Choisissez d’appuyer les choix faits par vos enfants
« C’est par leurs choix et les leçons qu’ils en tireront qu’ils en apprennent le plus dans leur vie. » écrivent Sura Hart et Victoria Kindle Hodson, les auteurs de Parents respectueux, enfants respectueux. Il serait donc fondamental, pour les accompagner sur ce chemin de la découverte et de l’apprentissage, d’appuyer les choix faits par nos enfants.
Vous avez probablement observé vos enfants se rebeller face aux décisions qui leur sont imposées. Et si la notion de choix changeait cette dynamique ? C’est ce que nous allons creuser ici.
L’importance du choix dans l’apprentissage
Le choix joue un rôle fondamental dans le développement de l’enfant, et dans la vie de l’adulte.
Pourquoi ? Parce que cette notion de choix intervient sur deux plans différents.
Le libre arbitre
Faire un choix, c’est exercer son libre arbitre.
Or, cette aspiration à décider, à exercer son pouvoir personnel, est une aspiration fondamentale de l’être humain. Une manière de se sentir exister.
Ainsi, la capacité de faire des choix correspond au fait de mûrir. Plus on grandit, et plus on se sent l’envie et la capacité de faire ces choix. Et on progresse de plus en plus vers l’autonomie, par notre pouvoir de décision.
L’apprentissage par l’expérience
Oui, le choix est au coeur de l’expérience. Car l’expérience réside en fait dans le résultat obtenu après le choix.
Je me souviens que c’est une idée que nous avions déjà évoquée. En effet, dans mon article autour de la conférence à Autun de Céline Alvarez, j’avais parlé de son message autour de l’erreur. « C’est l’effet de surprise, c’est à dire la différence entre la prédiction et le résultat, qui crée les réajustements neuronaux. Et de ces réajustements découlent les apprentissages. »
L’importance pour l’enfant de faire ses propres choix est donc également dans le fait que cela lui permettra d’en observer les résultats, et d’apprendre.
Lorsque l’enfant a peu de choix
En réfléchissant à l’importance du choix dans l’apprentissage, tel que présentée ci-dessus, on s’interroge. En effet, ces arguments semblent couler de source.
Prenons donc d’abord un moment pour comprendre pourquoi les parents ne laissent pas le choix.
Pourquoi les parents ne laissent-ils pas les enfants penser et agir pour eux-mêmes ?
Une question importante à laquelle les auteurs du livre apportent deux réponses.
- Parce qu’ils attendent une certaine manière de faire. Les parents ont déjà en tête une méthode, qui combine efficacité et précision. La méthode expérimentale de leur enfant ne leur convient souvent pas !
- Parce qu’il faut du temps et de la patience pour laisser l’enfant faire par lui-même. Ce dont nous manquons souvent…
L’impact de ce manque de choix
D’abord, personne n’aime se voir imposer les choix de quelqu’un d’autre. (Il suffit, pour s’en convaincre, de nous mettre dans cette position…). De ce fait, évidemment, plus nous imposerons nos choix à nos enfants, plus nous créerons d’occasions de conflits. Plus nous verrons se développer les luttes de pouvoir.
Et puis, le choix imposé est dangereux : si nous indiquons à notre enfant une manière d’agir, et que cela ne se déroule pas bien, c’est bien sur nous que retombe la responsabilité. Lui, ne faisant qu’obéir, n’a pas de responsabilité dans l’affaire !
Pire encore, à plus long terme, si notre enfant se voit régulièrement refuser ses idées, que ses parents ne soutiennent pas ses choix, il risque d’en déduire que ses idées ne sont simplement pas valables. Devenu adulte, il peut toujours craindre que ses avis n’aient aucun interêt, qu’ils ne vaillent pas la peine d’être partagés…
En fait, ces enfants privés de choix ne se sentent pas capables et compétents, tout simplement. Est-ce ce que nous voulons pour nos enfants ?
Lorsque l’enfant peut exercer ses choix
A l’inverse, bien sûr, on commence à voir se profiler les avantages de soutenir les choix de nos enfants.
Les qualités qu’il développe au passage
J’aime, depuis que j’ai compris l’importance d’avoir un projet parental, penser aux qualités et compétences qui se développent chez mes enfants lorsque je choisis un mode d’éducation plutôt qu’un autre.
Dans ce cas du choix, je trouve l’exercice assez facile à faire.
- Prise de décision
- Sens critique
- Analyse
- Autonomie
- Confiance en soi
Je choisis de mettre cette confiance en soi à part, parce qu’elle me semble tellement, tellement importante !! J’ai l’impression qu’on avance tellement mieux dans la vie lorsqu’on a confiance en soi…
Alors, je cherche au quotidien à envoyer un message de confiance à mes enfants. Oh, je n’y arrive pas toujours. Je tombe régulièrement, comme tout parent, dans les critiques, et les reproches. Toutes ces choses qui ne nourrissent ni le lien, ni sa confiance en lui, ni la coopération…
Mais je m’accroche, et j’ai confiance, j’avance. De même, je pense qu’en l’aidant à prendre conscience de l’éventail de choix qui se présentent à lui au quotidien, et en appuyant sa décision face à ces choix, je lui envoie un message de confiance fort. Un message de confiance sur son aptitude à gérer ce choix.
Les bénéfices pour notre propre développement
Avantage supplémentaire : nous ne sommes pas en reste dans cette démarche.
Car faire en sorte d’appuyer les choix de nos enfants, c’est progresser nous-mêmes.
Cela nous oblige en effet à mieux écouter. Ce qui est déjà une sacrée force. Savoir écouter l’autre, c’est le point de départ pour mieux le comprendre. Cela aide à développer l’empathie.
