Découvrir l’éducation positive nous encourage à sortir de l’imposition, à être beaucoup plus à l’écoute de nos enfants. C’est évidemment l’objectif, et c’est tellement chouette de partir à leur rencontre, de mieux les comprendre, de les considérer, enfin, comme les vraies personnes qu’ils sont.
Parfois, pourtant, cette bienveillance déborde un peu… A force de les écouter eux, on peut se perdre, soi.
Comment trouver l’équilibre ? Comment ne pas tomber dans cette tendance du « no limit », cette bienveillance poussée qui frôle la permissivité ?
C’est à cette question, posée par une lectrice à partir d’un cas concret, que je tente de répondre dans cette vidéo.
Et vous ? Quel exemple avez-vous d’un moment où vous avez senti que le positionnement était délicat ?
Si vous préférez lire, en voici également la retranscription.
Bonjour les parents qui cheminent, aujourd’hui je voudrais vous parler de la différence entre éducation positive et permissivité. Et la raison pour laquelle j’avais envie de vous parler de ça, c’est parce que j’ai reçu un message de Julie qui est inscrite aux 39 astuces d’éducation positive et qui apprend peu à peu à avancer sur le chemin de la parentalité positive en appliquant ces astuces.
Objectif : Confiance en soi
Des astuces qui aident à développer la confiance en soi
Elle dit que les astuces, tout comme les principes d’éducation positive, lui parlent beaucoup puisqu’elle est très attachée en particulier à développer la confiance en lui de son fils de 2 ans et demi et que c’est d’autant plus important pour elle qu’elle sent qu’elle a elle-même manqué de confiance en elle, qu’elle a été une petite fille sage, qu’elle n’avait pas tellement droit à la parole, qu’elle n’a pas fait de crise d’adolescence et qu’encore aujourd’hui, elle attend un petit peu qu’on lui dise quoi faire, sinon elle se sent un peu perdue.
L’écoute de soi
Donc Julie, pour toi, c’est vraiment un sujet important, cette confiance en soi et tu as reçu l’idée que l’éducation positive, comme elle écoute l’enfant, lui permet de s’écouter lui-même et donc de grandir en confiance en lui. Et tu as tout à fait raison, c’est vrai.
C’est-à-dire qu’aider quelqu’un, quel qu’il soit, enfant ou adulte, à écouter ce qui se passe pour lui et ne pas mépriser, rabaisser ce qu’il ressent, ce qu’il vit, ses opinions, ça l’aide à développer sa confiance en lui, en soi.
Donc ça, c’est vraiment un point important.
Limites et permissivité – conflit avec le partenaire
En revanche, il est très important de faire la différence entre le fait d’écouter ce qui se passe pour quelqu’un et le fait de résoudre la situation ou de répondre à toutes ses envies.
Donc, on peut tout à fait recevoir le fait que l’enfant a des envies particulières sans forcément lui concéder ces envies-là. Et c’est pour ça que je fais le lien avec cette idée de permissivité.
Parce que Julie dit qu’elle a du mal à appliquer ces conseils-là justement, tout en restant un petit peu ferme.
Elle dit : « je suis une gentille, j’aime faire plaisir et j’ai du mal à me mettre en colère ».
Alors d’abord, quelle chance !
D’un certain côté, je lis que tu as du mal à te mettre en colère… et ‘on est nombreux à être dans la situation inverse, à se mettre trop facilement en colère.
Mais en l’occurrence, tu expliques que cela crée des soucis avec ton compagnon qui donc te voit appliquer certaines astuces, en considérant que parfois ça va trop loin et que pour lui, cette éducation positive finalement, c’est une forme de permissivité.
Donc voilà pourquoi je voulais répondre à cette question-là, puisque Julie vient de me partager une anecdote précise, un moment qui s’est passé entre eux et qui a créé donc un conflit avec son partenaire puisqu’ils n’avaient pas la même façon d’aborder les choses.
L’anecdote
L’anecdote est la suivante
Julie et son partenaire veulent aller chez le boucher à vélo avec leur petit garçon sur le siège vélo.
