« Il se passe quelque chose en nous qui nous dépasse, et dépasse la réalité des faits reprochés à l’enfant. Avons-nous des réactions intenses parce que nos enfants exagèrent ou exagérons-nous leur faute pour justifier l’intensité de notre réponse émotionnelle ? »

Cette phrase, issue du livre d’Isabelle Filliozat : Il n’y a pas de parent parfait m’a vraiment laissée songeuse…

Car, c’est certain, face à nos enfants, nous avons une forte tendance à la dramatisation.

L’un de nos amis renverse son verre de vin pendant le dîner, et nous le rassurons : « Ce n’est pas grave ! ». Si nous-mêmes renversons quelque chose, ma foi, ça arrive… Lorsque c’est le fils de notre copine, bon, il est petit, on est encore maladroit à cet âge… Mais si c’est notre enfant, alors on réagira, parce que franchement, il pourrait faire attention !!

Pourquoi est-ce le seul à ne pas avoir le bénéfice de notre tolérance ?

Son verre renversé sera la déclencheur de notre colère, et nous aurons face à lui un comportement probablement démesuré !

Cet été, alors que nous devions préparer les valises en prévision d’un changement d’endroit, j’avais du mal à mobiliser tous les enfants. Etrangement, ils étaient plus intéressés par l’idée de jouer aux legos que de mettre leurs vêtements dans la valise, et de vérifier que rien ne trainait sur les lits….

Ma frustration montait donc, jusqu’au moment où je me suis disputée avec mon grand. Et, avant de prendre le recul nécessaire pour l’analyser, j’étais persuadée qu’il avait exagéré ! Que, certes, je ne devrais pas m’énerver, mais qu’en même temps, il avait vraiment laissé traîner ses chaussures !!

Un moment plus tard, j’ai bien compris que laisser traîner ses chaussures n’était probablement pas si répréhensible… Que dans le fond, j’étais moi-même stressée par une situation qui n’avait rien à voir avec les enfants, et que je sortais mon stress en m’en prenant à lui !

Je tombais donc complètement dans ce qu’écrivait Isabelle Filliozat : « Exagérons-nous leurs fautes pour justifier l’intensité de notre réponse émotionnelle ? ». Oui ! Complètement !

Alors, la question se pose : pourquoi se l’autorise-t-on ?

En fait, je pense que c’est lié à cette notion de figure d’attachement. Vous savez : l’enfant est en sécurité avec sa figure d’attachement, qui ne le rejettera pas. Il peut donc exprimer son stress en toute liberté. Et cela explique pourquoi les petits pleurent lorsqu’on les retrouve, alors qu’ils se comportaient « si bien » avec la personne qui les gardait !

Eh bien, je pense que c’est également valable dans l’autre sens ! Nous sommes en sécurité face à nos enfants.. ainsi, nous pouvons exprimer notre stress, nous en prendre à eux, et ils ne nous rejetteront pas.

Oui, nos enfants sont ce que nous avons de plus cher au monde, mais ils sont également ceux qui subissent nos plus grosses colères !! Paradoxal ? Un peu…

Je reprends encore, parce que je crois que ces phrases valent la peine d’être réfléchies : « Il se passe quelque chose en nous qui nous dépasse. » 

C’est bien cela. On ne choisit en général pas consciemment de se mettre à crier. Cela nous dépasse. Et en général, cela « dépasse la réalité des faits reprochés à l’enfant. »

Alors, ai-je la solution ? Non. Au fur et à mesure du chemin, de l’analyse, de la maîtrise d’outils de parentalité positive, les colères diminuent, les cris décroissent, et l’harmonie se développe. Mais je sais qu’il y aura encore et toujours des moments ainsi. Ou cela nous dépasse.

En revanche, je m’engage à me poser explicitement cette question, lorsque cela m’arrive : « Avons-nous des réactions intenses parce que nos enfants exagèrent ou exagérons-nous leur faute pour justifier l’intensité de notre réponse émotionnelle ? » et être honnête avec moi-même.

Au besoin, savoir revenir vers l’enfant, comme je l’ai fait cet été, pour partager cette réponse avec lui : « Je suis désolée de l’intensité de ma réaction. En fait, c’est difficile pour moi en ce moment parce que… (on explique ou pas, en fonction des faits, et de l’âge, moi, à ce moment-là, j’avais choisi de l’expliquer à mon fils de presque 15 ans), et ça n’avait rien à voir avec toi. »

Parce que nos enfants apprennent par l’exemple. C’est le mieux qu’on puisse leur offrir.

Note : cet article existe également en version podcast, si vous voulez l’écouter en déplacement….

Les neurosciences sont formelles : laisser pleurer un enfant le met en situation de stress, et ce n’est pas bon pour son cerveau.
Pour autant, nous voudrions que notre enfant puisse apprendre à faire face à la vie, peu à peu sans notre aide. Comment trouver le bon équilibre ?

Nous sommes en vacances, en pleine visite de ville avec des amis.
Nos plus jeunes sont contents d’être ensemble, ils courent devant.
Mais… aïe ! La fille de nos amis (3 ans) n’a pas vu le trou, elle trébuche… et pleure.
Son père la prend dans ses bras, et, à ma surprise, la garde dans les bras jusqu’à ce que nous arrivions à la station de métro, quelques minutes plus tard.

Le lendemain, avec les mêmes amis, nous montons admirer une église au sommet de la colline. Encore une fois, les enfants courent devant… et la petite trébuche encore ! Elle se met à pleurer, se retournant vers son père… qui la prend immédiatement dans ses bras, et, de nouveau, la porte pendant plusieurs minutes sur la suite du chemin.

La présence de son père rassure cette petite fille, c’est évident.

Pourtant, cette scène me soulève des interrogations :
La ligne est fine entre être là pour son enfant, et être trop là pour son enfant !

Vous me connaissez, je ne vais certainement pas dire qu’il faut faire semblant de rien quand cette petite fille pleure, ou lui dire “ce n’est rien !”. Non, il n’est pas question de nier son ressenti. Je crois pourtant qu’elle aurait peut-être seulement eu besoin d’un regard, d’une phrase “Mince, tu es tombée !”, et qu’elle serait repartie avec enthousiasme.

