Comment écouter un enfant qui ne veut pas parler ?
J’ai reçu cette question qui me semble intéressante : comment écouter un enfant qui ne veut pas parler ? En effet, il arrive que nous abordions notre enfant plein de bonnes intentions d’écoute, et même d’écoute active, et qu’il reste silencieux. Comment réagir à ce silence ? Cela signifie-t-il que notre posture n’est pas bonne ?
Les trois grandes failles de notre ecoute
Il est fréquent (mais non systématique) que notre enfant n’ait pas envie de parler parce qu’il ne croit pas vraiment à notre capacité d’écouter. Probable en effet que celle-ci comporte effectivement des failles ! Cela vaut donc la peine de commencer par voir quelles peuvent être ces failles.
Faille numéro 1 : écouter toujours
L’écoute est une compétence relationnelle fondamentale, que ce soit avec nos enfants ou avec les adultes qui nous entourent. Cela ne signifie pas pour autant qu’il faut y avoir systématiquement recours.
Dans la vie quotidienne, bien des situations ne nécessitent pas une grande attention.
Je ris en m’imaginant ce que serait notre vie si nous cherchions à être en mode “écoute active” à tout instant ! Imaginons par exemple que mon fils me dise “Maman, tu peux me passer le sel ?”, je ne vais pas lui répondre “Ah… Tu voudrais que je te passe le sel ?”
Si nous y avons recours trop souvent, notre écoute manquera de sincérité. Alors, il y a fort à parier que notre enfant parlera moins. Sachons écouter sans abus.
L’écoute vraie, celle qui nous implique sincèrement, est celle que nous emploierons lorsque nous constaterons que notre enfant a besoin de partager. Nous lui servirons alors de miroir pour avancer, si nous parvenons à éviter la faille numéro 2 : celle de juger.
Faille numéro 2 : écouter en jugeant
C’est probablement l’attitude la plus difficile à corriger.
Il nous est en effet souvent impossible de faire taire notre petite voix intérieure qui nourrit nos pensées par rapport à ce que nous raconte notre enfant.
Le problème est le suivant : plus nous exprimerons des jugements (voire des reproches) face à ce que nous raconte notre enfant, plus il se mettra sur la défensive.
Alors, de nouveau, il aura de moins en moins envie de nous parler. Evidemment.
Je sais… je sais que parfois on a complètement “raison” de réagir comme nous le faisons ! Qu’on lui avait déjà dit qu’il ne devait pas faire ci ou ça.. Qu’il est impossible de ne pas lui dire que ce n’était pas une bonne idée… Je sais…
Voyons dans ce cas les choses sous l’angle positif : sachant que cela ne nous plairait pas, il a eu d’autant plus de courage de nous en parler !
Dans ce cas, posons-nous la question suivante : qu’est-ce qui est le plus précieux ? Lui faire la leçon, ou m’assurer que mon enfant continue de me parler au lieu de me mentir ?
Car plus nous ferons la morale, moins nous l’encouragerons à nous parler.
J’ajouterai que de toute facon, plus nous communiquerons notre jugement, moins il le recevra. Donc, même sur le coup, notre message ne passera pas.
Sachons faire confiance à notre enfant : s’il a la liberté de s’exprimer, il saura prendre lui-même le recul nécessaire sur la situation. Il saura conclure qu’il aurait dû agir autrement.
D’ailleurs, souvent, il le sait déjà, il n’a pas besoin de nous pour le lui dire.
Au contraire, il a besoin de notre acceptation pour se rendre compte qu’il est normal de faire des erreurs, que nous sommes dans son équipe, que nous ressentons à son égard un amour inconditionnel, et que, quoi qu’il advienne, nous serons là pour l’aider à apprendre et à grandir.
Alors, il pourra trouver la solution en lui.
Faille numéro 3 : Ecouter avec un objectif
Il y a des situations qui nous posent problème à nous, et pas à notre enfant.
Il y a des situations qui posent problème à notre enfant, et pas à nous.
Je trouve que cette approche, présentée par Thomas Gordon, aide vraiment à ajuster notre posture à la situation. Dans Parents efficaces au quotidien, Thomas Gordon parle de zones d’acceptation, au sujet desquelles je vous ferai un article dédié.
Sans entrer trop dans la théorie ici, comprenons simplement que l’écoute est vitale lorsque notre enfant nous parle d’une situation qui lui pose problème.
Une frustration, une difficulté… Parce que, de nouveau, nous pourrons être là pour l’entourer.
En revanche, si le problème est purement nôtre, ce n’est pas l’écoute simple qui permettra de changer les choses. Si nous écoutons avec cet objectif en tête, nous allons tout droit à l’échec.
Prenons un exemple.
