Expliquer aux enfants : en dire moins pour mieux le dire !

Sur ce thème, comme bien souvent en parentalité positive, l’équilibre n’est pas toujours facile à trouver. Lorsque nous leur demandons quelque chose, faut-il l’expliquer aux enfants ? Ne pas le faire ne reviendrait-il pas à l’imposer ?

J’aimerais aujourd’hui creuser ce sujet, qui m’est particulièrement sensible parce que Léon, 6 ans, supporte de moins en moins que je me lance dans des discours… Car, je l’avoue d’emblée : limiter mes mots n’est pas mon fort !

Retour sur cette habileté parentale, et les moments de l’utiliser…

Les « techniques » de parentalité positive qui encouragent à rester concis

Pour commencer, voyons si le conseil nous est parfois donné explicitement d’en dire moins.
Et, en effet, il nous est donné ! Voici ce que j’ai trouvé :

Le dire en un mot

Dans Parler pour que les enfants écoutent, écouter pour que les enfants parlent, le chapitre sur la coopération nous suggère de nous contenter d’un mot seulement pour communiquer certaines de nos demandes. Cette technique est reprise par Isabelle Filliozat dans « J’ai tout essayé ! ».
(En ajoutant le lien vers l' »article » – en mérite-t-il le nom ?- s’y reportant, je note le changement dans mes articles, depuis que je ne les écris plus seulement pour moi, mais bien pour vous !)

Ainsi, mon exemple préféré est celui que j’ai le plus utilisé : « Oscar, ton sac. » sera plus efficace que « Oscar, tu as encore laissé ton sac dans le couloir !! » (Qu’est-ce que je suis contente que ce sac ne soit plus dans le couloir…)

C’est une technique redoutable pour l’adulte comme pour l’enfant. En effet, pour nous, cela représente une économie d’énergie, ce qui limite notre agacement face à la situation. Pour l’enfant, cela parait moins attaquant, et il sera probablement plus prompt à réagir.
C’est probablement la raison pour laquelle cette technique plait généralement beaucoup aux parents auxquelles je l’explique en atelier. Elle est de plus rapide à mettre en place !

Ecrire une note

Toujours dans Parler pour que les enfants écoutent… , une technique proposée est d’écrire. Ecrire ? Oui, écrire pour aider l’enfant à se rappeler de ce qu’il doit faire sans que nous ayons toujours à le lui rappeler.

Ainsi, j’ai une amie qui a mis cette technique en pratique en affichant à côté du lavabo une note précisant que  « La brosse à dents et le dentifrice se rangent dans le gobelet. ». Le soir même, son mari a pensé, en entrant dans la salle de bain, que leur fils de 6 ans ne s’était pas brossé les dents…

Chez moi, j’ai également utilisé cette technique dans un autre contexte : pour éviter de crier ! Ainsi, face à ce sac toujours dans le couloir (bon sang, qu’est-ce que ca a duré !!), et en alternative à « Oscar, ton sac. », il m’est arrivé de lui tendre un papier lui demander de vérifier l’entrée. C’est plus simple, plus sobre, et on passe plus vite à autre chose que lorsqu’on a laissé notre agacement (je reste limitée) passer nos lèvres !

Passer par le contact physique

Enfin, je trouve que ce conseil va encore un cran plus loin. Ici, nous n’avons même plus besoin de paroles.

Je lis d’abord cette idée dans « J’ai tout essayé ! », et l’applique beaucoup avec Anatole, mon plus jeune, tellement pris dans son jeu qu’il n’écoute pas quand je l’appelle. Il suffit de s’approcher et de créer la connexion physiquement pour qu’il me prête attention.

Mais c’est encore cette idée qui revient dans Poser des limites à son enfant, lorsque Catherine Dumontheil-Kremer nous explique comment sortir de l’impasse

Ainsi donc, parfois les mots sont à économiser !!

Les enfants peuvent-ils accepter sans explication ?

Problème : si nous n’expliquons pas, cela signifie-t-il que nous imposons ?