En la prenant systématiquement dans les bras, je me demande dans quelle mesure elle ne pourrait pas interpréter l’aide de son père comme “Je ne peux pas me relever seule. J’ai besoin d’aide. J’ai besoin de mes parents.”

Par nos attitudes et nos réactions, nous passons à chaque fois un message implicite à nos enfants. M’interroger sur le message est une des méthodes qui m’aide le plus à avancer vers la parentalité que je souhaite. Parce que pour aller dans la bonne direction, il s’agit d’abord d’être conscient de ce que l’on cherche à faire passer.

Cet épisode est l’occasion d’une discussion passionnante (comme toujours) avec la mère de cette petite fille, une amie.
Nous sommes d’accord que la ligne est fine….

Consoler son enfant, ne pas le laisser pleurer seul, et en même temps ne pas lui passer un message d’incapacité, lui donner confiance en sa propre force, en son aptitude pour se relever et continuer ! Quel exercice difficile !

Cette histoire s’est déroulée il y a des mois.
Elle me revient en mémoire à la lecture de Il n’y a pas de parent parfait, d’Isabelle Filliozat.

En effet, l’auteure y parle d’une maman qui “se plaint de ne pas arriver à consoler sa fille de dix-huit mois quand elle pleure.” L’observation des interactions entre la maman et sa fille montre en fait que la petite fille se console très vite, puis se remet à pleurer, encore dans les bras de sa maman. “En fait, écrit Isabelle Filliozat, pour l’observateur extérieur, il est évident qu’elle garde tout simplement sa fille trop longtemps dans ses bras.”

Voulant être une bonne mère, elle répond au schéma qui veut que la bonne mère prend son enfant dans ses bras quand il pleure, et, en retour, sa fille se retrouve “prisonnière de sa fidélité envers sa maman.” Alors qu’à 18 mois, “elle n’a besoin que d’un petit câlin de réconfort.”

La maman met alors ce nouveau conseil en pratique, ne gardant sa fille contre son épaule que quelques instants, puis la tournant vers l’extérieur dès que les pleurs commencent à se calmer. La petite fille est alors ravie de reprendre son jeu.

On parlait de ligne fine… c’est délicat, n’est-ce pas ?
Essayer d’être un “bon parent”, sans oublier de laisser l’enfant trouver sa propre place…

Et vous, avez-vous l’impression de bien identifier le moment où les bras ne sont plus utiles ?

Dans un couple, il y a régulièrement des conflits quant à la discipline à mettre en oeuvre face aux enfants.

Depuis que j’accompagne des parents our le chemin de la parentalité positive, qui demande de remettre pas mal de nos idées reçues en question, j’ai vu bien des cas où les parents ne sont pas en ligne. Evidemment, cela complique d’autant plus la mise en place d’un mode alternatif.

S’il est vrai qu’il n’est pas nécessaire que les parents soient toujours en ligne et « fassent front » face aux enfants, comme on avait tendance à le dire avant, il n’en reste pas moins qu’un parent qui cherche à changer ses façons de faire aura particulièrement de mal à le faire s’il avance seul, voire à contre-courant de son partenaire !

Malheureusement, il n’est pas rare de voir un des parents s’accrocher à des méthodes disciplinaires qui ont « fait leurs preuves » (leurs preuves qu’elles ne marchaient pas, en fait…), et imposer ce qu’il pense savoir. Tandis que l’autre, qui touche du doigt un autre modèle, doute. Et le doute ne permet pas d’imposer.

On touche à une certaine relation de pouvoir dans le couple, cette fois : qui peut imposer son mode de fonctionnement à l’autre ?

Dans Il n’y a pas de parent parfait, Isabelle Filliozat soulève un paradoxe qui me semble particulièrement intéressant : elle observe que c’est souvent le parent le plus présent auprès de l’enfant qui remet les schémas reçus en question. Parce que ses principes se heurtent à la réalité. Parce qu’en faisant vraiment face à l’enfant, il ne peut ignorer ses réactions, son état émotionnel. « Mais, hélas, c’est fréquemment l’autre qui a le pouvoir dans le couple. Parce que c’est lui qui travaille à l’extérieur et ramène l’argent. » écrit Isabelle Filliozat. Si c’est un peu caricatural, ce cas de figure reste cependant fréquent dans notre société qui reste encore très patriarcale…

Nous arrivons donc bien devant un paradoxe : le parent absent sait comment les enfants s’éduquent en théorie, alors que le parent présent doute, et a du mal à imposer son point de vue. 

Face à ce constat, que peut-on faire ?

  • De la communication ! Au fur et à mesure que nous avançons sur notre chemin, partageons nos doutes et nos interrogations. Chez nous, lorsque j’ai pris conscience du tournant éducatif que j’étais en train de prendre, j’ai compris que j’avais besoin d’être accompagnée et soutenue dans cette démarche. Nous avons alors mis en place, Nicolas et moi, des « réunions éducation » hebdomadaires, pour que je lui parle de mes dernières lectures, et de comment elles s’appliquaient à nos enfants.
  • Exprimer notre demande d’aide : Quand on cherche à être sévère face à un enfant, on demande le soutien de l’autre, afin qu’il ne « sape » pas notre autorité. Essayons de faire de même quand on cherche à se connecter à son enfant : demandons de ne pas être interrompus, pour ne pas nuire à ce processus.
  • Amener l’autre à se heurter à la réalité : en le laissant en charge. S’occuper des enfants est beaucoup plus éprouvant que ce que ceux qui le font peu peuvent penser. Je ne dis pas que travailler dans un bureau n’est pas fatigant. Mais c’est émotionnellement beaucoup moins dense. Si le moins présent des parents pouvait passer une semaine seul en charge des enfants, il est fort probable que ses principes seraient ébranlés…
  • Observer des situations qui ne sont pas les nôtres. Lorsque nous sommes impliqués, il est toujours très difficile d’être objectif. Si nous saisissons les opportunités de la vie quotidienne pour observer les autres familles, nul doute que nous trouverons de quoi illustrer nos propos sans mettre en cause l’autre parent. C’est parfois beaucoup plus facile d’avoir un point de vue extérieur, et on peut en tirer un bon enseignement !
  • Enfin, enseigner par l’exemple. J’ai vu des cas où le parent réticent à lire ou même à écouter est amené à changer malgré tout en constatant le changement de dynamique dans la relation des enfants à son conjoint. La difficulté de cette méthode réside dans le fait que cela nécessite d’être fort, de croire suffisamment en soi pour suivre notre chemin, indépendamment de l’autre, en espérant qu’il évolue peu à peu. Pas facile…

Quoi qu’il en soit, et même si l’idéal est bien sûr d’avancer à deux, restez persuadé(e) qu’il vaut mieux pour l’enfant avoir un parent qui l’écoute, plutôt qu’aucun…

Dans ce chapitre de La discipline positive, Jane Nelsen nous encourage à analyser les comportements inappropriés (notez bien l’expression : non pas « mauvais comportements » mais « comportements inappropriés ») pour en comprendre les causes et les décoder au lieu de n’y répondre qu’en surface. Et rien que le fait de les considérer sous un autre angle nous aidera !

