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Doit-on toujours voler au secours de son enfant ?

Les neurosciences sont formelles : laisser pleurer un enfant le met en situation de stress, et ce n’est pas bon pour son cerveau.
Pour autant, nous voudrions que notre enfant puisse apprendre à faire face à la vie, peu à peu sans notre aide. Comment trouver le bon équilibre ?

Nous sommes en vacances, en pleine visite de ville avec des amis.
Nos plus jeunes sont contents d’être ensemble, ils courent devant.
Mais… aïe ! La fille de nos amis (3 ans) n’a pas vu le trou, elle trébuche… et pleure.
Son père la prend dans ses bras, et, à ma surprise, la garde dans les bras jusqu’à ce que nous arrivions à la station de métro, quelques minutes plus tard.

Le lendemain, avec les mêmes amis, nous montons admirer une église au sommet de la colline. Encore une fois, les enfants courent devant… et la petite trébuche encore ! Elle se met à pleurer, se retournant vers son père… qui la prend immédiatement dans ses bras, et, de nouveau, la porte pendant plusieurs minutes sur la suite du chemin.

La présence de son père rassure cette petite fille, c’est évident.

Pourtant, cette scène me soulève des interrogations :
La ligne est fine entre être là pour son enfant, et être trop là pour son enfant !

Vous me connaissez, je ne vais certainement pas dire qu’il faut faire semblant de rien quand cette petite fille pleure, ou lui dire “ce n’est rien !”. Non, il n’est pas question de nier son ressenti. Je crois pourtant qu’elle aurait peut-être seulement eu besoin d’un regard, d’une phrase “Mince, tu es tombée !”, et qu’elle serait repartie avec enthousiasme.

En la prenant systématiquement dans les bras, je me demande dans quelle mesure elle ne pourrait pas interpréter l’aide de son père comme “Je ne peux pas me relever seule. J’ai besoin d’aide. J’ai besoin de mes parents.”

Par nos attitudes et nos réactions, nous passons à chaque fois un message implicite à nos enfants. M’interroger sur le message est une des méthodes qui m’aide le plus à avancer vers la parentalité que je souhaite. Parce que pour aller dans la bonne direction, il s’agit d’abord d’être conscient de ce que l’on cherche à faire passer.

Cet épisode est l’occasion d’une discussion passionnante (comme toujours) avec la mère de cette petite fille, une amie.
Nous sommes d’accord que la ligne est fine….

Consoler son enfant, ne pas le laisser pleurer seul, et en même temps ne pas lui passer un message d’incapacité, lui donner confiance en sa propre force, en son aptitude pour se relever et continuer ! Quel exercice difficile !

Cette histoire s’est déroulée il y a des mois.
Elle me revient en mémoire à la lecture de Il n’y a pas de parent parfait, d’Isabelle Filliozat.

En effet, l’auteure y parle d’une maman qui “se plaint de ne pas arriver à consoler sa fille de dix-huit mois quand elle pleure.” L’observation des interactions entre la maman et sa fille montre en fait que la petite fille se console très vite, puis se remet à pleurer, encore dans les bras de sa maman. “En fait, écrit Isabelle Filliozat, pour l’observateur extérieur, il est évident qu’elle garde tout simplement sa fille trop longtemps dans ses bras.”

Voulant être une bonne mère, elle répond au schéma qui veut que la bonne mère prend son enfant dans ses bras quand il pleure, et, en retour, sa fille se retrouve “prisonnière de sa fidélité envers sa maman.” Alors qu’à 18 mois, “elle n’a besoin que d’un petit câlin de réconfort.”

La maman met alors ce nouveau conseil en pratique, ne gardant sa fille contre son épaule que quelques instants, puis la tournant vers l’extérieur dès que les pleurs commencent à se calmer. La petite fille est alors ravie de reprendre son jeu.

On parlait de ligne fine… c’est délicat, n’est-ce pas ?
Essayer d’être un “bon parent”, sans oublier de laisser l’enfant trouver sa propre place…

Et vous, avez-vous l’impression de bien identifier le moment où les bras ne sont plus utiles ?

