Dans mon article sur la lutte contre le harcèlement scolaire , je vous ai déjà parlé d’Emmanuelle Piquet. Si sa méthode est à contre-courant, c’est principalement parce qu’il s’agit de travailler avec la victime.
En effet, les réponses traditionnelles, telles que l’intervention des adultes ou l’évitement, ne sont souvent pas suffisantes.
Emmanuelle Piquet, psychopraticienne spécialisée dans l’accompagnement des victimes de harcèlement, a développé une approche novatrice : la méthode à 180°. Cette méthode propose une réponse inattendue et stratégique pour permettre aux victimes de reprendre le contrôle de la situation.
Présentation de la méthode à 180°
La genèse de la méthode à 180°
La méthode à 180° est née des observations d’Emmanuelle Piquet lors de ses consultations avec des jeunes victimes de harcèlement. Elle s’est rendu compte que les solutions courantes – telles que fuir ou demander de l’aide extérieure – pouvaient renforcer le sentiment d’impuissance des victimes.
En effet, si l’enfant, ou l’adolescent, ne peut se défendre sans aide extérieure, cela confirme son rôle de victime, à ses yeux comme à celui de l’agresseur.
L’école de Palo Alto, d’où est issue Emmanuelle Piquet, encourage à observer le système dans son ensemble et ce qui y contribue. Dans le cas du harcèlement, certaines approches ne faisaient souvent qu’accentuer le problème, car elles ne modifiaient pas la dynamique relationnelle entre le harceleur et la victime.
Autre hypothèse : impliquer la victime dans la démarche de résolution va forcément porter ses fruits plus rapidement. Pourquoi ? Parce que c’est justement la victime qui a le plus interêt à ce que les choses changent !
C’est ainsi qu’elle a développé la méthode à 180°. Une approche basée sur la réplique inattendue et la déstabilisation de l’attaquant. Contrairement aux réponses classiques, la méthode d’Emmanuelle Piquet vise à retourner la situation en faveur de la victime en changeant radicalement l’interaction.
Les principes de la méthode à 180°
La méthode à 180° repose sur l’idée de répondre aux attaques par une attitude ou une phrase surprenante, parfois décalée. L’objectif est de déstabiliser le harceleur en lui retirant son pouvoir de nuisance. En agissant ainsi, la victime reprend le contrôle de la situation.
L’effet de surprise est essentiel dans cette méthode. Les harceleurs sont habitués à provoquer des réactions de peur, de colère ou de tristesse. En adoptant une attitude détendue et parfois humoristique, la victime prive le harceleur de ce qu’il recherche : une preuve de domination. La méthode ne consiste pas à nier ou minimiser le harcèlement, mais à trouver un moyen stratégique de neutraliser l’agression par un renversement de la situation.
Soyons honnête : la surprise vient déjà du fait que la victime sort de son rôle de victime.
J’ai conscience en écrivant ça d’être dangereusement proche du « Te laisse pas faire ! » qu’un parent pourrait lancer à son enfant sans plus de commentaire, ce qui va plutôt le faire se sentir incompétent…
Emmanuelle Piquet est tout à fait conscience qu’une telle injonction ne suffit pas.
L’idée, c’est d’aider réellement l’enfant à changer de posture. S’il suffisait de lui dire de le faire, il ou elle l’aurait déjà fait. Ce qui ne veut pas dire qu’il n’en est pas capable pour autant.
La méthode à 180° d’Emmanuelle Piquet va aider l’enfant à trouver comment répondre, et va prendre le temps de l’entrainement au besoin !
Il n’est pas nécessaire que la réponse soit agressive.
Dans bien des cas, l’humour permet de se sortir de situations plus que délicates.
👉🏻 Pour voir des exemples de réponses sans agressivité, visionnez l'intervention de Philippe Aïm diffusée lors du sommet du harcèlement scolaire entre le 2 et le 8 octobre 2024.
Cependant, cela n’est pas interdit dans la méthode à 180°.
L’idée portée par Emmanuelle Piquet, c’est que « l’inconfort change de camp ».
On peut être à l’aise ou pas avec cette idée. Ce qui est sûr, c’est que ça rompt avec le schéma classique !
Et quand on lit le livre plein d’exemples vécus, à destination des jeunes : « Je me défends du harcèlement », on a du mal à ne pas se sentir inspiré !
Intervention d’Emmanuelle Piquet en Avant-Première du Sommet
Emmanuelle Piquet est la première personne que j’ai contactée lorsque j’ai décidé d’organiser le sommet du harcèlement scolaire. Et j’ai été très touchée qu’elle accepte immédiatement de participer !
Moi qui doutais encore un peu de ce projet, ça m’a décidée à avancer.
Quelques mois plus tard, nous voici à la veille (ou presque) de ce sommet, et j’ai une surprise pour vous :
voici l’intervention d’Emmanuelle Piquet en avant-première.
J’espère qu’elle vous inspirera autant que ce qu’elle m’a inspirée.
👉🏻 Pour voir les interventions des autres experts, regardez le sommet du harcèlement scolaire du 2 au 8 octobre 2024.
Les résultats et impacts positifs de la méthode
La méthode à 180° a prouvé son efficacité à travers de nombreux témoignages. Des jeunes ayant appliqué cette approche rapportent un net changement dans leur quotidien. Les harceleurs, privés de leur pouvoir, se désintéressent rapidement de leurs victimes. La dynamique s’inverse, et les victimes retrouvent confiance en elles.
L’un des points qui m’ont marquée en lisant les ouvrages d’Emmanuelle Piquet, c’est le manque de confiance en nos enfants. Tellement d’adultes qui sont là pour les protéger… avec une bonne intention, bien sûr, mais… avec l’idée sousjacente qu’ils n’en sont pas capables eux-mêmes !
La méthode ne sera pas efficace pour tous, ou pas forcément rapide avant d’être efficace.
Au niveau des stats, voici ce qui ressort. « Dans 82% des cas, le problème a diminué significativement, trois mois après la fin de la thérapie menée dans un des centres A180°, selon l’avis des enfants victimes ou de leurs parents. »
Mais dans les cas où elle l’est, bon sang, quel bonheur de voir un enfant qui parvient par lui-même à faire face à l’agression sans perdre sa dignité !
Un jeune qui reprend confiance en soi, qui se sent plus fort. Un jeune qui a réussi à connecter la part en lui !
Certaines anecdotes sont carrément magiques…
Comme celle de Jean-Paul, que certains surnommaient « Popol », et qu’Emmanuelle Piquet raconte sur les réseaux.
Une histoire à la fois effrayante et incroyable !
Et juste pour terminer sur l’importance de se mettre à côté de la victime, un autre chiffre impressionnant : après avoir travaillé sa réponse, dans 50% des cas, l’enfant n’aura pas besoin de la mettre en place. Car sa simple posture aura changé, et le ou les intimidateurs s’en rendent compte !
C’est pas dingue, ça ?