Pour commencer, nous sommes invités à assumer notre part de responsabilité.

Je trouve ce point particulièrement intéressant, car il est rarement soulevé ainsi.

En effet, Jane Nelsen rappelle que l’adulte participe au comportement inapproprié de l’enfant. Je sais, ce n’est pas facile à accepter, c’est pourtant très vrai ! Notre réaction face à nos enfants, et même parfois nos actions face à nos enfants ont une influence sur leur comportement également ! Ainsi, « s’ouvrir à une responsabilité partagée » nous aidera à mieux aborder le reste.

Ensuite, l’auteure rappelle qu’un comportement inadapté peut être dû à une incompréhension, à une étape normale du développement de l’enfant, ou à un sentiment de découragement.

Dans ce dernier cas, il est fréquent que les interprétations erronées de l’enfant, dont nous avons parlé dans les principes adlériens, lui dictent son comportement dans le but inconscient d’atteindre un objectif mirage.

Je vais recommencer cette dernière explication, parce qu’elle est clef ici.

L’enfant a un besoin.

Disons par exemple qu’il a besoin d’être vu. De manière inconsciente en général. Son observation et son interprétation du monde l’ont conduit à penser qu’on ne le remarque que lorsque l’attention est centrée sur lui. Son objectif mirage est donc d’accaparer l’attention. Il est qualifié de mirage parce que ce n’est pas ce qui répondra réellement à son besoin, mais c’est bien ainsi qu’il voit les choses… Il adaptera donc inconsciemment son comportement pour atteindre cet objectif, agaçant le parent ou le prof, qui lui donnera ainsi toute son attention !

Lorsque j’ai lu pour la première fois ce chapitre, il y a de cela quelques mois, ce n’était pas très clair pour moi.

Cependant, entretemps, j’ai suivi une formation de « discipline positive dans la classe« , au cours de laquelle nous avons fait des exercices autour de ces objectifs mirages, et ça me parait être vraiment bien vu.

Les 4 objectifs mirages (définis par Dreikurs)

  • Accaparer l’attention
  • Prendre le pouvoir
  • Prendre une revanche
  • Confirmer sa croyance d’incapacité

Et, pour identifier quel est l’objectif mirage poursuivi par l’enfant, il s’agit d’observer ce qu’il suscite en nous !

Le livre présente ainsi une « grille d’identification des besoins cachés derrière les comportements inappropriés » qui est fort utile pour toute personne interagissant avec des enfants. C’est cette grille qui nous guidera pour ne pas adresser le comportement lui-même, qui n’est souvent que la partie émergée de l’iceberg, mais bien sa cause : le besoin inassouvi qui est immergé.

Parlons un peu plus de chacun de ces objectifs-mirages.

Accaparer l’attention

L’enfant cherche probablement à accaparer l’attention lorsque l’adulte se sent agacé, irrité…
La croyance erronée de l’enfant est « Je n’appartiens que si je suis au centre de l’attention ».
Son message codé est en fait : « Remarquez-moi, impliquez-moi ».
Que peut dans ce cas faire le parent ?
Il peut : confier une responsabilité à l’enfant ; planifier des « moments particuliers » ; instaurer des signaux avec l’enfant ; faire une recherche de solution avec lui !

Prendre le pouvoir

L’enfant cherche probablement à prendre le pouvoir lorsque l’adulte se sent défié, remis en cause dans son autorité.
La croyance erronée de l’enfant est « Je n’ai de sentiment d’appartenance que lorsque je suis en position de force ».
Je rappelle que toute personne, enfants inclus, a besoin d’une part de pouvoir.
Le message codé de l’enfant est : « Laissez-moi participer, donnez-moi des choix. »
Que peut dans ce cas faire le parent, face à l’enfant qui s’oppose ?
Il peut marquer un temps de pause, et penser à sa responsabilité dans ce comportement.
Valider les sentiments de l’enfant, offrir des choix, et l’impliquer dans les solutions.

Prendre une revanche

L’enfant cherche probablement à prendre une revanche lorsque l’adulte se sent blessé, déçu…
La croyance erronée de l’enfant est « Je n’ai pas de sentiment d’appartenance , je souffre mais je peux au moins rendre la pareille en faisant souffrir l’autre. »
On touche ici au besoin d’appartenance déjà évoqué dans le cas de l’attention ci-dessus, mais l’enfant n’a même plus de solution pour y répondre…
Le message codé de l’enfant est : « Aidez-moi. Je souffre intérieurement. »
Que peut dans ce cas faire le parent ?
Il est d’abord nécessaire de contrôler ses réactions pour briser le cycle de la revanche… Pas facile ! Le temps de pause revêt ici encore plus d’importance, pour réussir à analyser son ressenti, et à refléter les sentiments de l’enfant. Ici encore plus qu’ailleurs, il faut chercher à se reconnecter à l’enfant !

Confirmer sa croyance d’incapacité

L’enfant cherche probablement à confirmer sa croyance d’incapacité lorsque l’adulte se sent impuissant, démuni…
La croyance erronée de l’enfant est « Je n’arrive pas à appartenir ni à avoir de l’importance, ni à me sentir capable, c’est tout simplement impossible, je me désengage. »
L’enfant qui se désengage manque cruellement de confiance en lui. Il s’agira alors de l’accompagner étape par étape.
Le message codé de l’enfant est : « Ne me laissez pas tomber. Tendez-moi la main. »
Que peut dans ce cas faire le parent ?
Ne pas baisser les bras, enseigner les compétences sans faire à la place de l’enfant. Fixer des étapes intermédiaires. Encourager, encourager, en montrant que nous avons confiance dans les capacités de l’enfant !