Parce que, si c’est le cas, j’aime autant expliquer. En effet, comme le préconise Rosenberg, qui, par la CNV, m’inspire à rêver en un monde meilleur, je voudrais être bien capable de distinguer demande et exigence.
Car je ne cherche pas à avoir des enfants qui obéissent aveuglément. J’aime, même si c’est parfois usant, je l’admets bien volontiers, qu’ils soient capables de remettre mes exigences en cause.

L’explication a le mérite de leur donner un contexte, de leur permettre de comprendre d’où vient ma demande.
Soit.
Cependant, si nous mettons en place une relation bienveillante avec nos enfants, ils nous font confiance. Ainsi, surtout lorsqu’ils sont jeunes, ils n’ont pas forcément besoin d’une explication ! Ce n’est pas tant que nous imposions que le simple fait que nous les guidons.

Nous amènerons par exemple le jeune enfant se laver les mains avant le déjeuner, sans forcément se lancer dans le pourquoi de la chose. Bien sûr, nous pouvons également le leur expliquer. De toute manière, cela viendra un jour naturellement, car ils risquent fort de nous le demander le jour où ils voudront le remettre en cause ! Mais il n’est pas nécessaire de prendre de l’avance, en « justifiant » tout ce que nous leur demandons.

Pourquoi explique-t-on ?

Je pense qu’une bonne manière d’aborder les choses, et de savoir où placer la limite, est probablement de se demander quelles sont les raisons qui nous poussent à expliquer.
Car celles-ci peuvent varier…

Les moments où nous expliquons pour l’enfant

Il y a effectivement les moments où notre explication s’adresse à l’enfant. Ces moments où nous voyons qu’il a besoin de comprendre pourquoi faire quelque chose. Dans ces cas-là, l’explication est utile est constructive, et permet de débloquer simplement la situation.

Pourquoi doit-on partir du parc ? Parce que c’est l’heure du bain : regarde, le soleil est déjà en train de se coucher.

Les moments où nous expliquons pour nous-mêmes

Certaines fois, il peut nous arriver d’expliquer, non pour l’enfant mais pour nous. Hum… pas très clair. Je sais. Comment bien exprimer ça ? Je veux dire que parfois, nous sentons bien que notre explication ne tient pas bien la route, ou bien, nous aimerions suivre des principes que nous avons du mal à appliquer…
Alors, nous justifions plus que nous expliquons, espérant qu’en justifiant à l’enfant, nous nous convaincrons nous-mêmes.

Que de fois j’ai essayé d’expliquer à mes enfants pourquoi ce n’était pas une bonne idée de voir un film ce jour-là…
L’explication est d’ailleurs suffisamment faible pour qu’un général, elle soit suivie d’un « Mais on peut quand même voir un film ? »
Il serait plus efficace d’être directement honnête avec moi-même et avec eux, et de dire que je cherche à les aider à développer autre chose… voire ne même pas vraiment justifier, parce que finalement, ils sont trop jeunes pour vraiment écouter…

Et c’est en général ce qui finit par se passer. On sort une autre activité, et on passe à autre chose.

Les moments où nous expliquons pour l’enseignement

Voilà le moment qui, pour moi, est le plus délicat. Du moins, celui pour lequel j’ai le plus de mal à me positionner.
Car l’explication pour l’enseignement est valable, bien sûr ! Le problème, c’est quand elle devient systématique…

Ainsi, je me suis tellement inspirée de Jane Nelsen, et j’ai tellement bien intégré le fait que le conflit est une opportunité d’enseignement, que je suis tentée, à chaque conflit, d’entrer dans un échange qui nous permette d’en tirer l’enseignement.
Parfois ca fonctionne bien, et je vois bien que nos enfants progressent, et parfois, au milieu de mon discours, je les perds…

Et j’ai tellement envie de les aider à grandir, de les guider… J’ai tellement envie de saisir les opportunités, que je me retrouve frustrée de ne pas pouvoir aller plus loin dans mon explication !