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10 réponses
  1. Evan de papa et patron
    Evan de papa et patron dit :

    bonjour

    Comme tu le dis, la ligne est fine. Je dirais même plus : elle est en plus dépendante du caractère de notre enfant.
    Tout n’est pas non plus la faute ou la cause du parent : l’enfant naît avec un caractère, qui évolue avec le temps, j’en suis convaincu.
    Il faut donc selon moi s’adapter à son caractère, tout en évitant de trop en faire.

    Après, si l’enfant demande à être dans les bras : pourquoi refuser ?! A part quand on est fatigué, peut-être. Ou du moment qu’il y a une raison, qu’il suffit d’expliquer à l’enfant, et de rester, pour ma part, ferme dans sa décision.

    L’enfant trouvera sa place si on lui en laisse une en fait, et donc si on a nous aussi trouver notre place : dans la famille, dans la société.

    Au plaisir
    Evan

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    • Coralie
      Coralie dit :

      Oui, mais justement tout est là Evan : savoir reconnaitre les moments où l’enfant ne demande pas à être dans les bras ! C’est nous qui le devançons, alors qu’il aurait peut-être très bien pu s’en passer !

      Répondre
  2. Sonia Duchesne
    Sonia Duchesne dit :

    Bonjour Coralie,

    Ton article est très intéressant merci ! Il m’interroge du coup. Pas facile…
    Ce que j’essaye de faire quand l’ un de mes enfants se fait mal, je le regarde en esquissant un sourire interrogateur ( qui sous-entend ça va?). J’ai l’impression que le sourire dédramatise un peu la situation. Ensuite, selon la réaction je le prends dans mes bras ou il continue son bonhomme de chemin. Une façon parmi tant d’autres…

    Bonne soirée
    Sonia

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  3. telloublog
    telloublog dit :

    C’est vrai que la ligne est fine et qu’il faut etre honnete en tant que parents: des fois on aime bien se sentir indispensable et donner et donner encore des calins alors que le petit prend le calin (il est pas fou non plus!), mais aimerait bien etre dans un peu plus d’independance.

    Répondre
    • Coralie
      Coralie dit :

      Ah, une analyse intéressante Tellou ! Parce que cette envie de se sentir indispensable risque de freiner beaucoup d’étapes d’autonomie…

      Répondre
  4. Nathalie
    Nathalie dit :

    Oh ça me parle drôlement ça, surtout que ce reproche m’a été fait récemment. Le problème selon moi, c’est de s’adapter. L’enfant grandit plus vite que le parent. ET je me rends compte que j’ai souvent un train de retard. Elle sait me le rappeler et c’est ça qui me rassure: tant que le dialogue est possible, nos enfants sauront nous dire quand leur lâcher la bride.

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  5. lamas
    lamas dit :

    excellent article! quel belle réflexion aussi! c’est une questions que je me suis déjà posé plusieurs fois par le passé.on fait parfois des gestes automatiques comme porter son enfant pour descendre du siège auto de la voiture alors que une main tendu simplement suffirait pour développer son autonomie..autre exemple vécu un enfant arrive à la crèche la maman le pose au sol,il pleure parce que cet univers lui est étranger certaines mamans vont le serrer très fort dans leur bras en accueillant les émotions « c’est un endroit nouveau pour toi ,tu n’est pas rassuré etc….alors que d’autres ont le même discours mais simplement s’agenouille à la hauteur de l’enfant lui caresse le visage etc…le message inconscient envoyé à l’enfant est différent celui ou la maman s’est agenouillé sera plus confiant pour aller jouer..

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    • Coralie
      Coralie dit :

      Merci de ce commentaire ! Je trouve ton exemple de la crèche très parlant en effet. C’est fou le nombre de messages implicites qu’on envoie à nos enfants sans en avoir bien conscience… Je trouve toujours intéressant de prendre de la distance ainsi pour y réfléchir.

      Répondre

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