Reste à intégrer cela…

Savoir identifier ces objectifs-mirages, et les distinguer l’un de l’autre peut se révéler très utile pour savoir comment répondre à un comportement inapproprié.

En effet, nous ne devrons pas réagir de la même manière face à un enfant dont l’objectif mirage est d’accaparer l’attention que face à celui qui cherche à confirmer sa croyance d’incapacité.

Comme vous l’avez vu ci-dessus, notre premier indice d’identification, c’est notre ressenti face au comportement de l’enfant.

Lorsque j’ai lu ce chapitre de La discipline positive pour la première fois, cela m’a semblé bien compliqué.

Depuis, il m’est arrivé plusieurs fois d’y repenser lorsque j’arrivais à écouter mon ressenti, et à me rendre compte à quel point cela semblait tomber juste !

Je ne sais pas toujours garder ce regard, chercher à décoder ainsi, mais j’avance chaque jour un peu plus sur ce chemin, comme vous je l’espère.

Remarque : Un peu plus tard, je retrouve, dans Parents respectueux, enfants respectueux , cette idée de chercher le besoin derrière le comportement (indépendamment des objectifs mirages).

Lors d’un de mes récents ateliers, l’une des mamans parle du fait qu’elle brosse encore les cheveux de sa fille de 13 ans tous les matins…
Nous poussons un peu l’analyse de la situation :
« Pourquoi la coiffes-tu toi-même ?
– Parce que sinon, j’ai beau le lui rappeler, elle ne le fait pas !
– Et quel est le problème si elle ne le fait  pas ?
– Elle aura les cheveux tout ébouriffés pour aller à l’école !!
– Et quel est le problème d’avoir les cheveux tout ébouriffés ?
– … Les autres vont penser que je suis une mauvaise mère… »

Ainsi, cette mère craint le jugement des autres sur sa fille, non pour ce que cela impliquerait pour sa fille, mais bien pour ce que cela impliquerait sur elle-même.

Au travers du jugement de nos enfants, nous nous sentons jugés en tant que parent…

Réfléchissons : si ma voisine sort avec des cheveux non brossés (aie, l’exemple est mauvais pour moi, parce que mes voisines ont en général les cheveux brossés, c’est moi qui ne les ai pas !! Qu’importe…), je ne me sentirai pas jugée comme mauvaise voisine. Non, parce que ma voisine et moi sommes deux personnes différentes, elle fait ses choix, je fais les miens. (En l’occurence, en général, celui de ne pas me brosser les cheveux, mais encore une fois, restons centrés sur la question.)

Pourquoi est-ce différent lorsque c’est un enfant ? Parce qu’on devrait avoir une influence sur eux, plus que sur la voisine ? C’est possible. On en a d’ailleurs.

Cependant, nos enfants sont quand même des personnes indépendantes. Si le fait d’avoir les cheveux brossés ou pas importe peu à cette fille, est-il juste d’en tenir rigueur à la mère ?

D’ailleurs, l’on ne sait même pas si le fait de se brosser les cheveux n’importerait pas à la fille, sa mère ne lui a pas laissé l’occasion d’en vivre l’expérience… Mais même si c’était le cas, la fille doit-elle nécessairement correspondre à ce que désire la mère ?

Dans l’introduction de Il n’y a pas de parent parfait, Isabelle Filliozat écrit : « Notre enfant est un peu notre miroir. Nous avons tendance à le considérer comme notre prolongement, comme une partie de nous. »

Je crois que le problème est là : s’ils sont une partie de nous, alors tout jugement sur eux est un jugement sur nous.

Je crois que pour les laisser être eux-mêmes, je dirais même pour les aider à être eux-mêmes, il nous faut réussir à accepter qu’ils ne sont pas une partie de nous. Qu’ils ne nous appartiennent pas. Qu’ils ne reflètent pas forcément ce que nous sommes.
Qu’ils sont eux, avec leurs propres qualités, et leurs propres défauts ; avec leurs propres forces et leurs propres faiblesses ; avec leurs valeurs et leurs envies, parfois alignées sur les nôtres, et parfois… non !

Au début de Elever nos enfants avec bienveillance, Marshall Rosenberg alerte sur le danger de l’étiquette « enfant ». Et ça encourage à la réflexion.

J’avais déjà rapporté son premier exemple lorsque nous discutions de la notion de respect, mais la relecture de ce petit livre me donne envie de le reprendre, ainsi que ses autres illustrations.

Le premier exemple donc, a trait au respect que les adultes ont tendance à montrer ou non, par défaut, à un enfant.

Ainsi, Rosenberg raconte que lors de ses ateliers de CNV (Communication Non Violente) pour parents, il commence souvent par scinder le groupe en deux, leur demandant de concevoir un dialogue autour d’une situation de conflit.
L’un des groupes a pour interlocuteur un enfant, l’autre un voisin. Mais lorsqu’ils se retrouvent, ils ne savent pas qu’ils ont travaillé avec des hypothèses différentes.
A chaque fois, le dialogue impliquant un enfant est moins respectueux. L’interlocuteur enfant est d’une certaine façon déshumanisé.

Dans son deuxième exemple, Rosenberg parle du peu de crédit qu’on donne parfois aux enfants. Ainsi, il raconte un jour où il est rentré fatigué et stressé chez lui, et où il a demandé un espace de calme à ses enfants. Face à son fils de 9 ans lui demandant : « Tu veux en parler ? », il n’a pu s’empêcher de penser qu’il était mignon, sans prendre sa proposition au sérieux. Puis, se rattrapant de justesse, et voyant enfin « un être humain tendant la main à un autre », il a accepté, et a longtemps parlé avec ses enfants de ce qu’il avait vécu ce jour-là, avant de danser avec eux ! Ses enfants étaient effectivement capables de lui apporter leur aide. Mais la considération de l’enfant comme un « enfant » a failli le lui faire oublier.

Enfin, comme dernier exemple de la manière dont cette étiquette peut nous faire oublier l’être humain qu’il y a derrière, Rosenberg réfléchit sur le rôle du parent.