Je comprends qu’il faut que j’accepte que mes mots auront plus d’effet s’ils sont plus rares. Que je n’aie pas peur de rater des opportunités : il y en aura sans aucun doute d’autres qui se présenteront ! (C’est également ce que dit mon amie Gwen de Petit bout par petit bout lorsqu’elle traite du même thème des explications.)

Accepter que nous ne convaincrons pas

Une idée que je copie tout droit de l’article de Gwen précédemment cité, et qu’il me semble important de reprendre ici, parce qu’elle m’a vraiment laissée songeuse. Elle écrit donc, je cite : « mes explications n’ont pas pour but de convaincre mon enfant ».

Eh oui. Ca semble logique, et pourtant, ne nous retrouvons-nous pas régulièrement dans la position de vouloir convaincre ? Avec nos enfants, ou avec n’importe qui, d’ailleurs !
Lorsque nous parviendrons à accepter que chacun a le droit d’avoir son opinion, que nous pouvons expliquer pour donner notre point de vue, mais que le but n’est pas de convertir l’autre, nous gagnerons en sérénité.

Et ce sera également un enseignement implicite pour nos enfants : un modèle de respect et de tolérance. Ah, je devrais peut-être saisir les opportunités de me l’enseigner à moi, cela !!

Le bon moment pour expliquer

Dans tous les cas, que l’on trouve que la situation réclame une explication ou pas, il s’agit de choisir le bon moment pour expliquer.

Car le gros piège, celui qu’il faut absolument éviter, c’est celui de se lancer dans une explication alors que l’enfant n’est pas en mesure de l’écouter. (Thème abordé dans le podcast sur la validation des sentiments et les explications)

En effet, lorsque l’enfant est encore sous le coup de l’émotion, il n’est pas capable de s’ouvrir à nos explications.
Et ce n’est pas tout : de la même manière, lorsque nous sommes encore sous le coup de l’émotion, nous ne sommes pas capables d’expliquer calmement ! Et dans ce cas, évidemment, notre message ne sera pas reçu non plus.

Donc… mieux vaut marquer une pause et revenir ensuite.

Et parfois, c’est piégeant. Ces derniers temps (et c’est ce qui m’a poussée à écrire cet article, pour m’inciter à creuser en moi-même), j’ai du mal à me positionner par rapport à mon fils Léon, 6 ans.

Suite à des moments de disputes avec son jeune frère, je lui laisse un temps pour retrouver son calme, en l’accompagnant ou non. Souvent la roue des options l’aide à cela.
J’ai l’impression d’attendre ainsi le bon moment avant d’entrer dans les explications. Alors, j’essaye de saisir l’occasion du conflit pour développer son empathie. J’essaye donc quelque chose du type « Tu sais, je crois que ton frère aimerait pouvoir décider également du scénario quand vous jouez avec les voitures… ». Et régulièrement, il s’enfuit au milieu de mon explication pour aller se réfugier dans son lit !
C’est donc que je me suis lancée trop tôt dans l’explication… et que je dois apprendre à lâcher prise !

En conclusion

Y a-t-il vraiment une conclusion à tirer, autre que celle que nous donnera l’expérience ?

Je vais quand même m’y essayer :

  • ne pas trop expliquer lorsque l’on peut s’en passer, surtout dans le cas des situations récurrentes, dans lesquelles les explications ont déjà été données ! (Non, pas la peine d’ajouter « des milliers de fois » !!)
  • être convaincus que nos enfants, surtout jeunes, n’ont pas toujours besoin d’explications
  • se poser la question de la raison pour laquelle nous expliquons
  • accepter que l’enfant ne soit pas convaincu (ce qui ne signifie pas qu’il fera forcément ce qu’il veut, cela se jugera au cas par cas)
  • choisir le bon moment pour expliquer !

Voilà, si vous parvenez à bien suivre tous ces principes, dites-le moi, ça m’intéresse de savoir comment vous faites !!

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