Mais le petit garçon décide qu’il veut plutôt prendre sa draisienne.
Il décide donc de prendre la draisienne et au bout de peu de temps, finalement non, plutôt retourner sur le siège vélo de maman.
À ce moment-là, ils sont déjà partis de chez eux, il y a déjà eu discussion sur la draisienne alors que ça allait prendre plus de temps qu’avec juste les vélos des parents, donc ils ont pris le siège auto.
La draisienne a été prise, le petit garçon change d’avis et comme ils sont encore plus proches de chez eux que de chez le boucher, Julie se dit : « Bon, on n’a qu’à retourner à la maison, reposer la draisienne et repartir. »
Et au bout d’un moment, le compagnon dit : « Non mais ça suffit quoi, en fait, il n’y a pas de limite, on dit oui à tout, donc ça ce n’est pas de l’éducation. »
Voilà le point de départ de cette conversation…
Tout le monde a raison
Alors, quelque chose sur lequel je voudrais insister, qui est très important avant même de parler d’éducation positive ou permissivité, c’est de dire que souvent dans un conflit, en l’occurrence dans le conflit entre Julie et son compagnon, on tourne en boucle sur des variations de « j’ai raison » et « tu as tort ».
Et ce que je voudrais essayer de vous offrir aujourd’hui comme autre perspective, c’est qu’en fait, régulièrement, on est dans des situations dans lesquelles tout le monde a raison.
Et voir les choses comme ça, ça change tout.
Faire la différence entre les besoins et les stratégies
Alors qu’est-ce que ça veut dire ?
Ça veut dire que si on se connecte aux envies profondes, aux besoins qu’on a derrière nos comportements, on a toutes et tous de bonnes raisons d’agir. Donc ce que je veux dire, c’est que ces raisons-là sont toutes de bonnes raisons.
Donc par exemple, Julie, en écoutant son fils, en voulant suivre ses envies, etc., elle a une inspiration à justement changer le mode « imposition » dans lequel on est régulièrement dans notre société en termes d’éducation.
Et elle aspire à l’aider, à développer sa confiance en lui en pouvant justement avoir son libre arbitre, imposer son point de vue, etc.
Et ça, je ne pense pas que son compagnon ne soit pas d’accord avec ça.
Je pense qu’il est d’accord avec l’idée qu’à terme, il aimerait aider son fils à développer sa confiance en lui. Il n’est juste pas d’accord avec la stratégie pour l’atteindre, ce qui est complètement différent.
Alors, à l’inverse, le compagnon de Julie, il a un besoin fondamental qui est de justement poser ses limites, de se respecter lui-même également, parce que lui n’a pas envie de se lancer dans toute une conversation avec son fils, puis, finalement, une fois que le choix a été fait, de retourner à la maison pour reposer, etc.
Il a envie de respecter son propre rythme.
Et ça aussi, on est tous d’accord sur le fait que c’est bien de vouloir respecter son propre rythme, et je dirais même que se respecter soi-même, c’est aussi un exemple, un modèle qu’on donne à nos enfants sur comment on peut se respecter soi-même quand en face de nous, il y a d’autres gens qui cherchent à remettre en cause notre propre fonctionnement.
Donc, là encore, la différence entre Julie et son compagnon, c’est vraiment une question de stratégie, de ce qu’ils vont mettre en place pour répondre à ces besoins-là.
Mais dans le fond, ils ont tous les deux raison de répondre à leurs propres besoins.
Donc, quand on aborde les choses comme ça, déjà, ça peut vraiment changer les choses, parce que si on peut se dire que tout le monde a raison, que nos besoins sont les mêmes, et que la question, c’est quelle stratégie on va adopter pour répondre à ça, eh bien, ça permet d’ouvrir le dialogue.
Donc, on peut tout à fait, en l’occurrence, se saisir de ça ! Parce que Julie dit justement : « je suis une gentille », elle peut savourer quelque part la chance qu’elle a d’avoir un compagnon qui va l’aider à garder un cadre, finalement.