On nous a appris qu’il était de faire en sorte d’obtenir certains comportements de la part de nos enfants. Mais c’est oublier que réclamer un comportement, exiger plutôt que de demander, est généralement une manière efficace d’obtenir que l’autre s’y oppose. Parce que tout être humain veut garder sa liberté, sa faculté d’exercer son pouvoir personnel !

Il me semble que nous rejoignons avec ce dernier exemple la discipline positive, qui recommande de connecter avant d’enseigner.

C’est repenser complètement la dynamique de la relation parent-enfant. Un nouveau modèle vers lequel nous cheminons. Tout doucement…

La parentalité positive parle de se débarrasser complètement des punitions ? Alors, comme ça, les enfants peuvent faire n’importe quoi sans que ça prête à conséquence ?? Non, ils ne le peuvent pas. On a dit qu’on s’affranchissait des punitions. Pas des conséquences. Les conséquences peuvent être, au contraire des punitions, une bonne manière de faire en sorte que les enfants assument leurs responsabilités. Mais pour cela, encore faut-il connaître la différence ! Je vais vous l’expliquer en reprenant les termes de Jane Nelsen, auteur de La Discipline Positive. Une conséquence est :
  • en Relation avec l’acte
  • Respectueuse
  • Raisonnable
  • Révélée en avance
Ce sont les 4 R de la conséquence. La conséquence est en Relation avec l’acte : probablement le point le plus important, celui qui donne la logique de la démarche : Priver son fils d’ipad parce qu’il a mal parlé à sa soeur, c’est une punition. Le priver d’ipad parce qu’il le laisse trainer après utilisation, ça peut être une conséquence. La conséquence est Respectueuse : il ne s’agit pas d’humilier l’enfant, de se moquer de lui. (Lui faire lécher le sol pour nettoyer ce qu’il a renversé n’est pas une conséquence, c’est une punition, parce que c’est humiliant. C’est carrément une violence en fait !!) La conséquence est Raisonnable : elle sera adaptée en particulier à l’âge de l’enfant. Faire payer le nouveau pull à son fils de 12 ans parce qu’il en a perdu 5 peut être raisonnable, lui faire payer tous ses pulls à vie ne l’est pas… La conséquence est Révélée en avance : ce point-là peut sembler difficile, mais c’est celui qui fait tenir le tout. Parce qu’on a prévenu l’enfant, il peut assumer la responsabilité de ses actes. Il connaissait la conséquence. Il savait que s’il perdait encore un pull, il devrait le repayer, il savait donc qu’il était de sa responsabilité d’y faire plus attention. (et pour cela, nous allons le voir, on peut essayer de l’aider avant, pour essayer de l’aider à réussir ! Car nous sommes dans son équipe !) Vous noterez au passage que si la conséquence doit être révélée en avance, c’est donc que ce n’est pas une décision hâtive, suite à un problème soudain. La conséquence n’est mise en place que pour des situations qui se répètent, et que nous avons donc anticipées ! Parce qu’on a aussi tous le droit à l’erreur, nos enfants y compris. Si votre fils arrache les fleurs du voisin, il ne sera pas puni, et la conséquence n’aura pas été prévue (car vous ne l’aviez pas anticipé, à moins qu’il ne fasse ça toutes les semaines…). Non, dans ce cas c’est une erreur et donc, comme nous l’avions vu dans les principes adlériens, une opportunité d’apprentissage.  Il s’agira alors plutôt de mettre en place avec lui une démarche de réparation. Maintenant, allons un peu plus loin dans la connaissance de la conséquence. Il existe deux types de conséquences : les conséquences naturelles, et les conséquences logiques. Dans les 2 cas, ce ne sont des conséquences que si elles répondent aux 4 R sus-mentionnés. La conséquence naturelle, c’est ce qui arrive si nous décidons de ne pas intervenir. Prenons l’exemple de l’enfant qui oublie régulièrement de noter ses devoirs. Si la maman (comme ça arrive beaucoup ici à Puerto Rico, où je vis) a la démarche systématique de se renseigner auprès d’autres mamans pour obtenir l’information, il y a peu de chances que l’enfant apprenne à noter ses devoirs. En ayant cette démarche, nous ne l’aidons pas à grandir, à développer son autonomie, à avoir confiance en lui sur le fait qu’il peut se débrouiller sans sa maman. Nous ne l’armons pas pour son futur, en fait, en voulant l’aider, n’ayons pas peur des mots, nous nuisons à son développement. Il vaudrait mieux lui donner l’opportunité d’expérimenter les conséquences naturelles de sa négligence. Il ne s’agit cependant pas de lui tendre un piège. Nous n’allons pas changer d’attitude du jour au lendemain sans l’avoir prévenu. Au contraire, nous préparerons la démarche. Nous nous asseyons donc avec l’enfant, et lui disons calmement : « Je me suis rendu(e) compte que tu oubliais régulièrement de noter tes devoirs. Je ne pense pas que le fait de les chercher pour toi soit une aide. Je pense que tu es tout à fait capable de noter tes devoirs convenablement, et que tu n’as pas besoin de m’impliquer dans cette démarche. J’ai donc décidé de t’en rendre la responsabilité, et de ne plus me renseigner sur les devoirs du jour si tu oubliais de nouveau de les noter. » Nous pouvons même aller plus loin en accompagnant l’enfant dans sa préparation vers la réussite : « Maintenant que tu en as la responsabilité, que penses-tu mettre en place pour ne plus oublier de noter tes devoirs ? » On peut l’aider à trouver des idées, mais ce n’est pas à nous de lui imposer la méthode. Laissons-le essayer de trouver la sienne. A long terme, il vaut mieux que les devoirs ne soient pas faits quelques fois, mais qu’il trouve comment s’y prendre pour mettre cette démarche en place que le contraire ! Ensuite, le jour où il revient sans ses devoirs, ce qui risque fortement de se produire, résistons à la double tentation : 1) de revenir sur ce que nous avons dit en allant chercher les devoirs, 2) de lui commenter que « Je t’avais bien dit que … Encore, tu as oublié ?? », et de remuer ainsi le couteau dans la plaie. Contentons-nous plutôt de recevoir sobrement le sentiment, et transmettons-lui notre confiance en lui pour le futur : « Aie, tu as oublié de noter tes devoirs ? Non, je ne vais pas appeler la maman de X. Je comprends que tu sois embêté, je suppose que la prochaine fois, tu n’oublieras pas. » Et voilà. S’il continue à se plaindre, ne pas se laisser entraîner, s’éloigner. Il a le droit d’avoir un sentiment négatif, nous le laissons l’expérimenter et grandir ! La conséquence logique est celle que nous mettons nous-mêmes en place. Parfois, le problème se répète, et on n’a pas le choix, il y a une conséquence à mettre en place. Ca peut aller de très simple à plus complexe. Par exemple, après avoir expliqué plusieurs fois à Anatole (3 ans) que les feutres qui restaient ouverts séchaient, lui avoir rappelé de les fermer quand il les utilisait, lui avoir expliqué que ça ne me plaisait pas.. j’ai fini (après le lui avoir annoncé avant) par simplement enlever les feutres. Il se contente à présent de crayons et de crayolas. Parfois c’est plus sérieux. Comme quand après avoir eu plusieurs conflits avec Oscar (14 ans) sur le temps passé à l’attendre quand on venait le chercher à ses tournois, alors que ça nous coutait déjà de faire la route, on a décidé qu’il devrait trouver son propre moyen d’y aller… Cet épisode, délicat, mérite d’ailleurs un article en soi, que je ne manquerai pas d’écrirebientôt. Dans tous les cas, ça participe à l’enseignement, tant que c’est fait de manière respectueuse. Parfois, on ne trouve pas de conséquence. Pas besoin d’insister. C’est que la conséquence n’est pas le bon outil. Elle ne devrait d’ailleurs pas être utilisée trop souvent. A-t-on bien creusé les autres pistes ? Car, avant de mettre en place une conséquence, il vaut mieux prendre le temps de réfléchir à la résolution du problème directement avec l’enfant. Lui laisser une chance que ça marche autrement. Parce que le problème de la conséquence, c’est qu’elle prive de l’opportunité d’apprentissage. Alors, si vous êtes vous-même en apprentissage, remplacez déjà les punitions par des conséquences.  Puis, peu à peu, allez un cran plus loin, et impliquez vos enfants dans les recherches de solution. Comme cette maman d’un de mes ateliers, dont le fils jetait des jouets par le balcon, et avec qui nous avons pu travailler, au delà de la conséquence de fermer la porte du balcon, sur une recherche de solution. Vous verrez, vous en sortirez tous gagnants !
Vous voulez, vous aussi, apprendre ces alternatives ? 👉🏻 Inscrivez-vous à la formation « Sortir des punitions »
Rq : on avait aussi déjà abordé cette question lors de la lecture de Parler pour que les enfants écoutent, écouter pour que les enfants parlent, lorsque les auteurs nous conseillaient, dans le chapitre sur les alternatives à la punition, de laisser l’enfant subir les conséquences de ses actes, après lui avoir donné un choix.