Imaginons un jeune ado qui, chaque jour, rentre de l’école, jette son cartable et ses chaussures dans l’entrée, sort de quoi goûter, et laisse tout en plan ensuite.
Clairement, la situation posera problème au parent. Malheureusement pour nous, pas à l’enfant.
Dans ces conditions, ce sera donc à nous d’exprimer ce qui nous pose problème, plus que de chercher à écouter ce qui se passe pour l’enfant. (Pour cela, c’est probablement le message JE qui sera le plus efficace, et je note que je dois également écrire un article là-dessus !)
Si c’est dans ce contexte que nous cherchons à écouter, il n’est pas surprenant que l’enfant ne parle pas : je dirais presque que cela ne le concerne pas… Je le répète : cette fois, c’est plutôt à nous de parler.
J’apporterai quand même un bémol ici, qui est d’importance, même si cela sort du cadre du thème qui nous intéresse aujourd’hui.
Si notre communication sous forme de message JE n’apporte pas ses fruits, il nous faudra entrer dans une recherche de solution.
Dans ce cas, effectivement, nous passerons par une étape d’écoute de notre enfant. Nous essayerons de comprendre ce qu’il se passe pour lui au moment où il rentre de l’école. Pourquoi les choses restent en plan. Est-ce qu’il est fatigué, est-ce qu’il oublie, est-ce qu’il ne se rend pas compte ? Et là, il faudra pouvoir écouter sans juger… Mais cette fois, l’objectif aura été annoncé : nous nous serons assis avec lui en lui expliquant que nous cherchons à régler la situation.
Ecouter ou se taire
A présent que nous en sommes conscients, nous cherchons à mettre en place une écoute sans faille. Et malgré cela, notre enfant ne s’ouvre toujours pas à nous…
Laisser le temps au temps
Il va falloir faire preuve de patience. Nous changeons, nous en sommes convaincus, mais notre enfant ne l’est pas encore. Il nous a trop entendu avant, il a besoin de se sentir de nouveau en confiance pour avoir envie de partager.
Ne cherchons pas à précipiter les choses. Allons-y doucement.
Etre disponible pour bien écouter
Dans les moments où notre enfant veut nous raconter quelque chose – que ce soit une difficulté ou une joie, il s’agit d’être disponible pour lui donner vraiment toute notre attention.
Or, ce n’est pas toujours le cas.
Si nous sentons que nous ne le sommes pas, il vaut mieux le lui communiquer avec sincérité.
Cela donnera :
“J’ai vraiment envie d’entendre ce que tu as à me dire, et je suis occupée pour le moment. Tu peux attendre quelques minutes ?”
ou bien
“Mince, je voudrais rester et t’écouter, mais je dois préparer le diner… Tu viendrais dans la cuisine avec moi pour me le raconter en même temps ?”
ou bien
“Ecoute, je suis désolée, je dois absolument terminer ce que je fais, et je sais que je ne vais pas pouvoir bien t’écouter en même temps. Tu voudrais bien garder cette histoire pour le diner ?”
Il se peut que cela frustre notre enfant. Et en même temps, ne vaut-il pas mieux le frustrer sur le moment, et être ensuite bien disponible pour lui que d’essayer de faire tout à la fois et de ne pas vraiment l’entendre ?
Plus il prendra l’habitude d’être pleinement écouté lorsqu’il se confiera, et non d’une oreille distraite, plus notre enfant aura envie de nous parler.
Ouvrir le dialogue
Pour encourager l’enfant à commencer à parler, l’écoute n’est pas toujours la meilleure technique.
Parfois, il est plus efficace d’ouvrir simplement le dialogue.
“Tu voudrais me parler de… ?”
En effet, l’écoute facilite la communication, mais elle ne la crée pas. C’est seulement lorsque l’enfant aura commencé à s’exprimer que nos capacités d’écoute se révéleront un réel atout.
Donner l’exemple
Comme toujours, ce que nous faisons a souvent plus d’impact que ce que nous disons. Ainsi, si nous désirons encourager nos enfants à nous parler, le plus simple et souvent de leur parler également.
Racontons ce qui nous est arrivé dans la journée, nos réussites, nos difficultés, nos erreurs. Alors, nous inviterons réellement à l’échange.
Accepter le silence
Malgré tout, il y a des personnes plus enclines à partager que d’autres. Les enfants n’échappent évidemment pas à cette règle. Si ce n’est pas notre cas, il faudra quand même l’accepter chez notre enfant, que nous acceptons tel qu’il est.
Si cela est un problème pour nous, il n’est pas interdit de l’exprimer, mais nous ne pourrons pas le contrôler et le faire changer. L’acceptation, dans ce processus, est clef.
Car c’est de l’acceptation que nait le désir de partage.
Qu’en pensez-vous ?
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