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Note : si vous voulez réussir à parser sereinement des désaccords éducatifs dans le couple, voyez quand aura lieu la prochaine session de ma formation à ce sujet !
D’une relation verticale à une relation horizontale
La relation verticale de notre société
Parce que (et c’est là que je reviens à cette idée d’éducation positive et de permissivité) dans notre modèle de société, on a en général, entre les enfants et les parents, un modèle très vertical, avec l’adulte en haut, l’enfant en bas, et l’enfant doit obéir, parce que “je te le dis” / “c’est comme ça”.
Donc, quand on découvre l’éducation positive, l’un des premiers pas, l’une des premières choses qu’on fait, c’est qu’on essaye de sortir de cette relation verticale (et j’en parle souvent, ou si vous m’avez déjà vue en conférence, etc., vous m’avez sûrement déjà vue faire ce geste).
On veut sortir de cette relation verticale dans laquelle l’enfant est juste sous l’adulte, et donc ne risque pas de développer sa confiance en lui, parce qu’il est inférieur, clairement, dans notre relation avec lui.
On lui montre au quotidien qu’il est inférieur, qu’il n’a pas droit à la parole, qu’il n’a pas d’importance, réellement.
Et donc, on veut sortir de là, et se mettre à l’écouter, etc.
C’est ce que fait Julie, et bravo pour ça.
La relation verticale inverse
Le piège, c’est que quand on fait ça « à outrance », on risque de basculer dans une relation verticale inverse, dans laquelle, en fait, on ne s’écoute plus du tout nous-mêmes, c’est l’enfant qu’on met au-dessus.
Et ça, ça ne vaut pas non plus, en fait, parce qu’on n’est pas non plus en train de lui donner un modèle qui correspond à de la coopération.
Donc, évidemment, le petit garçon a deux ans et demi, il est petit, mais ce sont déjà des attitudes qu’on fait passer, en fait, derrière nos actions et nos messages. Donc, c’est ça que craint le compagnon de Julie, c’est de se retrouver dans une relation verticale inverse.
Et ce n’est pas ce qu’on veut non plus, parce que dans ces cas-là, on n’est plus dans une relation adulte-gagnant-enfant-perdant, mais on est dans une relation enfant-gagnant-adulte-perdant.
Et c’est horrible ces termes-là, parce que c’est comme si on était justement dans une bataille avec nos enfants, il y a un gagnant et il y a un perdant.
La relation horizontale de l’éducation positive
L’éducation positive, elle, suggère de sortir de la lutte, justement, sortir de la bataille et de passer dans une relation horizontale, où on est gagnant-gagnant, où on va s’écouter les uns les autres.
Et ça, ça change tout dans la façon dont on va avancer.
Évolution dans la posture
Sortir de la verticalité
Donc, les astuces de mes 39 astuces, Julie, tu as raison de les mettre en place et de vouloir les développer pour sortir de cette relation verticale…
Le tout, c’est de ne pas t’oublier dans ce basculement.
Et c’est compliqué, parce que quand on n’a pas confiance en soi et qu’on essaye de suivre ce qu’on nous dit et de l’appliquer à la lettre, on peut se retrouver dans l’autre sens.
Alors, je crois que le petit bout qui manque (et tu vas le voir dans la suite de la formation), c’est cette idée de ne pas t’oublier toi-même, de te respecter toi-même et de ne pas considérer qu’écouter ton enfant, ça veut dire que tout ce qu’il vit doit être résolu, que tout ce à quoi il aspire doit être validé (alors, validé dans la théorie, oui, mais doit être mis en pratique). Voilà, c’est ça.
Écouter sans concéder
En CNV (communication non violente), on dit qu’il est important d’identifier ses besoins, mais ça ne veut pas dire qu’on va systématiquement les nourrir. Et en fait, elle est là, la différence.
Donc, ce qui va vous permettre d’installer une relation horizontale, gagnant-gagnant, avec votre enfant, c’est d’écouter ce qui se passe pour lui, beaucoup plus que ce qu’on fait habituellement.