Nous abordons le 3è chapitre de La discipline positive.

Nous sommes encore dans une analyse psychologique, et c’est Adler, encore une fois, qui a le premier suggéré des traits de caractère liés au rang de naissance.

Pour être honnête, je ne comprends pas bien comment ce chapitre s’articule avec le reste du livre, qui n’y refait ensuite plus référence. Il est cependant lié au besoin d’appartenance dont nous avons parlé dans les principes adlériens, dans la mesure où la place dans la famille se mesure aussi par rapport à son rang de naissance. J’y ai ainsi trouvé des points de réflexion intéressants, que j’espère pouvoir vous transmettre ici.

Avant tout, en guise de précaution, nous insisterons sur le fait que les remarques qui suivent sont très générales, et toute règle a ses exceptions, surtout quand elles touchent à l’humain !

Pour commencer, Jane Nelsen explique que s’il a des difficultés à répondre à son besoin d’appartenance, l’enfant peut chercher à trouver comment être « vu », individuellement. Et pour cela, il a 4 choix :

  • développer une compétence dans un domaine complètement différent du reste de la fratrie
  • entrer en compétition avec son frère et essayer de faire « mieux »
  • se rebeller ou se venger
  • se désengager (en général avec la conviction de ne pas être à la hauteur)

En parallèle, on peut observer régulièrement des traits de caractères découlant du rang de naissance.

L’aîné :

Les aînés sont souvent responsables, autoritaires, perfectionnistes. Quand un autre bébé arrive, l’aîné s’imagine que pour continuer à compter, il doit être le meilleur. Il est donc facilement dans la compétitivité.
Avec lui, il faudra donc particulièrement s’attacher à s’éloigner des notions de comparaison et de rivalité. (Pour cela, le livre de Faber et Mazlish : Frères et soeurs sans rivalité peut se révéler très utile)

Le cadet – ou les enfants « du milieu » :

On note moins de traits de caractère typique pour ces enfants-là, car les cas sont bien plus variés.

En effet, le 2e peut choisir, pour avoir sa place, de se comporter de manières totalement distinctes :

  • soit il se dit qu’il faut qu’il donne tout pour rattraper l’ainé – et il entre alors dans une forme de compétition, de sur-performance
  • soit il pense qu’il ne pourra jamais être à la hauteur, et va plutôt, au contraire être sous-performant..
  • soit il choisit un domaine vraiment différent de celui de l’ainé dans lequel montrer ses capacités..

En effet, c’est une méthode efficace de trouver sa place en mode de différenciation. Quand c’est le cas, ces cadets sont moins conformistes, et plus larges d’esprit.

Le benjamin :

Les benjamins sont plus chouchoutés. Ils prennent l’habitude qu’on s’occupe d’eux, et n’ont pas besoin d’entrer dans la compétition. Ils aiment s’amuser, et ont plus de mal à devenir autonomes.

Parfois ils développent le sentiment de n’être aimé que lorsqu’on s’occupe d’eux, ce qui limite leur investissement et leur confiance en eux. Ils ne veulent pas apprendre, mais plutôt qu’on les aide.

