas de se faire bien mal en tombant de bas…)

Alice commence à grimper de son côté.
Le personnel l’arrête : interdit ! Il faut avoir des chaussures fermées !

Oscar grimpe. Ouf… A 14 ans, avec des tennis, il a le droit.
Oui, mais quand il arrive en haut…
Le personnel l’arrête : interdit ! Il ne faut pas dépasser la dernière plate-forme !
Je deviens tendue… Rien ne bloque physiquement l’accès après la dernière « plate-forme »… Il n’y a même pas un panneau qui indiquerait cette limite… Le personnel du parc va donc passer la journée à regarder les enfants qui grimpent et leur crier de ne pas atteindre le haut ??

Bon… après une petite conversation avec la surveillante, je préfère changer d’endroit.

Nous arrivons sur des balançoires en forme de soucoupes.
Oui mais… Léon se met debout dessus (en se tenant aux cordes), pour tester le mouvement.
Le personnel l’arrête : interdit ! On doit rester assis !

Je n’en peux plus… S’ensuit toute une conversation sur les risques pris par les enfants, la surprotection, comment font-ils avec les tout petits qui apprennent à marcher ? Leur disent-ils de rester assis pour être sûr qu’ils ne tombent pas ???

Une chose est sûre : je ne reviendrai pas dans ce parc !

La semaine dernière, j’ai écrit une petite anecdote sur la page Facebook des 6 doigts de la main, une de ces anecdotes qui me ramène encore à la raison pour laquelle je me suis lancée dans cette aventure de partager tout ce cheminement avec vous !

Je ne pensais pas que ça intéresserait tant de personnes, mais il y a eu en fait beaucoup de réactions. J’ai donc décidé de le recopier ici, pour le garder… (et pour ceux qui n’ont pas Facebook)

Pourquoi je fais ça….
Ce matin, je suis posée au Starbucks pour travailler. (Je suis en train de (re)lire un livre d’Elizabeth Crary, pour en faire le compte-rendu détaillé sur le blog.)
A côté de moi, une famille. La mère, 3 enfants, et les grands-parents. Le jeune garçon semble incontrôlable. Il parle tres fort, cherche à partir, sa grand-mère lui dit fermement « Sit ! » (Ils sont américains). Sa mère le rappelle: « Stay here! »
Rien n’y fait…
Bien sûr, le bruit me dérange, mais surtout, je remarque, encore une fois, qu’être parent n’est pas une compétence innée. Cette mère est clairement débordée, elle ne sait pas comment faire face à son garçon, n’a pas appris d’autres compétences que celle de donner des ordres.
Mais remettons les choses en place : est-il raisonnable de demander à cet enfant (3 ans..) de rester en place sur sa chaise pendant qu’elle consulte infiniment son téléphone ?
(Je passe sur le modèle que ça donne pour les enfants : elle est avec ses propres parents, mais elle ne parle pas avec eux, elle chatte avec ses amis…)
En est-il seulement capable ? Cet enfant s’ennuie clairement !
Alors, parce que les cris me pèsent, me tendent, tant pour lui que pour elle, je m’approche du garçon avec un papier et un stylo. Je lui demande s’il sait écrire une lettre. Il prend le stylo, dessine un bâton, et un carré.
Je décris : « Ah, tu fais un bâton, tu fais un carré. Et je vois que tu te sers de ton autre main pour tenir le papier, pour qu’il ne bouge pas pendant que tu écris. »
Il continue, fait 5 petits caractères (qui n’ont rien à voir avec des lettres, mais qu’importe…), et me tend le papier. Je m’intéresse, lui demande : « Laquelle tu préfères ? ». Il est content.
Je lui propose de garder le papier. Il acquiesce. Je pose le stylo à côté de lui, et lui dis : « Je le laisse, comme ça, si tu veux, tu peux encore t’en servir. » Et je retourne travailler.
Le petit prend le stylo, se penche sur son papier, et s’absorbe dans sa nouvelle tache. Le calme est revenu.
J’aimerais pouvoir donner une carte de visite à cette maman ! J’aimerais pouvoir l’aider à prendre du recul sur la situation !
En tout cas, de nouveau, je sais pourquoi je me suis lancée dans cette aventure de vouloir partager mon cheminement ! On a tous tellement à apprendre…

Je suis fière d’avoir commencé à animer des ateliers pour parents, et surtout ravie de voir que les parents sont contents de ce à quoi ils réfléchissent pendant les séances, ce qu’ils essayent à la maison, même si ce n’est pas toujours facile, même si c’est parfois désespérant…

Ce matin, nous avons parlé de ce qu’ils avaient réussi à faire chez eux pour obtenir la coopération de leurs enfants, suite à l’atelier de la semaine dernière qui tournait autour du chapitre 2  de Parler pour que les enfants écoutent, écouter pour que les enfants parlent , et il s’avère que la compétence qui les a le plus aidés est « le dire d’un mot« .

Il est clair que cette technique évite bien souvent le long discours usant, tant pour nous que pour les enfants, qui, en fait, savent déjà de quoi il retourne. Je suis ravie de constater que d’autres ont moins de mal que moi à la mettre en pratique !