Mais d’écouter également ce qui se passe pour vous, et ça, on n’a pas appris à le faire. Et c’est ce qui arrive à Julie, qui dit : « je n’arrive pas à me mettre en colère ». Elle ne sait pas encore écouter ce qui se passe pour elle.
Et ça, peut-être que finalement, ton compagnon peut t’y aider, parce que lui, il a cette aptitude, quelque part, à écouter ce qui se passe pour lui.
Alors, on va sortir de l’imposition en disant : « non, tu ne prends pas ta draisienne et c’est tout, parce que c’est comme ça », on va écouter ce qui se passe pour l’enfant.
Pour autant, ça ne veut pas dire qu’on va lui concéder et répondre à tout ce à quoi il aspire.
Concrètement, ce que ça peut donner
Donc, typiquement, ça peut être quelque chose du type : « ah oui, toi, tu as très envie de la draisienne, où est-ce qu’on pourrait la mettre pour ne pas oublier d’aller faire un tour à draisienne quand on revient de chez le boucher ? »
Et là, tu vois, tu es en train d’entendre ce qu’il vit et à la fois de lui montrer que tu réponds à ce qu’il vit, mais sans changer pour autant l’idée que vous allez aller à vélo chez le boucher.
Je ne sais pas si cette distinction te parle, Julie, et puis tous les parents qui nous écoutent, parce que je pense qu’on a tous fait face à des situations comme ça et ça revient encore et c’est important d’y réfléchir.
Mais c’est ça, en fait, l’idée.
Et puis, si on est à l’étape suivante et que l’enfant, finalement, décide qu’il n’a pas trop envie de sa draisienne, on peut recevoir cette information.
On peut dire : « ah, c’est compliqué, parfois, on fait des choix et puis finalement, on a envie de changer d’avis » et on va quand même l’aider en lui disant, par exemple : « est-ce que ce serait plus facile de faire d’abord le pied droit ou d’abord le pied gauche quand tu pousses sur ta draisienne ? Quel est le pied qui est le plus facile ? »
Et hop, on le remet sur l’idée draisienne.
Se respecter sans rabaisser l’enfant
C’est-à-dire qu’on l’encourage à persévérer, à faire face aux difficultés de la vie. On a entendu ce qu’il vivait, on reçoit ce qu’il vit, on ne lui dit pas : « ah, mais ça suffit, tu n’arrêtes pas de changer d’avis ».
Et on ne le diminue pas, on arrête de le laisser dans une position inférieure et pour autant, ça ne veut pas forcément dire : « c’est possible aussi de décider de retourner chez soi pour repousser la draisienne. » Je ne dis pas qu’il ne faut jamais céder à un enfant, je ne suis pas dans une lutte.
Ce que je dis, c’est d’être dans une relation justement horizontale dans laquelle on s’écoute aussi. Donc peut-être que Julie, c’est ce qu’elle fait puisqu’elle, elle dit que ça ne lui pose pas de problème de retourner.
Mais c’est ok si on entend aussi le besoin en l’occurrence du compagnon qui est « l’idée n’est pas non plus de faire tout ce que l’enfant veut. »
Et effectivement, l’éducation positive, ce n’est pas la permissivité, c’est respecter l’enfant et c’est aussi se respecter soi-même.
Et du coup, on va, avec ça, lui montrer aussi comment on fait pour se respecter soi-même, mais avec bienveillance, avec douceur, tout en écoutant l’autre et sans le rabaisser.
Conclusion
Voilà, j’espère que toute cette discussion à partir de cet exemple, (et je te remercie Julie de nous l’avoir fourni), vous aidera à voir un peu comment faire cette différence entre l’éducation positive, bienveillante, cette bienveillance qu’on cherche à apporter au quotidien à nos enfants et à la fois réussir à se respecter soi-même pour être dans un rapport un peu plus horizontal avec nos enfants.
Pensez à partager ce contenu avec d’autres parents que ça pourrait intéresser et si vous voulez également faire vivre des astuces au quotidien dans votre famille, inscrivez-vous à la formation 39 astuces d’éducation positive que vous trouverez sur la page formation du blog.
À bientôt !