Il semble que les classes avec une plus forte proportion de derniers-nés soient plus difficiles.
Jane Nelsen raconte que lorsqu’elle était conseillère d’éducation dans le primaire, elle avait régulièrement des derniers-nés qui lui étaient envoyés pour désinvestissement académique. Elle leur demandait toujours : « Qui t’habille le matin ? », et découvrait souvent que quelqu’un d’autre que l’enfant le faisait pour lui… Seulement voilà, si on continue d’aider systématiquement l’enfant à s’habiller au delà de 2-3 ans, on le prive de l’opportunité de construire un sentiment de responsabilité, d’autonomie, de confiance en lui. L’enfant se se sent pas capable. Et ça se ressent sur d’autres aspects de sa vie.

L’enfant unique :

En fonction surtout de l’attitude des parents, l’enfant unique peut développer soit un comportement d’aîné (avec en général une recherche de la perfection un peu moins poussée, car il n’y a pas péril de sa position) soit un comportement de benjamin.

D’autres facteurs d’influence : 

Il est bon de noter qu’en fonction des écarts d’âge (ou des différences de genre), il peut y avoir des « aînés psychologiques » ou des « derniers-nés psychologiques ». En effet, l’enfant qui a occupé une position plus de 4 ans a formé des interprétations dans son rapport qui peuvent perdurer, même quand la structure familiale évolue.

L’atmosphère familiale peut avoir une forte influence sur les « rôles » pris par chaque enfant. Si par exemple, les valeurs familiales sont plus tournées vers la coopération que vers la compétition, il y a fort à parier que les enfants ressentiront moins le besoin de se différencier…

L’interêt de cette analyse :

Vraiment valable ou pas dans votre famille, cette analyse peut aider à comprendre certains comportements et attitudes chez vos enfants.
Essayez donc d’y prêter attention, et de faire preuve d’empathie en entrant dans leur monde si vous les observez.
Soyez attentif à ne pas surprotéger les plus jeunes, à les aider au contraire à se sentir capables et aidez les plus grands à comprendre qu’on peut se sentir bien même quand on a perdu ! Enfin, pour les familles recomposées : attention à l’aspect déroutant que peut constituer le fait de rebattre les cartes dans les positions…

En finir avec les disputes dans la fratrie :

Cette difficulté de positionnement peut créer des rivalités, et des tensions entre les enfants.

Nous, parents, avons un rôle à jouer sur ce point. Nous pouvons :

  • créer un environnement qui atténue les rivalités
  • accompagner nos enfants dans le développement de leurs compétences relationnelles pour gérer les conflits autrement qu’en s’agressant les uns les autres.

Pour aller plus loin sur ce sujet : Inscrivez-vous à ma formation « En finir avec les disputes dans la fratrie »

Isabelle Filliozat aborde ici un cas délicat : le cas de l’enfant qui a peur d’un enseignant.

Et elle donne un coup de pied dans la fourmilière : « Ne craignez pas de déstabiliser votre enfant si vous exprimez un désaccord avec son enseignant. »

Encore une fois, ce n’est pas ce qu’on a appris, et c’est dur à concevoir. Mais finalement, lorsqu’on remet les choses en place, ça devient clair : Nous parlons ici de l’enfant qui a peur d’un enseignant, donc, par hypothèse, un enfant qui fait face à une situation difficile avec cet enseignant !

La majorité des enseignants, heureusement, se comporte de manière respectueuse envers les enfants. Et je veux croire que chaque jour le nombre des enseignants bienveillants grandit.
Cependant, il existe encore des enseignants qui insultent, qui humilient. Et nous ne pouvons pas approuver cette attitude ! Au contraire, si notre enfant fait face à un tel cas, exprimons notre désaccord. Enseignons-lui que nous ne banalisons pas ces comportements. Qu’ils ne font pas partie de nos valeurs.

« Pour certains, l’humiliation est une méthode pédagogique. » Mais pas pour nous. Repensons à cette question : qu’est-ce qui est le plus précieux pour moi ?

Parfois, on peut être porté à penser que ça ne durera que l’année scolaire, mais ça peut durer beaucoup plus. L’auteur donne ici l’exemple d’un jeune qui, face à un prof de maths terrorisant, est devenu mauvais en maths, et l’est resté. Il a suffi (3 ans plus tard !) de tourner cet ancien prof en ridicule pour que son niveau remonte…

Alors, si le cas se présente : écoutez votre enfant !
La peur peut être réelle, je l’ai constaté

J’avais déjà évoqué Adler lorsque j’avais écrit « Les nécessités de base des enfants », je retombe dessus à la lecture de La discipline positive de Jane Nelsen.

En effet, les principes adlériens ne sont rien de moins que les fondements de la discipline positive développée par Jane Nelsen.

Quels sont ces principes ?

  1. Les enfants sont des êtres sociaux
  2. Le comportement de l’enfant est tendu vers un but
  3. Le besoin essentiel de l’être humain est d’appartenir et d’avoir de l’importance
  4. Un enfant qui se comporte mal est un enfant découragé
  5. La responsabilité sociale ou le sens de la communauté
  6. Le principe d’égalité, fondement de la coopération
  7. Les erreurs sont de merveilleuses opportunités d’apprentissage
  8. S’assurer de faire passer le message d’amour

Et comment les interpréter ?

Les enfants sont des êtres sociaux

Selon Adler, l’enfant nait avec un vrai sens de solidarité et de communion.
Son comportement dépendra donc grandement de son environnement, du contexte social, de l’interprétation qu’il fera du comportement de ceux qui l’entourent.
Je crois qu’on touche ici à la force du modèle !

Le comportement de l’enfant est tendu vers un but

Selon Adler, le comportement est tendu vers un but à atteindre, qui n’est même pas conscient. L’enfant interprète ce qu’il observe, et adapte son comportement en fonction de ce qu’il ressent devoir faire pour obtenir ce qu’il recherche. Comme quand parfois on cherche le compliment par exemple… Seulement, l’enfant le fait souvent de manière inconsciente, sinon ce serait trop facile. Comme quand Léon cherchait de l’attention… Je ne sais si je l’aurais compris sans Adler.

Enfin, ajoutons à ça que, selon Dreikurs, psychiatre qui poursuivit en son temps le développement des principes adleriens, « les enfants perçoivent bien mais interprètent mal », et nous nous retrouvons face à des comportements agaçants qui n’obtiennent pas toujours le but cherché, et pourtant, ce n’est pas faute d’essayer !