Et puis, nous nous rendrons ainsi compte qu’il existe d’autres manières de faire que la nôtre, qui peuvent également donner de bons résultats (et si ce n’est pas le cas, apprenons à nous mordre la langue, pour ne pas dire « Je te l’avais bien dit ! »).
Ainsi, nous développerons notre tolérance, notre respect de l’autre. Et croyez-moi, cela peut nous aider, non seulement dans nos relations avec nos enfants, mais également avec les autres !
Changeons cette dynamique !
Bien. Je suis convaincu. Seulement voilà, plus facile à dire qu’à faire.
C’est vrai. Mais pas d’inquiétude, nous allons prendre les choses dans l’ordre.
Vaincre les raisons qui nous freinent
Pour commencer, revenons sur les raisons soulevées plus haut, qui découragent les parents de laisser le choix à l’enfant.
Nous parlions d’abord de la manière de faire. Et d’efficacité. En fait, nos enfants n’ont pas les mêmes objectifs que nous. C’est un point qui peut aider à considérer les choses autrement.
Ainsi, je me souviens d’un exemple que donnait Maria Montessori. Elle parlait d’un jeune enfant qui portait une pile de linge d’un bout de la pièce à l’autre. Là où l’adulte aurait pu transporter la pile en un trajet, de manière beaucoup plus « efficace », l’enfant prenait un linge après l’autre. Et le plus intéressant vient ensuite : une fois la pile terminée, voilà notre enfant qui recommence, dans l’autre sens ! Pour lui, l’objectif n’est pas que le linge soit de l’autre côté. L’objectif est de s’entrainer à le porter. Ce qui est en soi une occupation incroyable pour un jeune enfant !
Ne soyons donc pas trop prompts à juger l’efficacité des choix de nos enfants…
Ensuite, nous soulevions notre manque de temps.
S’il est vrai que faire pour l’enfant est plus rapide sur le coup, nous oublions souvent, dans la course folle de notre vie quotidienne, l’investissement à plus long terme. Car plus nous laisserons l’enfant développer ses propres compétences, plus il deviendra autonome, et moins nous aurons besoin de faire pour lui.
Le choix fait d’ailleurs bien partie des compétences listées par Floriane, de parents naturellement, lorsque nous avions écrit à 4 mains sur l’autonomie, et qu’elle avait évoqué l’autonomie du jeune enfant.
De plus, je vous le rappelle, un autre effet secondaire de ces choix laissés à l’enfant, sera de faire baisser la fréquence des luttes de pouvoir. Là encore, cela vaut la peine d’investir un peu de temps !
Je sais que ce n’est pas toujours facile. Il vous faudra adapter le moment de l’apprentissage.
Prenons un exemple concret : je voudrais que Léon (6 ans), apprenne à changer les draps de son lit. Je ne vais pas le lui enseigner le matin avant de partir à l’école ! Je vais choisir un moment calme pendant le week-end, pour participer au changement des draps. Et je lui donnerai le choix de commencer par un côté ou par l’autre. Puis le choix du drap par lequel on va remplacer celui qu’on enlève. Le choix d’apporter les draps sales dans le panier avant, ou après avoir mis les nouveaux, etc… Ca va me prendre un peu de temps. Mais Léon se sentira impliqué, et capable. Et de fait, il sera capable, bientôt capable de changer ses draps seul !
Leur donner des opportunités
Avant d’en arriver à appuyer les choix de nos enfants, il faudra d’abord leur donner l’occasion de faire des choix ! Qu’ils apprennent peu à peu à développer cette compétence. Chaque choix est un renoncement. Il n’est donc pas toujours évident de choisir en étant sûr de soi…
(C’est rigolo, d’ailleurs – rien à voir – : je lis en ce moment un roman historique, dans lequel l’auteur nous montre un Charles IX incapable de faire des choix, demandant sans cesse l’approbation de sa mère Catherine de Médicis. Comme quoi, dans toute famille, ce genre de situation arrive !)
Notre rôle de parents sera donc double, je crois.
- trouver les opportunités de laisser des choix à nos enfants, dès le plus jeune âge
- les aider à investiguer les conséquences de leurs choix, pour qu’ils les fassent de manière éclairée. La décision, ensuite, leur appartiendra.
Pour le premier point, nous avons déjà souvent parlé de l’importance du choix pour le jeune enfant.
Puis, au fur et à mesure qu’ils grandissent, ils pourront être de plus en plus sollicités :
- pour participer aux règles de la maison
- dans des démarches de recherche de solution
- dans la répartition des tâches dans la famille
- dans la participation de projets
- ….
Et lorsqu’ils deviennent adolescents, cela nous demandera encore plus d’efforts peut-être. Il faudra accepter une certaine perte de contrôle ! Pour que le choix de l’ado ne se limite pas à choisir entre se conformer à nos décisions et se rebeller…
Nos propres choix
Partant cette fois de l’idée que nous jouons également un rôle de modèle auprès de nos enfants, nous pouvons les aider à explorer cette notion de choix en parlant des nôtres.
Exprimer nos choix simplement. Partager parfois nos hésitations, ce qui nous a amené à choisir d’une certaine façon. Notre regret, même de ne pas avoir pu choisir deux options à la fois !
Parler de nos choix ratés, de ce que nous aurions parfois pu faire différemment.
Discuter des choix que nous avons à faire, et que nous faisons. Nous pouvons même leur demander leur opinion, leur montrant qu’il peut être intéressant de discuter d’une idée, que la décision prise finalement corresponde à l’opinion de l’autre ou non.
C’est à vous
Etes-vous prêts ? Voici le défi que je vous lance aujourd’hui.
La prochaine fois que vous désirez décider pour votre enfant, faites une pause. Respirez, réfléchissez aux options, et offrez un choix à votre enfant. Et voyez ce que ça donne…
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