Un exemple parlant, donné par Jane Nelsen ici : la régression du jeune enfant quand un bébé arrive à la maison. C’est assez simple à comprendre en fait : l’enfant observe que quand le bébé demande un biberon, on s’occupe de lui. Il interprète donc que quand un enfant a envie d’un biberon, les adultes sont là pour répondre à cette envie. Or, il aimerait également qu’on s’occupe de lui, c’est son but. Donc, il demande un biberon !

Le besoin essentiel de l’être humain est d’appartenir et d’avoir de l’importance

On rejoint ici l’article que je citais au début de celui-ci, sur les nécessités de base des enfants.

C’est en se sentant faire partie du groupe, et en sentant qu’on y contribue que l’enfant va se construire une vraie confiance en soi.

La compréhension de ce besoin essentiel nous permettra l’éclairage des principes précédents : le but d’un comportement sera en général d’appartenir et d’avoir de l’importance, car l’enfant est un être social.

Un enfant qui se comporte mal est un enfant découragé

Ainsi, si nous ne nourrissons pas le besoin de l’enfant, il devra chercher un moyen de l’obtenir. Et comme il peut interpréter mal ce qu’il observe, il va basculer dans un comportement inadapté. C’est en réalité sa manière de dire « Je voudrais appartenir et avoir de l’importance, mais je ne sais pas comment y parvenir. »

Lors d’un comportement que nous n’apprécions pas, posons-nous la question : que cherche réellement l’enfant ? Quel est son besoin derrière son attitude ? On pourra ainsi l’aider à répondre à son besoin de manière plus adaptée.

La responsabilité sociale ou le sens de la communauté

Les expériences le prouvent : les petits enfants ont naturellement une envie d’aider l’autre. Prendre en compte le besoin de l’autre, essayer d’y répondre, voilà une belle manière de vivre la communauté. Ne les laissons pas perdre cet élan. Laissons-les contribuer, et que cela devienne un échange.

Dreikurs disait : « Ne faites pas pour un enfant ce qu’il est capable de faire tout seul. » Parce qu’en faisant pour lui-même, l’enfant trouve sa place dans la communauté, et développe le sentiment d’être capable. Etant capable, il pourra à son tour aider l’autre, suivant ainsi son instinct de responsabilité sociale.

A l’inverse, n’abandonnons pas à lui-même un enfant qui ne sait pas. Accompagnons-le dans son apprentissage pour lui donner également le modèle du sens de la communauté, et impliquons-le jusqu’à ce qu’il soit capable de prendre la responsabilité seul.

En résumé : ne faisons pas pour, prenons le temps d’enseigner.

C’est l’histoire si marquante du poisson, non ? « Donnez un poisson à un homme, il mangera une fois. Apprenez-lui à pêcher, il mangera toute sa vie ! »

Le principe d’égalité, fondement de la coopération

Jane Nelsen insiste sur la démarche de » connecter avant d’enseigner ».

L’enseignement se fondant sur la coopération, il faut d’abord être connecté avec l’enfant. Et pour cela, il est nécessaire d’aborder notre relation selon un principe d’égalité. Non, cela ne signifie pas qu’un enfant et un adulte sont identiques, mais plutôt qu’ils ont également droit au respect. Ce qui n’est pour l’instant, en général, pas le cas, comme évoqué dans cet article.

En cas de problème, nous veillerons donc à nous connecter avec respect avec notre enfant, avant de chercher une solution avec lui. Concrètement, nous l’écouterons avec empathie, respecterons ses émotions et besoins, partagerons nos propres émotions et besoins. Alors seulement, nous pourrons avancer ensemble.

Ces étapes correspondent d’ailleurs bien à ce que nous avions lu dans les livres de Faber et Mazlish, ou d’Elizabeth Crary.

La connexion peut et doit évidemment se construire également en dehors des situations de conflits, pour plus d’idées sur le sujet, voir comment connecter avec son enfant ?

Les erreurs sont de merveilleuses opportunités d’apprentissage

Je le mettais dans l’article de présentation de ce livre, parce que c’est un thème qui y revient régulièrement et qui est clef : apprécier la valeur de l’erreur ! Car les erreurs sont des OPPORTUNITES.

L’erreur est un thème que nous avons déjà approché au travers notamment de TED talks : celui de Claire Blondel, celui d’Eduardo Briceño ; grâce à Jane Nelsen, nous la valorisons chez nous également : tous les samedi, avec Oscar (14 ans) et Alice (10 ans), nous avons ajouté à nos « samedi victoire », le « samedi erreur ». Ainsi, chacun partage également son erreur de la semaine, et ce qu’il en a retiré !

Ce n’est pas évident, car pour accepter de faire face à l’erreur, il faut avoir le courage d’être imparfait !

Cas d’application concret : en tant que parent, nous faisons régulièrement des erreurs dans la manière d’aborder les choses avec nos enfants. Ayons le courage d’être imparfaits, et n’hésitons pas à aller les voir avec notre part de responsabilité pour demander pardon pour notre débordement. Ainsi, nous leur donnons le modèle d’une démarche de réparation.

S’assurer de faire passer le message d’amour

Pour terminer, ne perdons pas de vue l’essentiel : quand nous faisons des reproches à nos enfants, souvent, c’est parce que nous les aimons.

Eh oui ! Sinon, peu nous importerait qu’ils se couchent tard et soient fatigués, qu’ils rentrent après la tombée de la nuit, qu’ils ne travaillent pas leur français…

En fait, nous cherchons à leur imposer ce qui nous semble important pour eux, parce que nous les aimons. Seulement voilà : reçoivent-ils bien ce message ?

Essayons de marquer un temps de pause et de réfléchir à nos formulations, pour inclure ce message, parce que finalement, c’est bien lui qui compte le plus !

Bien sûr, après avoir écrit ça, je sais quand même que la prochaine fois que je m’énerverai, je ne marquerai pas de temps de pause, je m’agacerai, et mon message d’amour ne passera pas….

Mais ce sera une opportunité ! Une opportunité de m’en rendre compte, d’y réfléchir, une opportunité de retourner voir mon enfant et de lui montrer comment on répare. Ensuite, nul doute que j’aurai une autre opportunité de faire mieux. Je suis imparfaite, et je l’accepte, tout en cherchant à faire mieux !